Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
J

justice (organisation de la) (suite)

La cour d’assises

La cour d’assises est une juridiction départementale, dépourvue de permanence et à caractère hétérogène, qui est chargée de la répression des infractions les plus graves : les crimes.

La cour d’assises siège, en principe, au chef-lieu du département ; dans certains départements, elle siège dans un autre lieu, soit qu’il s’agisse d’une ville dont l’activité commerciale est plus grande, soit qu’il s’agisse d’une survivance historique comme Chalon-sur-Saône, en Saône-et-Loire, au lieu de Mâcon, soit qu’il s’agisse d’un siège accidentel désigné par la cour d’appel, s’il lui paraît convenable. Elle ne se réunit qu’à certaines époques : il est prévu une session tous les trois mois, mais il peut être tenu une ou plusieurs sessions supplémentaires.

La cour d’assises est formée de deux éléments : un élément professionnel, qui est la cour au sens étroit du mot, et un élément populaire, comprenant de simples citoyens qui composent le « jury ». La cour proprement dite comprend trois magistrats du siège, le président ayant au moins le grade de conseiller à la cour d’appel, et deux assesseurs pris parmi les conseillers à la cour d’appel ou les magistrats du tribunal de grande instance du lieu de la tenue des assises. Les fonctions de ministère public sont remplies par un membre du parquet général si la cour siège au chef-lieu de la cour d’appel, par un membre du parquet du tribunal de grande instance ou, exceptionnellement, par un membre du parquet général dans les autres cas. Le greffier est emprunté au greffe de la cour d’appel ou au greffe du tribunal, selon le même principe.

Les débats sont publics, à moins que la publicité soit dangereuse pour l’ordre ou les mœurs, et, dans ce cas, la cour le déclare par un arrêt rendu en audience publique ; ils se déroulent selon un processus analogue à celui qui est pratiqué devant le tribunal de police et le tribunal correctionnel, étant précisé cependant que le président des assises a la police de l’audience et la direction des débats, et qu’il est investi, en outre, du « pouvoir discrétionnaire » en vertu duquel il peut prendre toutes mesures qu’il croit utiles pour découvrir la vérité durant les débats. Le président, lorsque les débats sont clos, donne lecture en public des questions auxquelles la cour et le jury auront à répondre, puis la cour et les jurés se retirent pour délibérer en commun.

L’arrêt est rendu en audience publique. Toutefois, si l’accusé se soustrait à la justice avant que la cour, d’assises ait statué sur son sort, il est recouru à une procédure spéciale dite « par contumace » : lorsque le contumax est arrêté ou se présente volontairement avant que la peine soit éteinte par la prescription, la condamnation tombe de plein droit et il est alors procédé en la forme ordinaire. La seule voie de recours contre les arrêts de la cour d’assises est le pourvoi en cassation, qui doit être interjeté avant l’expiration du délai de cinq jours imparti par la loi.

La cour d’assises a, d’une manière générale, compétence pour juger tous les crimes, hormis toutefois ceux dont le jugement est réservé aux juridictions d’exception : crimes commis par le président de la République ou par les membres du gouvernement, crimes revendiqués par la Cour de sûreté ; crimes imputés à des mineurs de 18 ans, qui ne sont justiciables que des tribunaux pour enfants ou des cours d’assises des mineurs ; crimes relevant des juridictions militaires et maritimes ; il faut ajouter à ces exceptions le cas de correctionnalisation judiciaire, procédé qui transforme des crimes en délits correctionnels (v. crime). En raison de sa « plénitude de juridiction », principe qui procède de l’idée qu’elle est compétente pour juger les infractions les plus graves, la cour d’assises connaît aussi des délits et des contraventions connexes à des crimes ou qui, ayant été pris pour des crimes, lui ont été déférés par erreur : elle est compétente, à l’égard de tous les individus renvoyés devant elle.

La cour d’assises territorialement compétente est celle du département dans lequel l’instruction a été faite : ce peut être celle du lieu de l’infraction, celle de la résidence de l’accusé ou celle du lieu de son arrestation. En cas de crimes commis par des magistrats ou certains hauts fonctionnaires, la chambre criminelle de la Cour de cassation désignera la cour d’assises qui devra en connaître, et il en sera de même en cas de renvoi prononcé après cassation.

Avocats et avoués

La loi française du 31 décembre 1971 « portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques », assortie de nombreux décrets d’application publiés au cours de l’année 1972, réorganise en profondeur les professions d’avocat et d’avoué. La réforme révolutionne radicalement deux très anciennes professions d’auxiliaires de la justice.

Jusqu’alors, les avoués étaient essentiellement cantonnés dans la préparation de la procédure et ne plaidaient pas — sauf exception —, ce rôle étant réservé aux avocats.

Les avoués étaient des officiers ministériels chargés de la représentation des parties devant les différentes juridictions — en fait les tribunaux et les cours d’appel auprès desquels ils étaient établis —, ayant le droit exclusif de postuler et de prendre des conclusions devant ces juridictions, c’est-à-dire de faire tous les actes de procédure et de formuler les prétentions des parties, prétentions sur lesquelles les magistrats devaient statuer. Certaines affaires exigeaient le ministère d’avoué, d’autres ne l’impliquaient pas obligatoirement.

Les avocats avaient essentiellement pour fonction de plaider et d’accorder des consultations. Ils n’étaient pas officiers ministériels et, devant toutes les juridictions de droit commun, avaient le monopole de la plaidoirie. Les avocats — certains d’entre eux au moins —, indépendamment de la défense, par la parole, des intérêts de leurs clients, étaient en réalité, en de nombreuses occasions, devenus des conseils juridiques.