Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
H

Hongkong (suite)

L’année 1949 fut décisive pour Hongkong : la plupart des capitaux chinois, ceux de Shanghai notamment, s’y réfugièrent et aussi des techniciens, ingénieurs shanghaiens, qui jouèrent un rôle économique décisif. Par la suite arrivèrent massivement des réfugiés pauvres, fournissant une main-d’œuvre très bon marché. L’industrialisation de Hongkong en résulta. Vinrent ensuite des capitaux chinois de l’Asie du Sud-Est (de Saigon-Cho-Lon par exemple), puis, à partir de 1965 environ, des capitaux japonais et américains (voulant profiter du bon marché de la main-d’œuvre). De là ont résulté des modifications économiques considérables.

La base navale a perdu beaucoup de son importance ; cependant, Hongkong sert de point de relâche à la VIIe flotte américaine. Le port a une importance accrue, mais ses relations avec la Chine ont beaucoup diminué, avec l’embargo, depuis 1951, sur les « marchandises stratégiques » à destination de la Chine. Par contre, la Chine fournit, par chemin de fer surtout, la nourriture de Hongkong : la colonie est, ainsi, la grande source de dollars de la République populaire de Chine ; en dépit d’une agriculture très perfectionnée dans les New Territories, Hongkong ne produit qu’une infime partie de ses besoins alimentaires. Le port d’entrepôt est resté très important pour l’Asie du Sud-Est. Le trafic est facilité par le statut de port franc, sauf pour certains produits (parfums, alcools), et par l’absence de contrôle des changes. L’essentiel du trafic portuaire se fait au mouillage : les cargos mouillent en rade et sont déchargés par jonques. Les manutentions sont rapides et bon marché, en dépit de l’apparent archaïsme des moyens. Le stockage bénéficie de grandes facilités. Hongkong et Singapour sont à la tête de l’extraordinaire réseau de commerçants chinois qui règne sur toute l’Asie du Sud-Est. À Hongkong, les produits manufacturés sont meilleur marché que dans leur pays d’origine, les pays producteurs vendant sans taxe à l’étranger et Hongkong étant port franc.

Le commerce de détail a ainsi une extraordinaire activité : les rues commerçantes sont des suites de boutiques vendant toutes sortes d’articles, parfois de grande valeur (montres, appareils photographiques ou caméras, etc.), exportés ou revendus en partie aux touristes.

Hongkong est devenue un centre industriel important depuis 1955. En 1970, 578 000 actifs travaillaient dans le secteur secondaire. En 1969, Hongkong a exporté pour 10,5 milliards de dollars de Hongkong de marchandises (1 HK $ égale approximativement 1 franc). L’industrie textile, et surtout cotonnière, a été longtemps l’industrie fondamentale, d’autant que Hongkong a pu exporter librement sur le marché britannique, concurrençant vigoureusement le Lancashire. Il y a aujourd’hui d’importantes filatures : 33 usines en 1947, 296 usines et 716 000 broches en 1964. La plupart de ces filatures sont installées dans des villes satellites toutes neuves : Kwun Tong au sud-est de Kowloon et Tsuen Wan au nord-ouest de Kowloon. Elles sont contrôlées par d’anciens industriels de Shanghai. Le tissage se fait surtout à Victoria : à North Point et Wan Chai, dans des ateliers installés dans des buildings. Hongkong exporte vers les pays développés (Grande-Bretagne, États-Unis, Australie, Nouvelle-Zélande) des tissus très bon marché, et par contre des tissus de qualité vers l’Asie du Sud-Est. Mais, dans l’industrie du textile, depuis 1964, vient en tête la confection. Les plus gros acheteurs sont les États-Unis, la Grande-Bretagne, l’Allemagne de l’Ouest et la Suède. L’industrie des postes de radio à transistors date de 1959 : 5 000 appareils étaient produits en 1960, 6 300 000 appareils en 1966. Au début, Hongkong recevait des pièces détachées importées et n’effectuait que le montage, opération simple ne demandant pas de hautes qualités techniques. Mais, depuis les investissements américains, japonais et britanniques, les pièces sont fabriquées à Hongkong. Hongkong exporte des appareils à une seule bande d’émission, vendus aux États-Unis et en Europe. Une meilleure productivité a permis une baisse considérable des prix. Les chantiers navals sont restés fort importants ; ils emploient 7 000 ouvriers. Hongkong a passé le premier stade industriel, celui de la fabrication d’articles très bon marché utilisant une main-d’œuvre bon marché sans qualification. Grâce à l’achat massif de machines-outils, elle est capable désormais de fabriquer des articles de qualité.

L’ensemble urbain comprend deux organismes essentiels, Victoria et Kowloon, qui se font face de part et d’autre du bras de mer. Les communications entre les deux se font par un remarquable réseau de ferry-boats, mais un tunnel est actuellement creusé pour faciliter la circulation automobile. À Victoria se trouve le centre des affaires (« Victoria City ») avec banques, centre postal, Cour suprême, consulats, sièges des compagnies aériennes et des compagnies de navigation, et, immédiatement à l’est, commence la ville commerciale chinoise, parallèle à la côte, mais mordant sur les basses pentes de Victoria Peak, grâce à des ruelles étroites entre des bâtiments à étages, où se succèdent les boutiques et leurs enseignes ; la densité est ici toujours supérieure à 1 000 habitants à l’hectare, et parfois à 5 000 habitants à l’hectare, dans des immeubles souvent vétustés et malsains ; au-dessus de ce quartier commerçant, les résidences, britanniques notamment, escaladent Victoria Peak. Kowloon a moins de pittoresque : à l’ouest se trouvent le port, avec quais et entrepôts, puis un grand quartier commerçant, le plus grand de l’agglomération, traversé par Nathan Road ; à l’est, une zone industrielle, le grand aérodrome de Kai Tak, dont la piste a été gagnée sur la mer par une entreprise française, et, au-delà, la ville satellite très moderne de Kwun Tong (200 usines, 250 hectares de polders dont 120 à usage industriel, 300 000 hab.).

Mais la colonie est, pour une grande part, une agglomération de réfugiés (1 million ?) ; de 1949 à 1959, on a parfois compté 10 000 nouveaux arrivants par mois. Beaucoup d’entre eux étaient et sont restés misérables : le chômage est considérable parmi eux. Ces réfugiés se sont installés à Victoria et surtout à Kowloon dans les vides du paysage urbain (à l’exception des terrains militaires), notamment sur les pentes, où ils ont créé d’effroyables bidonvilles (« slums »), menacés par les incendies et que le gouvernement s’efforce de faire disparaître par l’édification de grands ensembles. Le problème du logement est grave, d’autant qu’on ne peut guère construire qu’en arasant des collines et en gagnant, avec les matériaux, des polders sur la mer.

Au problème des transports, largement résolu, à celui, grave, des logements s’ajoute le problème de l’eau, en dépit de la construction en 1963, par une entreprise française, d’un grand réservoir dans l’île de Lan Tao, d’où l’eau vient par pipe-line.

Ensemble urbain unique au monde, Hongkong connaît donc nombre de difficultés, dont son site est largement responsable. Par ailleurs, son avenir politique est incertain.

J. D.