Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

interférences (suite)

Franges d’égale épaisseur

Considérons le dispositif appelé coin d’air, constitué par deux lames à faces parallèles faisant entre elles un angle petit α (fig 3). Le rayon incident SI est partiellement réfléchi (par la lame L1 en I) ; le rayon transmis IJ se réfléchit sur la lame L2 en J. Ces deux rayons réfléchis se coupent virtuellement au point M, et les vibrations qui se propagent suivant ces rayons interfèrent, car elles sont issues d’un même point de la source. On conçoit, puisque l’on impose une condition aux deux rayons qui vont se couper en M, à savoir de provenir du même rayon incident, que ce phénomène ne sera pas observable dans tout l’espace, mais dans un domaine plus restreint. En effet, l’expérience réalisée avec une source large montre que les franges sont localisées au voisinage des lames elles-mêmes et semblent être imprimées dessus. Le calcul montre que la différence de chemin optique des vibrations qui interfèrent en M est égale à

e représente l’épaisseur de la lame en I (l’angle α étant très petit, les épaisseurs en I et J sont très voisines), et i l’angle d’incidence.

Si entre les deux lames on plaçait un liquide d’indice n, la différence de marche deviendrait

r représente l’angle de réfraction correspondant à l’incidence i. On voit que, dans ce type d’interférences, les franges brillantes par exemple, c’est-à-dire telles que δ = Kλ, correspondent aux lignes d’égale épaisseur du coin. Ce type d’interférences peut s’observer avec le dispositif des anneaux de Newton, qui comporte, comme l’indique la figure 4, une lentille plan-convexe dont la surface sphérique, ayant un grand rayon R, est posée sur une surface de verre plane. Ce dispositif permet d’observer les franges d’égale épaisseur de la lame d’air comprise entre la surface sphérique et la surface plane. Les franges seront donc circulaires, le rayon des anneaux noirs étant égal à (K nombre entier positif).


Franges d’égale inclinaison

Considérons une lame à faces parallèles d’épaisseur e et d’indice n (fig 5). Un rayon incident provenant d’une source étendue quasi monochromatique donne naissance à plusieurs rayons réfléchis et à plusieurs rayons transmis. Ces rayons réfléchis et transmis sont parallèles et provoquent donc un phénomène d’interférences localisé à l’infini. Si l’on prend l’amplitude du rayon incident égal à 1, l’amplitude des rayons réfléchis successivement par un verre d’indice n = 1,5 sera de 0,20 pour le premier, 0,19 pour le second, 0,008 pour le troisième ; de même pour les rayons transmis, elle sera respectivement de 0,96, 0,038 et 0,001.

On voit donc que, en réflexion comme en transmission, l’amplitude du troisième rayon est négligeable par rapport à l’amplitude des deux premiers, si bien que les interférences observées seront, comme dans les cas précédents, des interférences à deux ondes. D’autre part, le contraste des franges sera beaucoup plus grand dans le cas de la réflexion, car les vibrations qui interfèrent ont pratiquement la même amplitude. Dans ce cas, la différence de chemin optique des vibrations qui interfèrent (fig. 6) est égale à

qui peut s’expliciter sous la forme

Si l’on considère un rayon incident S′I′ parallèle à SI, mais issu d’un autre point de la source, ce rayon donnera naissance à deux rayons réfléchis et parallèles à R1 et R2. Ces rayons se coupent au même point à l’infini, et la différence de chemin optique des vibrations qui se propagent suivant et sera également

ces vibrations provoqueront donc le même état d’interférence que celles qui sont émises par S. La source pourra donc être aussi étendue que l’on voudra. Les franges d’interférences sombres par exemple seront telles que

soit 2 ne cos r = Kλ ; en tout point d’une frange, K est constant, donc cos r doit être constant ; il en résulte que les franges seront circulaires, leur centre étant obtenu pour i = 0. La figure 7 montre le schéma de principe d’un montage expérimental permettant l’observation par réflexion des franges d’égale inclinaison d’une lame à faces parallèles.

L’interféromètre* de Michelson permet d’obtenir également des franges d’égale inclinaison, de même qu’il permet l’obtention des franges d’égale épaisseur.


Interférence à ondes multiples

Nous avons vu, ci-dessus, dans l’étude des franges d’égale inclinaison par transmission que les deux premiers rayons transmis avaient une amplitude très différente et qu’à partir du troisième rayon l’amplitude devenait négligeable. Il en est tout autrement si l’on traite chaque face de la lame de façon que le facteur de réflexion soit très grand. En effet, soit r le coefficient de réflexion en amplitude et t le coefficient de transmission de chaque face. Les rayons successivement transmis (fig. 8) auront une amplitude t2, r2t2, r4t2, etc., r2pt2 pour le p-ième. Les différences de chemins optiques des vibrations transportées par le 2e, 3e, etc., p-ième rayon par rapport aux vibrations transportées par le premier seront
δ = 2 ne cos r     4 ne cos r...     2 p ne cos r.

Ces différentes vibrations provenant d’un même point source sont cohérentes entre elles et peuvent interférer à l’infini. L’amplitude résultante à l’infini sera donc égale à la somme des amplitudes de ce grand nombre de vibrations qui ont pris naissance par réflexion multiple. Cette amplitude résultante pourra donc s’écrire

On voit que, si δ = Kλ (K nombre entier),

quel que soit p. D’où A(t) = at2 cos 2πνt [1 + r2 + ... + r2p + ...] ; l’expression entre crochets est une progression géométrique de raison r2 ; d’où

L’éclairement au point où δ = Kλ est donc égal à

Remarquons que r2 = R et t2 = T représentent les facteurs de réflexion et de transmission énergétique de la lame (rapport entre l’énergie réfléchie ou transmise à l’énergie incidente). Si l’absorption des couches déposées sur les faces de la lame est faible, c’est-à-dire si R + T est voisin de 1, E sera très voisin de E0.

Si maintenant δ est différent de Kλ et R est très voisin de l’unité, la somme figurant dans A(t), dans la mesure où le nombre de termes est infini, comporte autant de termes positifs et négatifs de même valeur, si bien que cette somme est nulle.

On aura donc dans ce type d’interférences, comme dans le cas où les faces ne sont pas traitées, des franges en forme d’anneau ; mais ces franges seront très fines du fait que, pratiquement, c’est seulement dans le cas où δ = Kλ que l’éclairement sera différent de zéro.

Un calcul rigoureux de l’éclairement conduirait à la formule d’Airy

C’est sur ce principe que repose l’interféromètre* de Fabry et Pérot, dont les propriétés en tant que spectromètre* sont d’une très grande importance.

G. F.

 M. Françon, les Interférences lumineuses et leurs applications (C. D. U., 1961).