Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Andalousie (suite)

Du xviie siècle à nos jours

En 1641 se produit la « conspiration d’Andalousie », soulèvement de nobles qui profitent du mécontentement général de la nation pour essayer de faire triompher des idées séparatistes : il s’agit de faire de l’Andalousie un royaume indépendant gouverné par Gaspar Alonso Pérez de Guzmán († 1664), duc de Medinasidonia. Le complot échoue.

À la fin du xviiie s., le Péruvien Pablo de Olavide y Jáuregui (1725-1803) essaie vainement d’installer en Andalousie six mille colons d’origine allemande et flamande.

Pendant la guerre d’Indépendance, l’Andalousie est l’un des centres de résistance les plus acharnés aux Français, aussi bien au point de vue militaire, comme le prouve la bataille de Bailén (1808), qu’au point de vue politique, comme le montrent les « Cortes de Cadix » (1810). C’est Cánovas del Castillo (1828-1899), originaire de Málaga, qui rédige le célèbre « manifeste de Manzanares », qui débouche sur la restauration, en vue de l’établissement d’une monarchie moderne. L’un de ses camarades d’université, Emilio Castelar (1832-1899), né à Cadix, est de tendance politique plus libérale, ce qui l’amène à prendre part au mouvement révolutionnaire de 1866. Il doit s’exiler à Paris ; à son retour, il s’oppose à la candidature d’Amédée de Savoie au trône d’Espagne. Castelar est l’un des fondateurs de la Ire République (11 févr. 1873). On lui doit l’abolition de l’esclavage à Porto Rico et des ordres militaires traditionnels d’Alcántara, de Santiago, de Calatrava et de Montesa. Mais la dégradation sociale fait échouer sa politique de réformes.

La différence existant entre la classe possédante et le peuple, misérable, fait naître en Andalousie un brigandage endémique, essentiellement dans les zones les plus déshéritées de la sierra Morena.

Vers 1870 apparaissent en Andalousie les premiers groupes anarchistes. En deux ans, ce mouvement prend beaucoup d’ampleur.

Au xxe s., l’Andalousie connaît toute une série de réformes d’ordre social et économique. Les paysans anarchistes les jugent insuffisantes et, sous la dictature de Primo de Rivera, pourtant un Andalou, se soulèvent près de Cadix. Jusqu’en 1936, l’Andalousie constituera l’un des deux grands foyers anarchistes de l’Espagne, l’autre étant la Catalogne.

En 1932, les travailleurs répondent au « pronunciamiento » de Sanjurjo, favorable à la monarchie, par une grève générale. Pendant la guerre civile, de sanglants conflits se produisent dans les quartiers ouvriers de Séville et de Grenade. Malgré de considérables efforts d’industrialisation, tous les problèmes sont loin d’être résolus : l’émigration vers les autres provinces et vers l’Europe persiste.

Le génie andalou se manifeste à l’époque contemporaine dans la littérature (Antonio Machado, Juan Ramón Jiménez, Federico García Lorca, Rafael Alberti, Luis Cernuda, Manuel Altolaguirre, Emilio Prados et Vicente Aleixandre), dans la peinture (P. Picasso) et dans la musique (Manuel de Falla).

R. G.-P.

➙ Almohades / Almoravides / Cordoue / Espagne / Grenade / Reconquista / Séville.

 J. Guichot, Historia general de Andalucía (Madrid, 1869-1871). / J. Ortega y Gasset, Teoría de Andalucía (Madrid, 1942). / E. Lévi-Provençal, Histoire de l’Espagne musulmane (G. P. Maisonneuve, 1947-1953 ; 3 vol.). / J. Sermet, Espagne du Sud (Arthaud, 1953).

Andersen (Hans Christian)

Écrivain danois (Odense 1805 - Copenhague 1875).


La vie de Hans Christian Andersen paraît sortir d’un conte et sa propre expérience forme l’un des éléments fondamentaux de son œuvre.

