Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
H

hibernation (suite)

L’hibernation, malgré les progrès immenses qu’elle a faits et qu’elle a fait faire, est donc loin d’être simple et fiable. Depuis la première drogue à visée antimétabolique (ou si l’on préfère antiadrénergique), la chlorpromazine, un très grand nombre de substances très diverses ont été mises à contribution. Toutes ont pour première intention de neutraliser l’activité des catécholamines (adrénaline, noradrénaline, etc.), qui sont accusées de donner le coup de fouet aux cellules déficientes. Ces catécholamines, capables de tirer l’organisme d’une situation dangereuse chaque fois que le travail à fournir n’est pas excessif, peuvent conduire au désastre si elles obligent l’organisme à combattre avec l’intensité coutumière de ses processus vitaux, alors que, par exemple, l’oxygénation des cellules nobles est déficiente (par hypoxie ou anémie) : c’est ce que l’hibernation tend à éviter.

J. V.

 H. Laborit, Réaction organique à l’agression et choc (Masson, 1952 ; 2e éd., 1955) ; Résistance et soumission en physiobiologie. L’hibernation artificielle (Masson, 1954). / H. Laborit, P. Huguenard et coll., Pratique de l’hibernothérapie en chirurgie et en médecine (Masson, 1953).

Hideyoshi (Toyotomi)

Général et homme d’État japonais (Nakamura 1536 - Fushimi 1598).



L’homme

Un des meilleurs généraux d’Oda Nobunaga, Hideyoshi était fils de paysans. De son véritable nom Kinoshita Tōkichirō, il ne prit le nom de Hideyoshi que plus tard, lorsqu’il eut fait ses preuves comme guerrier. La famille des Fujiwara l’adopta et lui conféra le patronyme de Toyotomi. De petite taille, extrêmement laid, mais débordant d’activité et d’une grande intelligence, il avait réussi à se constituer dans l’Est des domaines assez importants. Lorsque, en 1582, Oda Nobunaga, alors au faîte de sa puissance, fut traîtreusement attaqué par son général Akechi Mitsuhide et fit seppuku (se suicida), Hideyoshi se tourna contre celui-ci et le tua, prenant ipso facto la succession d’Oda Nobunaga après avoir éliminé les autres prétendants.

Il a alors quarante-six ans. N’ayant pas lui-même de descendance, il se démet symboliquement de ses fonctions en faveur de son neveu Hidetsugu, mais continue à gouverner. Son but avoué est d’unifier le Japon sous sa férule. Pour ce faire, il distribue des fiefs à ses fidèles, entreprend la conquête de l’île de Kyūshū, qui était pratiquement demeurée indépendante, et attaque le Kantō (région de Edo), où régnaient des descendants des shikken Hōjō. À la tête de 250 000 hommes, il assiège la forteresse d’Odawara, qu’il ne réussira à forcer que grâce à une trahison, et oblige les derniers Hōjō à faire seppuku (1590). Hideyoshi confie alors ces provinces de l’Est à un de ses plus vaillants généraux, Tokugawa Ieyasu. Le Japon tout entier soumis, les grands daimyo (chefs de province) en apparence subjugués, Hideyoshi se préoccupa d’administrer le pays. Dès 1583, il avait ordonné un recensement général des terres. Il crée une nouvelle administration civile, composée de cinq bugyō (sorte de ministres sous les ordres du kampaku Hideyoshi) et une administration militaire dirigée par des inspecteurs généraux (kangun). Il fait confisquer toutes les armes dans les provinces (katanagari, 1588) et se fait construire, avec l’aide de ses vassaux, un puissant château à Ōsaka (v. 1584).


Le progrès social

Grâce à sa prévoyance et au parfait fonctionnement de son administration, la société japonaise, en mouvement jusque-là quelque peu anarchique, s’organise. Hideyoshi réforme le système des impôts (qu’il alourdit légèrement), fait battre monnaie d’or. Sorti du peuple, Hideyoshi se préoccupe des besoins de celui-ci : il fait relever les villages dévastés par les guerres, réparer les systèmes d’irrigation et favorise les échanges en améliorant le système routier et en combattant vigoureusement le brigandage. L’évolution sociale se poursuit : Hideyoshi admet dans son entourage des hommes de petite extraction, mais habiles ; les fonctions militaires et administratives deviennent ouvertes à tous les hommes qui s’en montrent dignes. La coutume du servage, déjà disparue en fait, est officiellement abolie.

Le bouddhisme, favorisé, pénètre de plus en plus dans le peuple, et lui infuse des idées égalitaires : l’influence des sectes amidistes et des doctrines de Nichiren est de plus en plus profonde, ce qui donne au peuple le sentiment d’appartenir non plus à une région ou à un seigneur, mais à une nation. L’industrie se développe également, née de l’artisanat et encouragée par les besoins militaires. Les armes à feu, les nouveaux armements provoquent la création de fonderies. Les filatures de soie se modernisent, les marchés se multiplient qui donnent naissance à des villes. Enfin, la marine prend, grâce aux exemples portugais, un grand développement, et les chantiers navals travaillent sans arrêt. Dans les villes, comme à Kyōto, l’urbanisme se renouvelle et d’immenses palais s’édifient, comme le célèbre Jurakudai ou celui de Fushimi (1594). Des cités sont créées : Nagasaki devient port franc. Ōsaka est agrandie et fortifiée. Enfin, de somptueuses fêtes sont ordonnées, auxquelles est convié le peuple. Les manières de vivre elles-mêmes se modifient avec l’élévation du niveau de vie : le vêtement se simplifie, devient plus sobre, les demeures s’ornent de peintures. L’art évolue vers la somptuosité, la littérature se montre plus sociale et plus virile.


Hideyoshi et les étrangers, la conquête de la Corée

Entre-temps, un fils, Hideyori, était né à Hideyoshi (1593), presque aussitôt nommé son successeur. Hidetsugu se rebelle, mais est bientôt vaincu et acculé au suicide avec sa famille (1595). Tout d’abord soucieux de se ménager des appuis dans tous les milieux, le kampaku accueille favorablement les missionnaires chrétiens, s’entoure de conseillers jésuites. Mais ceux-ci semblant prendre trop d’importance, Hideyoshi se retourne brusquement contre eux, les expulse (1587). Il tolère cependant les autres chrétiens. Mais, en 1597, les missionnaires de confessions différentes s’opposant, il commence les persécutions contre les chrétiens, car il soupçonne en eux des espions de l’armée espagnole basée à Manille. Entre-temps, soit désir de venger les assauts mongols de 1274 et de 1281, soit pour se débarrasser d’une soldatesque devenue encombrante, Hideyoshi décide (1591) d’envahir la Corée et de soumettre l’empire de Chine. Une première tentative se solde par un échec : en 1592, l’amiral coréen Li Sun-sin, inventeur des bateaux cuirassés, anéantit la flotte japonaise, et Hideyoshi est obligé d’évacuer de Corée les 200 000 hommes qu’il y avait envoyés. Une deuxième tentative a lieu en 1597. Après plusieurs mois, de combats acharnés contre les Coréens et les Chinois, Hideyoshi est obligé de se cantonner dans la défensive. Devenu fou, malade, il prétend se faire adorer comme divinité de la guerre, Hachiman. Mais il ne verra pas la retraite de ses troupes de Corée : en septembre 1598, il meurt, terrassé par la maladie.