Homme politique du Kenya (Ichaweri 1891 ou v. 1893).
Né de parents kikuyus, Kamau Wa Ngenri reçoit une éducation traditionnelle, puis chrétienne avant d’entrer dans la vie politique, où il acquiert le surnom de Kenyatta (« javelot flamboyant »). Secrétaire de la Kikuyu Central Association (KCA), créée en 1925 pour protester contre les appropriations de terres par les Européens dans les Highlands, il est membre de la commission Hilton Young, envoyée à ce sujet à Londres. Mais c’est à partir de 1931, début d’un second séjour en Europe, qui durera quinze ans, qu’il complète sa formation intellectuelle et politique. Assistant de l’Institut international africain, diplômé d’ethnologie, il publie en 1937 le fameux Facing Mount Kenya, première description du système social des Kikuyus. Puis il voyage à travers l’Europe et séjourne à Moscou. La Seconde Guerre mondiale lui offre l’occasion d’un engagement plus précis. En 1945, il publie un pamphlet, Kenya, the Land of Conflict, qui marque sa rupture avec la Grande-Bretagne, et il organise le Ve Congrès panafricain à Manchester avec Padmore et Nkrumah. En 1946, il décide de rejoindre le Kenya ; en juin 1947, il préside la Kenya African Union (KAU), et reçoit alors l’appui du leader des Luos, Oginga Odinga. Il s’impose très vite par ses talents d’orateur et de meneur de foules, si bien que les colons demandent sa déportation dès 1948, l’accusent de collusion avec Moscou et lui attribuent la responsabilité des troubles dès 1950.
Le terrorisme mau-mau en 1952 entraîne son arrestation et sa condamnation à sept ans de prison le 8 avril 1953. Peu de temps après, la KAU est dissoute. En 1956, le gouvernement britannique tente de trouver un autre interlocuteur et favorise, par la Constitution Lyttelton, l’entrée des Africains au Conseil législatif. Or, le vainqueur des élections de 1958, le People’s Convention Party de Tom Mboya, lance une campagne en faveur de Kenyatta.
Libéré, mais astreint à résidence surveillée dans le Nord (avr. 1959), Kenyatta est alors élu président de la nouvelle Kenya African National Union (KANU), dont la reconnaissance légale est demandée aux Britanniques. Son succès aux élections de février 1961 oblige ces derniers à l’élargir en avril et à discuter en novembre avec lui, à Londres, des conditions de l’indépendance.
Devenu Premier ministre du Kenya autonome le 1er juin 1963, puis du Kenya indépendant le 12 décembre de la même année, Jomo Kenyatta triompha de l’opposition de la Kenya African Democratic Union (KADU) de Ronald Ngala, fut élu président de la République le 12 décembre 1964, mais dut faire face au développement des tensions tribales attisées par les avantages que tirèrent les Kikuyus de la récupération des terres. En 1966, Oginda rompit avec le président, et, en 1969, l’assassinat de Tom Mboya, un Luo, priva le vieux chef d’un successeur possible.
M. M.
➙ Kenya.
M. Slater, The Trial of Jomo Kenyatta (Londres, 1955). / J. Kenyatta, Facing Mount Kenya (Londres, 1937 ; trad. fr. Au pied du mont Kenya, Maspero, 1960, nouv. éd., 1967). / G. Delf, Jomo Kenyatta (Londres, 1961). / R. Segal, African Profiles (Londres, 1962 ; nouv. éd., 1963).