Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

Le Nôtre (André)

Architecte et dessinateur français de jardins (Paris 1613 - id. 1700).


Il a attaché son nom à ce qui forme l’accompagnement de toute demeure classique : le jardin* à la française. Sans être l’auteur de tous les parcs qui lui sont attribués, il en a bien dessiné ou remodelé une centaine. Leur influence s’est étendue à toute l’Europe, à l’exception, curieusement, des deux pays où Le Nôtre fut appelé (Angleterre, 1662 ; Italie, 1679).

Sa position parmi les créateurs du classicisme*, Le Nôtre la doit à son milieu familial (tous ses proches, son père, son aïeul, étaient jardiniers du roi), mais plus encore à une formation pluridisciplinaire. Il fut élève du peintre Simon Vouet* avant de se tourner, à vingt-deux ans, vers l’architecture (il a certainement travaillé chez François Mansart*) ; les richesses de sa bibliothèque et de ses collections témoignent de l’éclectisme de sa curiosité.

Dès l’époque où il succède à son père aux Tuileries, en 1637, il est en rapport avec Le Vau* ; les deux hommes se retrouvent avec Le Brun* au Raincy (1640-1648), puis à Vaux-le-Vicomte*, où le gros œuvre débute en 1656 et la décoration deux ans plus tard. La nouveauté, ici, réside dans une composition magistralement équilibrée, hiérarchisée dans toutes ses parties : le grand salon du château forme le point focal d’une composition axée, subdivisée pour produire un balancement des éléments selon une logique toute cartésienne.

Le Nôtre applique à Versailles* les mêmes principes, avec une souplesse qui permettra une adaptation constante. Les travaux commencent en 1661 ; les « spectacles mouvants » (jeux d’eau associés à des représentations théâtrales) sont réalisés après les fêtes de 1664 ; les premiers grands jets d’eau sont établis en 1666, suivis du grand canal et des parterres d’eau. Sans doute, Perrault*, Le Brun, Hardouin-Mansart participent-ils à l’élaboration de cette scénographie ; mais Le Nôtre s’occupe aussi d’architecture construite, aux « cents marches » et à l’orangerie, avec une sobriété que n’auront pas ses successeurs.

Un esprit baroque anime ce jardinier soumis aux règles classiques. À Chantilly, à la date des premiers travaux de Versailles, Le Nôtre ordonne ses parterres d’eau sur la statue du connétable de Montmorency et non sur le château. Pour réaliser ce qu’on nomme le grand dessein, il trace entre les Tuileries, dégagées et encadrées par ses soins, et la grande terrasse de Saint-Germain-en-Laye, qu’il établit à partir de 1669, une percée ponctuée d’avenues rayonnantes (rond-point des Champs-Élysées, Étoile) qui témoigne de l’ampleur des conceptions spatiales du Grand Siècle (aujourd’hui bloquées à la Défense, après trois siècles d’efforts).

Tour à tour architecte et peintre, Le Nôtre utilise dans toute son œuvre (à Fontainebleau, à Saint-Cloud, à Sceaux, à Meudon..., à Trianon même, où il se renouvelle en dépit de son grand âge) les ressources de la géométrie, de la perspective, voire de la physique par la féerie des eaux mouvantes ou mortes ; artiste total, il s’y révèle surtout comme un magicien de la lumière.

H. P.

 L. Corpechot, Parcs et jardins de France (les jardins de l’intelligence) [Émile-Paul, 1912 ; 2e éd., Plon, 1937]. / E. de Ganay, André Le Nostre (Vincent et Fréal, 1962). / H. M. Fox, André Le Nôtre, Garden Architect to Kings (Londres, 1963).

Lens

Ch.-l. d’arrond. du Pas-de-Calais ; 40 281 hab. (Lensois).


L’agglomération regroupe 329 000 habitants, incluant notamment les grosses cités de Liévin, d’Hénin-Beaumont, d’Avion..., mais la notion d’agglomération est discutable dans un bassin houiller où le tissu urbain est constitué de noyaux multiples, mal hiérarchisés. Elle correspond en réalité à la moitié orientale de l’ouest du bassin, partie qui possède naturellement aussi des problèmes de conversion, mais avec des caractères spécifiques.

La ville a été le théâtre de nombreuses batailles (ce qui explique l’absence de centre historique, remplacé par de grandes rues commerçantes et animées, des bâtiments modernes [l’hôtel de ville date de 1965], cependant qu’à la périphérie se dispersent plusieurs cités minières). Elle le doit à son site et à sa situation, seuil entre les pays bas du Nord et le Bassin parisien, ouvert entre les hauteurs de l’Artois, à l’ouest et au sud-ouest, et les marais de la Deûle, à l’est.

L’industrie emploie près des deux tiers des actifs. Elle doit son importance à l’extraction houillère, qui débuta après 1850 et provoqua une véritable explosion urbaine. De 1851 à 1911, les populations de Lens et de Liévin firent plus que décupler. Aujourd’hui, grâce à la prépondérance des charbons gras, la partie lensoise du bassin est le principal secteur carbochimique. La cokerie de Mazingarbe a permis ici la synthèse de l’ammoniac, la production d’engrais, plus récemment celle d’eau lourde. À Drocourt prédomine le traitement des benzols. À Vendin-le-Vieil sont traités les goudrons et sont produits les résines, les plastiques et les vernis. À Harnes sont fabriqués les alcools lourds, les plastifiants et les détergents. Le groupe de Lens doit être le dernier en service dans le Nord-Pas-de-Calais, mais l’exploitation doit tout de même cesser au début des années 1980.

Les hydrocarbures prennent, mais lentement, le relais du charbon dans le domaine chimique, et les houillères s’orientent vers d’autres activités : fabrication de briques de schistes à Hulluch, aménagement et vente de terrains. La récession houillère s’accompagne d’une stagnation démographique, et le solde migratoire est négatif. La reconversion est devenue une nécessité urgente.

L’agglomération de Lens est aussi un centre important pour la production de métaux. Le zinc et le plomb sont traités à l’est à Noyelles-Godault par la Peñarroya ; avec Auby, proche, la région produit le plomb français et la moitié du zinc. Outre la chaudronnerie et la construction métallique, Lens est un centre important pour la tréfilerie.

La reconversion s’opère d’abord par un renforcement des axes de circulation. Déjà nœud ferroviaire important atteint par un canal au gabarit de 600 t, la ville doit être encadrée par quatre voies autoroutières. À l’est, l’autoroute Paris-Lille et, au nord, la rocade minière sont en service. En 1971 a été ouverte la voie rapide Lens-Douvrin.