Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

Lapin (suite)

L’alimentation traditionnelle est à base de fourrages, de légumes et de sous-produits de la ferme : elle ne pose guère de problèmes, mais ne permet pas des rythmes de production et des croissances élevés. L’alimentation rationnelle fait appel aux céréales, en particulier à l’avoine, au son (pour l’apport énergétique), aux tourteaux, à la farine de luzerne déshydratée pour l’apport azoté, un taux de 15 à 17 p. 100 de protéine étant recherché. La cellulose, souvent consommée en grande quantité avec les fourrages, est peu digérée et peut être réduite, en alimentation intensive, jusqu’au taux de 10 à 13 p. 100 (cellulose brute) pour les mères allaitantes, mais elle demeure un lest indispensable pour un bon travail mécanique du tube digestif.

La physiologie digestive du Lapin est dominée par le phénomène de coprophagie, ou cæcotrophie : les aliments séjournent plusieurs heures dans le cæcum et donnent des chapelets de crottes molles ingérées par l’animal, qui les prélève à leur sortie de l’anus ; une seconde digestion, fort différente de la première, donne des crottes dures, éliminées sous forme d’excréments. Comme pour les Ruminants, mais à un moindre degré, ce processus contribue à l’enrichissement de l’alimentation en acides aminés et en vitamines du groupe B, mais il est très inégal, ce qui explique la définition imprécise des besoins alimentaires.

L’industrie offre des aliments complets en granulés durs de 2,5 à 5 mm de diamètre ; certains fabricants proposent des formules adaptées aux besoins, qui varient de la mère au jeune sevré ou en cours d’engraissement ; d’autres préconisent une formule moyenne qui a le mérite de la simplicité, facilitant le travail et évitant les conséquences d’erreurs toujours graves chez un animal très sensible à tous les écarts alimentaires et à tous les dérangements. L’aliment est le plus souvent donné à volonté, les mères ayant en plus à leur disposition de la paille en libre service. Cette alimentation concentrée requiert bien sûr un abreuvement continu en complément. Les généticiens et les sélectionneurs poursuivent, à partir des races traditionnelles (néo-zélandais, fauve de Bourgogne, petit russe, etc.), un travail d’amélioration des aptitudes maternelles des lapines et des caractères de croissance et d’engraissement ainsi que des qualités de boucherie ; comme pour d’autres espèces animales apparaissent sur le marché des souches spécialisées utilisées en croisement.

La pathologie du Lapin, très déroutante, est dominée par les troubles digestifs (coccidiose chez les lapereaux de 4 à 8 semaines, entérites des jeunes non sevrés, entérotoxémie des adultes), par les accidents respiratoires (coryza contagieux), par les accidents de la reproduction (infécondité, avortement, mortinatalité, destruction des jeunes au nid). Les soins curatifs se révèlent très aléatoires, et tout réside dans une bonne organisation de l’élevage, un bon contrôle de l’environnement et une hygiène parfaite.

Que le consommateur sache que la viande du Lapin, dont la richesse, supérieure à celle du porc et du bœuf, se rapproche de celle de la volaille, est une des plus saines que l’on puisse trouver et que, même, les lésions hépatiques de coccidiose ne présentent aucun danger.

J. B.

➙ Rongeurs.

 H. Sabatier, le Lapin et son élevage professionnel (Dunod, 1971). / P. Surdeau et R. Hénaff, la Production du lapin (Baillière, 1976).

Laplace (Pierre Simon, marquis de)

Astronome, mathématicien et physicien français (Beaumont-en-Auge, Normandie, 1749 - Paris 1827).


Fils d’un cultivateur, il suit les cours du collège bénédictin de sa ville natale, puis vient à Paris, où, grâce à l’appui de Jean Le Rond d’Alembert*, il est nommé à vingt ans professeur de mathématiques à l’École royale militaire. Il publie alors un grand nombre de mémoires scientifiques. En 1784, il succède à Étienne Bézout (1730-1783) comme examinateur du corps de l’artillerie et interroge le jeune Napoléon Bonaparte, auquel il ouvre la carrière militaire. La Convention le désigne comme l’un des membres de la Commission des poids et mesures qui devait créer le système métrique, mais le décret du 2 nivôse an II considère Laplace, Charles de Borda (1733-1799), Charles de Coulomb* et Lavoisier* « insuffisamment dignes de confiance pour leurs vertus républicaines et leur haine pour les rois », et Laplace se retire à Melun sans être inquiété. Rallié au Consulat dès le 18 brumaire, il est désigné par Bonaparte comme ministre de l’Intérieur ; mais, peu fait pour la politique, il doit céder la place à Lucien Bonaparte. Entré en 1799 au Sénat, dont il devient le vice-président en 1803, comblé d’honneur par Napoléon, qui le fait comte de l’Empire en 1806, il vote cependant en 1814 la déchéance de l’Empereur et se rallie à Louis XVIII, qui le fait marquis et pair de France. À partir de 1806, il prend l’habitude de réunir dans sa propriété d’Arcueil plusieurs jeunes savants, parmi lesquels le comte Claude Berthollet*, Jean Antoine Chaptal (1756-1832), Louis Jacques Thenard (1777-1857), Louis Joseph Gay-Lussac*, Pierre Louis Dulong (1785-1838), constituant ainsi la célèbre société d’Arcueil, d’où sortirent trois volumes de mémoires contenant d’importants travaux de physique mathématique. Les recherches de Laplace se rapportent surtout à la mécanique céleste et au calcul des probabilités. Son Exposition du système du monde (1796) contient sa célèbre hypothèse cosmogonique selon laquelle le système solaire proviendrait d’une nébuleuse primitive entourant comme d’une atmosphère un noyau fortement condensé et à température très élevée, et tournant d’une seule pièce autour d’un axe passant par son centre. Le refroidissement des couches extérieures, joint à la rotation de l’ensemble, aurait engendré dans le plan équatorial de la nébuleuse des anneaux successifs qui auraient donné les planètes et leurs satellites, tandis que le noyau central aurait formé le Soleil. Par condensation en un de ses points, la matière de chacun de ces anneaux aurait donné naissance à une planète qui, par le même processus, aurait engendré à son tour des satellites : l’anneau de Saturne serait un exemple de cette phase intermédiaire. Cette hypothèse, qui connut une fortune extraordinaire, se heurte cependant à de fort nombreuses objections. La Mécanique céleste (1798-1825) de Laplace réunit en un seul corps de doctrine homogène tous les travaux jusque-là épars d’Isaac Newton, d’Edmund Halley (1656-1742), d’Alexis Clairaut (1713-1765), de d’Alembert et de Leonhard Euler* sur les conséquences du principe de la gravitation universelle. Dans le domaine du calcul des probabilités, la Théorie analytique des probabilités (1812) est tout autant remarquable. L’introduction de la seconde édition, parue en 1814, expose, sous le titre d’Essai philosophique sur le fondement des probabilités, sans aucun appareil mathématique, les principes et les applications de la géométrie du hasard.