Lorenzetti (les) (suite)
Les fresques de San Francesco de Sienne (1324-1327) ont un caractère giottesque plus affirmé ; d’une grande aisance, elles élargissent les limites de l’art d’Ambrogio en y apportant un souffle animé, un ton plus dramatique. Dans les Histoires de saint Nicolas de Bari (v. 1332, Offices), le peintre intègre la nature dans son espace pictural (scène maritime) et multiplie les trouvailles iconographiques. Artiste à la pointe des recherches du temps, il influence à cette époque des peintres florentins comme Bernardo Daddi.
Le plus beau témoignage de son œuvre est la fresque monumentale du Palais public de Sienne, les Allégories et effets du bon et du mauvais gouvernement à la ville et à la campagne (1337-1339). Ambrogio n’y apporte aucune révolution picturale, mais il exploite tous ses dons poétiques et intellectuels en maniant parfaitement la technique de la fresque.
La grande Vierge en majesté peinte avec un art consommé pour la loggia du même Palais public (1340) permet de dater la Madonna del Latte (séminaire de San Francesco, Sienne), chef-d’œuvre sur le plan de la forme et de l’expression, et la Madone entourée d’anges et de saints de la pinacothèque de Sienne. Dans la Présentation au Temple (1342, Offices), tous les éléments narratifs tendent à rendre intense et solennelle la prédiction du vieux Siméon. Les recherches spatiales atteignent ici l’illusionnisme et le fantastique, en même temps que la structure des personnages témoigne d’un goût pour les formes calmes et tranquilles qui se retrouve dans l’Annonciation de la pinacothèque de Sienne (1344). Comme son frère, Ambrogio disparaît certainement au cours de la peste de 1348.
Un renouveau siennois
Au début, Pietro et Ambrogio Lorenzetti prennent des directions différentes, bien que s’appuyant tous deux sur la connaissance de Giotto et de la sculpture toscane. Pietro a un sens très personnel du drame ; Ambrogio est plus détendu. Tous deux jouent avec bonheur, dans une unité de vision parfaite, des constructions de la perspective médiévale. L’un et l’autre créent des personnages calmes, pyramidaux, qui s’opposent à l’architecture. Ils ont le même souci expressif — Ambrogio décrivant très subtilement une grande variété de dispositions psychologiques — et cherchent la même ouverture vers les aspects du monde contemporain. Sur le plan pictural, la manière est plus large chez Pietro, plus riche d’effets plastiques chez Ambrogio, mais tous deux tendent à la création d’un langage clair, d’un nouveau classicisme. Grâce à eux, l’influence de Sienne* sera déterminante dans la définition d’un art ni byzantin ni gothique, mais typiquement italien.
F. P.
G. Sinibaldi, I Lorenzetti (Florence, 1933). / G. Rowley, Ambrogio Lorenzetti (Princeton, N. J., 1958 ; 2 vol.). / E. Carli, I Lorenzetti (Milan, 1960). / E. Borsook, Ambrogio Lorenzetti (Florence, 1966).