Louis VI le Gros ou le Batailleur (suite)
Mais il agit aussi en tant que suzerain en Normandie, où il soutient en vain les droits de Robert Courteheuse et de son fils Guillaume Cliton contre leur frère et oncle, le roi d’Angleterre Henri Ier Beauclerc ; au terme de deux rudes campagnes (1109-1113 et 1116-1120), Louis VI, vaincu à Brémule le 20 août 1119, est contraint de renoncer à ses projets, que son adversaire déjoue une nouvelle fois au cours d’une troisième guerre (1123-1127). Intervenant en Flandres pour punir les assassins du comte Charles le Bon en 1127, le roi de France ne réussit pas à lui donner pour successeur son protégé, Guillaume Cliton, qui est déposé dès 1128 au profit de Thierry d’Alsace, faute d’avoir respecté les privilèges des grandes villes de la principauté.
Finalement, c’est en accordant son appui juridique aux forces socio-économiques qui s’épanouissaient à l’intérieur des grands fiefs que ce roi soldat réussit à affaiblir l’autorité et le prestige de ses grands vassaux. Ainsi, il favorise l’émancipation du clergé dans le cadre de la réforme grégorienne à condition de se réserver le droit d’accorder la permission de présider à l’élection des évêques et dans la mesure où cette émancipation affaiblit le pouvoir de ses vassaux dans son royaume et non le sien dans son domaine. Ainsi, il soutient l’établissement de communes* en Flandre et en Picardie, alors qu’il maintient les villes de son domaine royal dans une étroite dépendance et qu’il ne concède à des communautés rurales que des privilèges financiers et économiques, mais non politiques, à l’exemple des coutumes de Lorris en Gâtinais, qui servent de charte modèle pendant tout le xiie s. Par là se trouve renforcée l’autorité d’une royauté dont le prestige s’affirme d’abord en 1124, lorsque l’empereur Henri V, gendre et allié de Henri Ier Beauclerc, n’ose affronter son armée en rase campagne ; mais il s’affirme aussi lorsque, en 1137, le duc d’Aquitaine Guillaume X choisit pour épouser sa fille et unique héritière, Aliénor, le futur Louis VII, dont le domaine s’étend brutalement de l’Oise aux Pyrénées.
P. T.
➙ Capétiens / Commune médiévale / Louis VII le Jeune.
A. Luchaire, Recherches historiques et diplomatiques sur les premières années de la vie de Louis le Gros, 1081-1100 (A. Picard, 1886) ; Louis VI le Gros. Annales de sa vie et de son règne, 1081-1137 (A. Picard, 1889 ; réimpr. Culture et civilisation, Bruxelles, 1964) ; les Premiers Capétiens, 987-1137, dans Histoire de France, sous la dir. d’E. Lavisse (Hachette, 1901).