Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

Italie (suite)

La fin de l’unité italienne : Lombards et Byzantins (568-774)

La partition de l’Italie.

• 568 : les Lombards* envahissent l’Italie. Leur roi, Alboïn, conquiert facilement le nord de la péninsule jusqu’à l’Apennin. Puis deux de leurs chefs, Faroald et Zotto, constituent à leur profit respectif les duchés de Spolète et de Bénévent.

• Mais les Lombards ne peuvent se rendre maîtres de tout le pays : le basileus, représenté en Italie par des ducs placés sous l’autorité de l’exarque de Ravenne, conserve une certaine souveraineté sur des territoires situés entre les territoires lombards (Vénétie, Pentapole adriatique, Rome, Naples), une partie de l’ancienne Grande-Grèce et les îles.

L’anarchie.

• Dans l’exarchat de Ravenne*, l’administration s’affaiblit ; dès le viie s., on ne parle plus de Sénat. La caste militaire supplante la bourgeoisie municipale et noyaute un haut fonctionnariat qui se taille, au détriment des paysans, des fiefs ruraux considérables. Querelles religieuses « byzantines » et oppression fiscale favorisent les révoltes.

• Chez les Lombards, le gouvernement tend aussi à se centraliser, la politique à se nationaliser. Mais, païens ou ariens, ils se heurtent à la papauté, qui prétend, dans l’anarchie ambiante, reprendre à son compte le travail d’unification de l’Italie et la défense de Rome. Grégoire Ier († 604) notamment, aidé par la Bavaroise catholique Théodelinde, épouse du roi lombard Authari, étend l’influence pontificale.

• 653-661 : règne d’Aribert Ier, sous lequel les Lombards se convertissent au christianisme. La civilisation byzantine s’infiltre fortement chez eux ; de plus, leurs rois visent, eux aussi, à unifier la péninsule : pour cela, il leur faut contrôler la papauté.

• 751 : le roi lombard Aistolf (ou Astolfe) s’empare sans difficulté de Ravenne : l’exarchat byzantin a vécu. Naples et la Vénétie sont en fait autonomes. Et si la Calabre reste encore un temps à Byzance, la papauté — appuyée sur les Francs — se rend maîtresse de Ravenne et des terres romaines.

• 753-756 : Aistolf ayant réclamé un tribut aux habitants du duché de Rome, le pape Étienne II demande secours à Pépin le Bref en invoquant la fausse Donation de Constantin sur Rome et les provinces latines. Deux campagnes des Francs obligent Aistolf à « rendre » l’exarchat à Pépin, qui en fait don au Pape : ce « patrimoine de Saint-Pierre » va constituer le noyau des États de l’Église.

• 756-774 : Didier, successeur d’Aistolf, garde une attitude agressive à l’égard du pape, Adrien Ier, provoquant l’intervention de Charlemagne.


L’Italie carolingienne (774-962)

Le royaume d’Italie.

• 774 : Charlemagne*, patrice des Romains comme son père, se proclame roi des Lombards et renouvelle la « donation » de Pépin à la papauté.

• 800 : l’emprise de Charlemagne sur Rome et l’Italie se renforce lors de son couronnement comme empereur, à Rome, par le pape Léon III. Fait significatif : Charlemagne attribue à son fils Pépin le titre de « roi d’Italie ».

• En fait, le vaste duché lombard de Bénévent est indépendant, et les Byzantins s’accrochent à la Calabre, l’Apulie et surtout Venise*, autonome sous la souveraineté byzantine et qui, dès le ixe s., compte une aristocratie marchande vouée à un brillant avenir.

• Dans le royaume d’Italie, les influences orientales sont plus fortes que celles des Francs ; les ports italiens commercent avec l’Empire byzantin et aussi avec les musulmans. Les produits du Maghreb et de l’Orient — tissus et épices — transitent par Milan et Ferrare vers la France et l’Occident. Ce commerce actif explique la persistance dans la péninsule d’une vie urbaine intense, du maintien, plus qu’ailleurs, de la culture antique et de l’essor — grâce à des écrivains comme Pierre de Pise, Paul Diacre, Paulin d’Aquilée — de la « Renaissance carolingienne ».