Hans Christian connut une jeunesse misérable mais libre. Il courait les champs le jour et écoutait le soir les récits fantastiques que lui lisait son père, pauvre cordonnier et libre penseur exalté qui s’engagera dans les armées napoléoniennes. La mort de ce père et le remariage de sa mère donnèrent une nouvelle orientation à sa vie. Âgé de quatorze ans, sachant tout juste lire et écrire, Andersen part pour Copenhague, décidé à conquérir la célébrité au théâtre. Silhouette pittoresque, il déconcerte les directeurs de théâtre, abasourdis par ses déclamations grandiloquentes. Andersen est engagé comme choriste, mais sa voix mue et il perd sa place. Il écrit cependant des tragédies, qu’il présente sans tarder au directeur d’un théâtre, Jonas Collin. Celui-ci refuse ses manuscrits, mais, pressentant des dons exceptionnels chez cet adolescent opiniâtre, obtient pour lui une pension et l’admission à l’école latine de Slagelse. Andersen s’obstinera cependant toute sa vie à trouver le succès au théâtre, soit sous son nom (la Mulâtresse, 1839), soit sous des pseudonymes ou dans l’anonymat pour désarmer une critique malveillante (Le roi rêve, 1840 ; la Nouvelle Chambre de l’accouchée, 1840).

Des trois années passées à Slagelse, Andersen gardera un souvenir pénible : surmené par un intense travail de rattrapage, il doit, en outre, subir l’ironie du recteur et les railleries que sa gaucherie inspire à ses condisciples. C’est là, cependant, qu’il écrit son premier chef-d’œuvre, l’Enfant mourant (1827). Devenu bachelier, il publie à ses frais un poème en prose d’inspiration fantastique, Voyage à pied du canal de Holmen à la pointe orientale d’Amager (1829), puis s’inscrit à l’université, où il passe ses examens de théologie et de philosophie. En 1830, une bourse de voyage lui ouvre les chemins de l’Europe. Andersen parcourt l’Allemagne et la Suisse. Désormais, dès qu’il souffrira trop de l’incompréhension de la critique ou d’un amour déçu, il repartira. C’est en Italie surtout que sa nature sensible s’épanouit. Chaque grande ville lui réserve un choc artistique, chaque étape est la clé d’un ouvrage (l’Improvisateur, 1835) ou l’occasion d’un souvenir (le Livre d’images sans images, 1840 ; le Bazar d’un poète, 1842 ; En Suède, 1851). Si ses romans sont toujours marqués au coin de la poésie, Andersen ne se sent vraiment à l’aise que dans les récits de moindre étendue, les contes. Très vite, il modifie le titre de son premier recueil (Contes racontés aux enfants, 1835) en Contes et histoires. Le fantastique qu’il fait jaillir de la réalité la plus quotidienne appartient à tous. S’il réveille le peuple féerique des vieilles légendes (la Reine des neiges, le Petit Elfe Ferme-l’Œil, la Petite Sirène), son imagination anime les moindres objets (la Bergère et le ramoneur) et transfigure les aventures les plus amères : l’Intrépide Soldat de plomb, gisant dans le ruisseau, lui rappelle sa passion malheureuse pour la cantatrice Jenny Lind ; le Vilain Petit Canard qui se mue en cygne majestueux est une parabole autobiographique. Au plaisir limpide de l’enfance, les contes ajoutent à l’intention des adultes une leçon d’ironie (les Habits de l’empereur) et la déploration discrète de la mort (l’Ombre, le Compagnon de voyage, la Petite Marchande d’allumettes). En fondant sa poésie et sa philosophie sur la pitié, en donnant la victoire, dans le combat de la vie, aux humbles et aux patients, Andersen a atteint l’esprit de l’homme et le cœur de l’enfant. C’est à cela qu’il doit — par-delà les honneurs officiels, les amitiés royales, les statues élevées de son vivant et les décorations qui firent de sa vie, selon son propre aveu, « un beau conte, riche et heureux » — l’immortalité.

S. C.

➙ Conte / Folklore et littérature / Scandinaves (littératures).

 P. V. Rubow, H. C. Andersens Eventyr (Copenhague, 1927). / Publié par Det Berlinske Bogtrykkeri à l’occasion du 150e anniversaire de l’auteur, Un livre sur le poète Hans Christian Andersen. Sa vie, son œuvre (Copenhague, 1955). / E. Nilsen, H. C. Andersen (Copenhague, 1963).