Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Anoures (suite)

La protection des œufs peut être due, dans d’autres cas, aux soins parentaux eux-mêmes. L’Alyte mâle promène ses cordons d’œufs enchevêtrés sur ses pattes postérieures et les humecte de temps en temps jusqu’à ce que survienne l’éclosion. Les Grenouilles venimeuses d’Amérique tropicale (genres Dendrobates et Phyllobates) portent leurs larves sur le dos, jusqu’à ce qu’elles trouvent une mare convenable.

Le dernier mode de protection consiste à supprimer totalement le stade aquatique larvaire. Les œufs sont conservés dans une poche marsupiale dorsale, dont on peut suivre l’évolution chez diverses espèces de Rainettes sud-américaines. Les femelles des Crapauds de Surinam portent aussi leurs œufs sur le dos : une croissance accélérée des téguments vient entourer chaque œuf d’une petite logette que ferme un opercule. Chez le Rhinoderme de Darwin, le mâle avale les œufs au moment où les embryons commencent à se mouvoir dans leurs coques, et il les garde dans ses sacs vocaux jusqu’à ce que la métamorphose soit achevée. Enfin, les Nectophrynoïdes des montagnes d’Afrique sont vivipares. Des têtards à longue queue éclosent dans les oviductes, s’y nourrissent d’un « lait utérin » sécrété par la femelle, et sont mis bas une fois la métamorphose effectuée.

R. B.

➙ Amphibiens.

anoxie

État biologique au cours duquel les tissus reçoivent une quantité insuffisante d’oxygène. Dans la majorité des cas, le terme d’hypoxie (hypo, préfixe indiquant la diminution) serait plus adapté que celui d’anoxie (a privatif). L’habitude, en fait, est d’employer indifféremment l’un ou l’autre.



Mécanismes de l’anoxie

Toute anoxie s’explique par une perturbation des phénomènes impliqués dans l’oxygénation tissulaire. Celle-ci, pour l’homme et les animaux supérieurs, peut être schématisée comme suit :
— une source d’oxygène, l’air ambiant ;
— un dispositif d’extraction de l’oxygène de cet air ambiant, le poumon. C’est à son niveau que se font, régis par des gradients de pression, les échanges entre un air alvéolaire régulièrement renouvelé par la ventilation pulmonaire et le sang capillaire pulmonaire, non moins régulièrement renouvelé par le jeu de la pompe cardiaque. Ces échanges alvéolo-capillaires se traduisent par une absorption d’oxygène (O2) et une élimination de gaz carbonique (CO2) ;
— un circuit de distribution aux tissus, la circulation sanguine. L’oxygène sanguin est sous deux formes interchangeables :
1. Oxygène dissous, que mesure la pression partielle d’oxygène (p O2). Celle-ci, dans le sang qui va aux tissus (sang artériel), est supérieure à 80 mm Hg ; dans le sang qui en revient (sang veineux), elle est de l’ordre de 40 mm Hg ;
2. Oxyhémuglobine (HbO2), c’est-à-dire une combinaison oxygène-hémoglobine des globules rouges. À l’état normal, dans le sang artériel, cette hémoglobine est saturée à 95 p. 100. Un très riche réseau de capillaires sanguins permet un contact direct entre les tissus et le sang, et partant des échanges. Ceux-ci dépendent des gradients de pression O2, CO2 entre sang et tissus, ainsi que du temps de contact tissus-sang.


Les différents types d’anoxie

• L’anoxie artérielle, ou anoxie anoxique (ou anoxémie), se caractérise par une p O2 artérielle inférieure à la normale, alors que la quantité d’hémoglobine circulante et la circulation sanguine sont normales ou élevées. Une telle anoxie s’observe lorsque la p O2 de l’air inspiré est insuffisante (altitude, air confiné, etc.), lorsque la mécanique ventilatoire est insuffisante (paralysie, obstruction, pneumothorax, etc.), lorsque les échanges alvéolo-capillaires sont perturbés par une pneumonie, une inondation alvéolaire (noyade ou œdème), un bloc alvéolo-capillaire, etc., lorsque enfin existe une contamination du sang artériel par le sang veineux (shunt), comme c’est le cas dans certaines malformations cardiaques.

• Dans l’anoxie anoxhémique, la p O2 artérielle est normale, tout comme la circulation, mais il existe un manque d’hémoglobine (anémie), ou bien encore l’hémoglobine, quantitativement normale, est saturée par un corps qui prend la place de l’oxygène, tel l’oxyde de carbone (CO) ; quelquefois, il s’agit d’une hémoglobine altérée par contact avec des nitrites ou certains médicaments, et qui devient incapable de se combiner à l’oxygène (méthémoglobine).

• Une troisième variété d’anoxie est liée à un ralentissement circulatoire. Celui-ci peut être généralisé : insuffisance cardiaque, état de choc, arrêt cardio-circulatoire, ou localisé au territoire irrigué par une artère obstruée du fait d’un spasme, d’une embolie ou d’une thrombose.

• Enfin, l’anoxie histotoxique (des cyanures, par exemple) est discutable, dans la mesure où la cellule dispose en réalité d’un apport en oxygène suffisant, mais est en fait incapable de l’utiliser.


Conséquences de l’anoxie

Une partie essentielle des phénomènes de la vie implique l’aérobiose, c’est-à-dire la présence d’oxygène ; cependant toute anoxie prolongée mais modérée peut n’entraîner qu’une souffrance cellulaire totalement ou partiellement réversible. Point important, les cellules les plus fragiles à l’égard de l’anoxie sont celles qui forment le tissu nerveux et, à un moindre degré, le muscle cardiaque.

L’anoxie a pour traduction clinique majeure le coma et l’arrêt cardiaque. Hormis conditions particulières (hypothermie, par exemple), le coma n’est réversible que si l’anoxie est supprimée dans les deux ou trois minutes qui suivent son installation, et à la condition que soit maintenue — ou rétablie (massage cardiaque par exemple) — une circulation sanguine suffisante. L’anoxie cérébrale peut être incomplètement réversible et laisser des séquelles. Au maximum, il s’agit de l’état dit « de coma* dépassé ».

L’expression clinique d’une hypoxie modérée est d’une analyse souvent difficile : la cyanose* est un signe classique, mais qui dépend moins de l’hypoxie en tant que telle que de la quantité d’hémoglobine non saturée ; les troubles de conscience dépendent de l’hypoxie, mais aussi de l’hypercapnie (augmentation de la pression partielle de CO2 [p CO2]).

J. É.

 J. Gay-Dubié, l’Anoxie. Aspects physiopathologiques, ses incidences en anesthésie (thèse, Toulouse, 1954). / P. L. Thévenin, l’Anoxie néo-natale (thèse, Paris, 1959). / J.-P. Vaillant, Hémorragies cérébro-méningées et anoxie néo-natale (thèse, Toulouse, 1963). / P. Oudéa, l’Anoxie hépatique (thèse, Paris, 1964).