Invasions et anarchie.

• ixe s. : ravage du pays par les Normands et surtout par les Sarrasins, qui amorcent la conquête de la Sicile (827), occupent Bari (840) et pillent Rome (846).

• 843-855 : après le partage de l’empire de Charlemagne, l’Italie fait partie de l’État de Lothaire Ier.

• 855-875 : un nouveau partage la donne à Louis II, fils de Lothaire, qui, roi d’Italie, garde le titre impérial. Tout son règne se passe à lutter contre les Sarrasins et contre les grands vassaux — notamment les marquis de Toscane, de Frioul, de Spolète, d’Ivrée — qui vont se disputer la couronne de fer.

• À Rome, le pouvoir pontifical est en fait contrôlé par l’aristocratie locale et par celle de Spolète, qui font et défont les papes.

• Pour se défendre et défendre l’Italie, les souverains pontifes s’efforcent de reconstituer un véritable empire d’Occident. Charles II* le Chauve (875-877) et Charles III* le Gros (881-887) ne font que passer, et l’Italie ne les intéresse guère.

• L’Italie vit en pleine anarchie ; tandis que la couronne d’Italie et le titre impérial qui l’accompagne sont disputés par l’aristocratie, le sud de la péninsule — duché de Bénévent — se morcelle en principautés rivales qui n’hésitent pas à s’allier aux Sarrasins. Quant aux Byzantins, s’ils perdent la Sicile, ils gardent de solides appuis à l’extrémité de la péninsule.


L’Italie impériale (xie-xiie s.)

La restauration de l’empire.

• 951 : Otton Ier*, roi de Germanie, appelé par le pape Jean XII, se débarrasse de Bérenger II, marquis d’Ivrée, maître de l’Italie, et reçoit la couronne de fer à Pavie.

• 962 (2 févr.) : Jean XII, à Rome, couronne empereur Otton Ier. Ainsi naît le Saint* Empire romain germanique, qui unit le sort de l’Italie à celui des rois de Germanie.

La mainmise d’Otton Ier sur l’Italie.

• Tout de suite, l’Empire restauré fait peser sur l’Église romaine une lourde hypothèque ; car, par une espèce de concordat passé entre Otton Ier et Jean XII (Privilegium ottonianum), l’empereur, tout en confirmant les droits du pape sur les territoires romains a établi un contrôle strict de l’administration pontificale.

• Otton Ier fait et défait les papes ; il confie des charges séculières (comtés) à des évêques, qui dépendent donc entièrement de la puissance temporelle.

Un siècle d’anarchie (973-1073).

• 973-983 : Otton II, protecteur du pape Benoît VII (974-983), encourage celui-ci dans ses efforts pour la réforme de l’Église.

• 983-1002 : avec Otton III — couronné empereur à Rome en 996 — et Sylvestre II (pape de 999 à 1003), l’idée d’Empire vraiment chrétien et romain reprend vie.

• 1002-1049 : la mort de Sylvestre II (1003) et d’Otton III (1002) précipite de nouveau Rome et l’Italie dans l’anarchie. Les familles romaines disposent de la couronne pontificale. Quant aux empereurs, ils doivent constamment lutter pour le maintien de leurs droits en Italie.

• 1049 : un premier coup d’arrêt est donné à la toute-puissance impériale lors de l’arrivée au trône pontifical d’un pape réformateur, Léon IX (1049-1054).

La querelle des investitures* (1073-1122).

• 1073-1085 : lutte entre Henri IV et Grégoire VII*. Après Canossa (1077), Henri IV reprend la guerre contre le pape. Excommunié, il fait élire un antipape, Clément III (1080), et s’empare de Rome (1084), d’où Grégoire VII peut s’enfuir grâce à l’intervention de son vassal, Robert Guiscard, maître, depuis 1059, de la Pouille et de la Calabre.

• Urbain II (pape de 1088 à 1099) dresse contre Henri IV ses fils Conrad, couronné roi d’Italie en 1093, et Henri. Pascal II contraint l’empereur à abdiquer (1105) et couronne son fils Henri V (1106).