Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
J

Jacobi (Carl Gustav Jacob)

Mathématicien allemand (Potsdam 1804 - Berlin 1851).


Fils d’un banquier, Jacobi a pour maître, jusqu’à l’âge de douze ans, un oncle paternel qui le prépare au gymnase de Potsdam. Assez réfractaire à l’enseignement traditionnel, il étudie directement les œuvres des grands mathématiciens, particulièrement celles de Leonhard Euler* et de Louis de Lagrange*. Inscrit en mai 1821 à l’université de Berlin, il se penche sur la philologie et les mathématiques, auxquelles il se consacre bientôt uniquement. En 1825, il soutient une thèse relative à certaines formules de Lagrange. Privat-docent à Berlin pendant un an environ, il est envoyé à Königsberg par décision ministérielle. Une lecture minutieuse des Exercices de calcul intégral (1816-17) d’Adrien-Marie Le Gendre (1752-1833) lui fait y voir beaucoup plus de choses que ce laborieux auteur n’y avait mises. En 1827, il envoie sur ses découvertes relatives aux fonctions elliptiques deux lettres à l’astronome Heinrich Christian Schumacher (1780-1850), que celui-ci fait paraître dans ses Astronomische Nachrichten. Il écrit en même temps à Le Gendre, qui est enthousiasmé tant par les découvertes de ce jeune émule que par celles, concomitantes, de Niels Henrik Abel*. L’accueil fait par Le Gendre et, à sa suite, par l’Académie des sciences de Paris aux travaux de Jacobi incite le ministre de l’Instruction publique de Prusse à nommer le jeune savant professeur extraordinaire, puis professeur ordinaire à l’université de Königsberg. La correspondance scientifique avec Le Gendre, qui porte surtout sur les fonctions elliptiques, dure jusqu’à la mort du vieil académicien. D’autre part, Jacobi est en contact, à Königsberg, avec l’astronome Friedrich Bessel (1784-1846), qui exerce sur lui une influence bénéfique. La publication des Recherches sur les fonctions elliptiques d’Abel dans le Journal für die reine und angewandte Mathematik, d’August Leopold Crelle (1780-1855), le conduit à accélérer ses propres travaux, et il donne dans le même journal plusieurs essais sur la question. L’ampleur de ses découvertes le conduit à publier en 1829 un traité spécial, Fundamenta nova theoriae functionum ellipticarum, qui impose ses dénominations et ses notations des fonctions nouvelles. Cet ouvrage ne contient que la partie élémentaire de ses recherches sur les fonctions elliptiques, et plusieurs de ses mémoires en sont le complément naturel. Inspiré par le grand théorème d’Abel, dont, le premier, il mesure toute l’importance, Jacobi introduit les fonctions de plusieurs variables, appelées depuis abéliennes. Bon nombre de ses travaux sont consacrés à la transformation des intégrales, à la théorie des équations différentielles, à celle des équations aux dérivées partielles. C’est à ce genre de recherches que se rattachent ses apports au calcul des variations, à la dynamique des solides, à la mécanique céleste : problème des trois corps, perturbations des mouvements des planètes.

L’algèbre doit à Jacobi des recherches sur les formes quadratiques et une exposition, restée longtemps classique, de la théorie des déterminants, qui prélude au mémoire sur les déterminants fonctionnels, ou jacobiens.

Il faut encore signaler les travaux de Jacobi sur les courbes et les surfaces algébriques, la géométrie infinitésimale, la théorie des nombres.

En 1840, sa famille est ruinée. Le gouvernement lui accorde alors une pension, et, comme il est de santé délicate, il obtient en 1843 un congé pour se reposer en Italie. À son retour, il est muté à Berlin, comme académicien (1844), dispensé de tout enseignement régulier, mais autorisé à traiter à l’université tout sujet qui pourrait lui convenir. En 1848, il se compromet dans le mouvement libéral et reçoit l’ordre de rejoindre Königsberg. Il réussit à éviter ce retour, mais perd quelque temps sa pension. L’université de Vienne ayant manifesté le désir de l’accueillir, la Prusse ne veut pas perdre un savant d’une telle envergure, et sa pension est rétablie, mais il n’en profite que peu de temps, emporté par la variole le 18 février 1851. (Acad. des sc., 1846.)

J. I.

Jacobins

Groupement politique sous la Révolution française.


En 1789, les Jacobins sont des « patriotes ». Ils veulent, dans le respect des droits naturels, régénérer la société grâce à des lois librement votées par les représentants du peuple. À la fin de 1794, on leur refuse toute existence légale et bientôt on les accuse d’avoir voulu anéantir la République et de pervertir la Révolution jusqu’à la conduire à l’anarchie. « Société d’inquisition et de partage » pour Michelet, elle est, pour Taine, le lieu de réunion des « notables de l’improbité ». Les historiens contemporains s’accordent pour reconnaître aux Jacobins le mérite insigne d’avoir sauvé, en l’an II, une révolution dont est sortie la France moderne. Qui sont-ils en réalité ?


Les débuts

À l’origine, il y a le besoin éprouvé par quelques députés bretons de reconstituer la petite patrie, dont ils se sont éloignés pour répondre aux mandats de leurs pairs et se rendre aux États généraux dans cette ville de Versailles, où tout les déconcerte. Deux d’entre eux, René Guy Le Chapelier (1754-1794) et Jean Denis Lanjuinais (1753-1827) prennent l’initiative. Au sous-sol du café Amaury, avenue de Saint-Cloud, le club breton est créé. Il rappelle par certains traits ces sociétés de pensée que les notables provinciaux aimaient à fréquenter et où s’élaboraient ou se diffusaient les Lumières. Mais il est bien plus que cela, car Le Chapelier a une autorité qui dépasse le groupe des Bretons. Il est de ceux qui, s’étant fait connaître lors de la campagne pour le doublement du tiers aux États généraux, prennent la tête de la tentative de révolution juridique de la bourgeoisie. Aussi attire-t-il avec d’autres hommes politiques en vue nombre des membres du « parti patriote ». Le duc d’Aiguillon le fréquente et y rencontre Sieyès, Pétion, l’abbé Grégoire, Robespierre, Barnave et les Lameth. Les contemporains assurent qu’ils y préparent l’action politique qui se traduit par les journées du 17 et du 23 juin ou par la nuit du 4 août.