Loir-et-Cher. 41 (suite)
Trois grandes vallées tranchent avec les plateaux. Entre Perche et Beauce, les Vaux du Loir, bordés d’abris troglodytiques creusés dans le tuffeau (Troo), portent de grasses prairies (vaches laitières, bêtes à l’engrais), attirent à deux heures de Paris les résidences secondaires ; Vendôme, ancienne capitale de comté, sous-préfecture, en tient le principal passage (18 547 hab.). Entre Sologne et Berry, la vallée du Cher se consacre aux céréales et aux fourrages, s’ourle de vergers et de vignobles (caves de champagnisation de Montrichard), exploite des champignonnières (Bourré), élève autour de Selles-sur-Cher des chèvres (fromages) ; Selles-sur-Cher (4 656 hab.), Saint-Aignan (3 680 hab.), Montrichard (3 857 hab.) sont des centres de villégiature. Le Val de Loire est, des trois sillons, le plus opulent. Coupant, entre Beauce et Sologne, le département à peu près en son milieu, il combine sur ses sables fins limoneux la culture des céréales, des oléagineux, des légumes de plein champ (asperge de Vineuil), l’élevage laitier, adosse à ses coteaux calcaires des vignobles réputés (gamays rosés de Mesland). À l’abri d’un éperon précocement fortifié, Blois en commande la meilleure position (61 437 hab. pour l’agglomération).
Le Loir-et-Cher a une économie trop diversifiée pour tenir dans la production française un rang éminent. Il ne s’en distingue pas moins par ses vins, ses fruits, ses légumes (le quart de la production française d’asperges), ses bois. Haut lieu de la Renaissance, il concentre, dans un cadre de forêts royales (Blois, Russy, Boulogne), des trésors d’architecture (châteaux de Blois, Chambord*, Cheverny, Chaumont-sur-Loire) qui lui confèrent un prestige touristique universel. Il s’industrialise. Héritier d’un vieil artisanat rural (forges dans le Perche, ganterie à Vendôme, travail de la laine en Sologne, tanneries, laiteries), ouvert à la décentralisation parisienne, il fabrique du matériel automobile et aéronautique (Blois), électrique (Vendôme, Romorantin-Lanthenay), sanitaire (Selles-sur-Cher), de literie (Mer), d’armement (Salbris). Blois a une importante chocolaterie, Vendôme, une grande imprimerie. Deux tranches nucléaires à Saint-Laurent-des-Eaux produisent 5,5 TWh ; un dôme souterrain à Chémery, en Sologne, tient en réserve régulatrice de distribution un milliard de mètres cubes de gaz de Lacq. Tandis que le secteur primaire, pressé par la mécanisation et la concentration des terres, tombait entre 1954 et 1975 de 49 à 18 p. 100 des actifs (50 p. 100 d’exploitations en moins), le secteur secondaire s’élevait de 25 à 40 p. 100 (de 28 000 à 44 000), suivant le secteur tertiaire (42 p. 100).
Le réseau urbain s’est hiérarchisé (46 p. 100 de citadins en 1975 contre 31 p. 100 en 1954). Mais un long exode (53 000 entre 1851 et 1962) a vidé les campagnes et vieilli la population. La densité moyenne (45 hab. au km2) est, avec celles du Cher et de l’Indre, la plus basse des pays de Loire ; l’accroissement naturel est lent (0,4 p. 100 par an). En progrès depuis 1954, le Loir-et-Cher a dépassé son maximum du siècle dernier (280 392 hab. en 1891).
Le Loir-et-Cher est l’un des départements français dont l’unité s’est le plus mal réalisée. Étranglé à la hauteur du Val par le Loiret et l’Indre-et-Loire, il n’a pu se trouver, en 1790, que sur des régions écartées. Allongé sur 130 km du Maine au Berry, perpendiculairement aux vallées, il se brise au contact de chacune d’elles. Blois, son chef-lieu, contrarié dans son développement par le voisinage d’Orléans et de Tours, le couvre mal de son autorité : Vendôme a toujours manifesté vis-à-vis de lui une forte autonomie ; Lamotte-Beuvron bascule sur Orléans, la vallée du Cher sur Tours. Les grandes relations routières et ferroviaires ne se nouent qu’au dehors (Orléans, Tours, Vierzon). Ce sont les structures régionales, administratives, judiciaires, ecclésiastiques, le réseau d’autocars qui rétablissent l’harmonie. Le qualificatif de loir-et-chérien a prévalu sur celui d’orléanais.
Y. B.
➙ Blois / Centre (Région) / Orléanais.
Y. Babonaux, Villes et régions de la Loire moyenne (Touraine, Blésois, Orléanais). Fondements et perspectives géographiques (S. A. B. R. I., 1966).