Holbein (les) (suite)
Son classicisme et sa maîtrise s’imposent dans ses grandes compositions religieuses. L’influence d’Altdorfer*, des éléments architecturaux empruntés à Mantegna* sont réunis dans son diptyque du Christ et la Vierge de douleur (v. 1521, musée de Bâle) ou encore dans les volets du Retable de la Passion (1524, musée de Bâle). Ces emprunts à la Renaissance italienne permettent de croire que l’artiste se rendit en Italie. Le réalisme objectif de Holbein, la sincérité et la clarté de sa vision l’éloignent du sentiment mystique d’un Grünewald, même si la prédelle du Retable d’Issenheim lui servit de modèle pour son Christ mort (1521, Bâle), qui n’offre pas le même caractère tragique.
En 1521-22, Holbein décore à fresque la grande chambre du Conseil à l’hôtel de ville de Bâle ; on n’en possède plus que des esquisses, où le dessin incisif et l’élégante ordonnance classique caractérisent la pleine maturité de l’artiste. En 1523, il peint plusieurs portraits d’Erasme. En 1524, il se rend en France : au début de l’été à Lyon, et probablement ensuite à Avignon ; il découvre l’art du portrait aux trois crayons à la façon des Clouet*, qu’il reprendra plus tard dans ses œuvres anglaises. Il arrive en Angleterre en 1526 et est accueilli par Thomas More en sa maison de Chelsea ; il exécute le portrait de son hôte (aujourd’hui disparu) et celui de Nicolas Kratzer, astronome du roi Henri VIII (Louvre).
En 1528, il est de retour à Bâle. Durant cette seconde période (1528-1532), il s’occupe de travaux décoratifs, fournissant des modèles aux orfèvres et armuriers. Cependant, la Réforme, s’étendant partout en Allemagne, atteint à la fureur iconoclaste à Bâle. Jakob Meyer, l’ancien bourgmestre, qui avait commandé la célèbre Vierge du musée de Darmstadt, demeure catholique. Holbein travaille désormais pour la Réforme autant que pour les catholiques.
En 1532, il repart pour l’Angleterre, et devient très rapidement le portraitiste attitré de l’aristocratie et de la Cour. Sa carrière londonienne est entrecoupée de plusieurs voyages sur le continent. Sa dernière période est dominée par l’art du portrait, bien qu’il se soit beaucoup consacré à des décorations, aujourd’hui détruites mais connues par leurs esquisses, comme celles qu’il exécute sur les murs de la salle des fêtes de la Hansa Steelyard ; il compose là pour les marchands allemands un Triomphe de la Richesse (dessin au musée du Louvre) et un Triomphe de la Pauvreté. Holbein allie le classicisme de la ligne à la minutieuse observation du caractère profond de ses modèles. Il confère un certain hiératisme à ses portraits individuels, ceux d’Henri VIII ou celui du sieur de Morette (musée de Dresde), ainsi qu’à ses portraits de groupe, tel celui des Ambassadeurs (Londres, National Gallery), représentés dans un intérieur monumental très caractéristique de cette dernière période. L’admirable rendu des étoffes et des perles, la frontalité toute géométrique qui caractérise alors le style de Holbein firent la célébrité de son portrait d’Anne de Clèves, peint sur vélin collé sur toile (Louvre).
Les études préparatoires du maître, à la plume ou à la pointe sèche rehaussées de sanguine et de gouache, conservées pour la plupart au château de Windsor, révèlent ce génie de portraitiste intègre qui marquera toute l’école anglaise jusqu’à l’arrivée de Van Dyck* à Londres, un siècle plus tard.
P. H. P.
U. Christoffel, Hans Holbein der Jüngere (Berlin, 1924 ; 2e éd., 1950). / H. A. Schmidt, Hans Holbein der Jüngere (Bâle, 1945-1948 ; 3 vol.). / N. Lieb et A. Stange, Hans Holbein der Ältere (Munich, 1960). / F. Dvořák, Hans Holbein le Jeune, dessins (trad. du tchèque, Cercle d’art, 1966).
