Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

lac et limnologie (suite)

La biologie des lacs

Par sa capacité à faire vivre de très nombreux organismes aquatiques et terrestres, l’eau des lacs est une ressource naturelle indispensable à homme, qui doit en apprécier les qualités et la protéger. Celui-ci en a pris conscience il y a fort longtemps en colonisant les rives des lacs (palafittes) et en considérant ces derniers à la fois comme une réserve d’eau de consommation, une source de nourriture variée et un matériau de transformation industrielle (rouissage, hydroclassement de minerais, de métaux, de gemmes, etc.).

Dans l’eau des lacs vivent des Bactéries, des végétaux et des animaux. Presque tous les groupes taxinomiques y sont représentés. Ils se répartissent en groupements différenciés constituant des biocénoses particulières. Parmi celles-ci, le plancton est un des éléments caractéristiques communs aux lacs et à l’océan. Constitué d’organismes pour la plupart microscopiques, végétaux et animaux, larves et adultes, il assure la vie dans la zone pélagique, notamment celle des Poissons. Sur les bords, une frange végétale littorale est souvent entrecoupée de parcours rocheux, sableux ou de vasières où se développe une vie luxuriante et dont un des éléments essentiels est le biotecton, constitué notamment de micro-organismes agglutinés sur les parois et les tiges de plantes aquatiques. (Ce dernier ensemble est souvent appelé le périphyton.)

Le fond des lacs est parfois sableux, mais, le plus souvent, il est recouvert de vases plus ou moins riches en matière organique. La composition de ces vases est en partie fonction de celle des eaux susjacentes. Dans les lacs au fond désoxygéné de façon permanente, seules les Bactéries anaérobies peuvent vivre. Les fonds de ces lacs sont en cours de fossilisation. Dans les autres lacs, les eaux profondes sont périodiquement mêlées à celles de surface, et de nombreux organismes peuvent vivre dans de telles conditions, notamment des Mollusques, des larves d’Insectes et des Crustacés plus ou moins aveugles.

Les lacs évoluent, s’enrichissent en substances nutritives qu’ils accumulent dans leurs eaux sous forme organique et se comblent. Ils passent par des états successifs. Dans les lacs eutrophes aux eaux profondes périodiquement désoxygénées par activité bactérienne, la qualité de la faune change, au détriment de leur possibilité d’utilisation. L’homme peut accélérer cette eutrophisation en déversant inconsidérément des produits de déchets de l’activité humaine. Il y a alors pollution, qui, pour les lacs, est un processus quasi irréversible et qui se traduit par la disparition d’espèces intéressantes, l’apparition en masse d’autres espèces donnant au lac mauvaise couleur, mauvaise odeur et provoquant par leur mort une désoxygénation du milieu (développement de germes pathogènes).

B. D.

J.-R. V.

➙ Aquatique / Courants océaniques / Étang / Fleuve / Hydrologie et hydrographie / Océan / Océanographie / Ondes océaniques.

 A. Delebecque, les Lacs français (Chamerot et Renouard, 1898). / L. W. Collet, les Lacs. Leur mode de formation, leurs eaux, leur destin, éléments d’hydrogéologie (Doin, 1925). / L. Germain et E. Séguy, la Faune des lacs, des étangs et des marais de l’Europe occidentale (Lechevalier, 1925 ; 2e éd., 1957). / G. E. Hutchinson, A Treatise on Limnology (New York, 1957 ; 2 vol.). / V. I. Shadin et S. V. Gerd, Rivières, lacs et réservoirs de l’U. R. S. S., leur faune et leur flore (en russe, Moscou, 1961). / R. Keller, Gewässer und Wasserhaushalt des Festlandes (Leipzig, 1962). / F. Ruttner, Fundamentals of Limnology (Toronto, 1963). / A. Guilcher, Précis d’hydrologie marine et continentale (Masson, 1965). / B. Dussart, Limnologie. L’étude des eaux continentales (Gauthier-Villars, 1966). / R. W. Fairbridge (sous la dir. de), The Encyclopedia of Oceanography (New York, 1966).

Lacan (Jacques)

Psychiatre et psychanalyste français (Paris 1901).


La situation toute particulière de Jacques Lacan dans l’histoire du mouvement psychanalytique mérite examen : psychiatre de formation médicale traditionnelle, psychanalyste de formation freudienne, Lacan est devenu vers 1960, c’est-à-dire à l’époque de son exclusion des sociétés internationales de la psychanalyse officielle, le seul psychanalyste dont l’audience et l’impact débordent largement le champ de la thérapeutique. C’est sous le signe d’un « retour à Freud » qu’il s’est d’abord violemment insurgé contre les conséquences idéologiques de la psychanalyse à l’américaine. Anna Freud, H. Hartmann ont, en effet, posé les prémisses théoriques qui transforment la psychanalyse en pratique de rééducation sociale. Dès lors, dans un « enseignement » continu, essentiellement oral, Lacan a pris position dans le champ anthropologique : affirmant le rôle décisif de la pratique et de la théorie du langage dans la psychanalyse, remaniant Freud à l’aide de la linguistique, de l’ethnologie, mais poursuivant aussi la critique des sciences dites « humaines » et du discours diffusé dans les structures universitaires, il occupe dans le monde intellectuel une place essentielle ; il transforme la théorie freudienne et la rend lisible par des non-analystes, contribuant ainsi à la diffusion la plus authentique de la pensée psychanalytique. Parce qu’il est à peu près le seul à avoir compris l’impact idéologique de Freud en dehors même de la thérapeutique, il a pu, après mai 1962, faire la théorie des discours en général, qu’il divise en quatre types : le discours du maître, le discours de l’hystérique, celui de l’universitaire et celui du psychanalyste. Les deux premiers discours indiquent le rapport entre le pouvoir (celui du maître) et le savoir (l’hystérique, incurable par le savoir médical traditionnel, « c’est le sujet divisé, autrement dit... l’inconscient en exercice, qui met le maître au pied du mur de produire un savoir » [Scilicet 2/3, p. 89]) ; la découverte de Freud, qui s’est faite au travers des troubles hystériques, provoque une mise en cause radicale et du savoir et de tout pouvoir. Universitaire et psychanalyste sont alors, dans leur contemporanéité, dans une position inversée : l’un dépositaire d’un savoir, l’autre dépositaire d’un non-savoir. L’universitaire est celui qui transmet la culture comme savoir ; le psychanalyste est celui qui, « ignorant ce qu’il sait », ne transmet rien, qu’une mise en demeure faite à toute culture : un tel discours est celui que Lacan appelle de la vérité, qui parle par l’inconscient et qui fait de la psychanalyse une science à rebours, dont il s’essaye à fonder les principes. On peut faire tenir le système de Lacan dans la corrélation entre deux énoncés qui lui sont propres : 1o L’Inconscient est le discours de l’Autre ; 2o L’Inconscient est structuré comme un langage.