Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
H

Henri II Plantagenêt (suite)

Ambitions et difficultés d’Henri II

Désireux de renforcer l’unité territoriale de son empire, le roi s’assure dès 1166 la maîtrise de la Bretagne au nom de son troisième fils, Geoffroi, et contraint en 1173 le comte de Toulouse à lui prêter un hommage lige. Entre-temps, en 1170, Henri II tente de conquérir l’Irlande ; en outre, il neutralise par d’habiles cadeaux les chefs gallois et oblige le roi d’Écosse, Guillaume le Lion, à lui prêter hommage après la défaite d’Alnwick en 1173.

En fait, ces succès d’Henri II sont compensés par de graves difficultés. Les premières lui sont suscitées par l’Église d’Angleterre, dont le primat, Thomas* Becket, archevêque de Canterbury, refuse d’approuver les seize constitutions de Clarendon de 1164, qui prétendent assujettir à la justice royale les clercs criminels, imposer aux prélats l’élection de leurs pairs dans la chapelle royale et soumettre tout appel en cour de Rome à l’assentiment préalable du souverain. Contraint de s’exiler en France, Thomas Becket ne rentre en Angleterre que pour être assassiné dans sa cathédrale, par des chevaliers, serviteurs fidèles d’Henri II (29 déc. 1170) ; pour se réconcilier avec l’Église, le roi sera contraint en 1172 à une douloureuse et humiliante flagellation pénitentielle à Avranches devant la châsse du défunt.

Plus graves encore sont les difficultés nées de la révolte de ses fils, sur lesquels il comptait soit pour gouverner en son nom ses différentes possessions continentales (Henri en Normandie, Richard en Aquitaine, Geoffroi en Bretagne), soit pour assurer sa succession préventive (couronnement d’Henri le Jeune en 1170, qui se pose dès lors en compétiteur du trône paternel jusqu’à sa mort prématurée en 1183). Si Henri II brise d’abord facilement ces révoltes, telle celle de 1173, à l’issue de laquelle il contraint Henri et Richard à regagner leurs fiefs continentaux après la défaite de leur allié le roi d’Écosse, il n’en est plus de même lorsque le jeune roi de France Philippe II Auguste décide d’apporter son soutien systématique aux princes révoltés : Henri le Jeune en 1183, Geoffroi en 1186, Richard en 1188, Richard et Jean sans Terre enfin en 1189. Désirant reprendre le Vexin normand, qu’Henri II conservait indûment depuis 1167 au titre de la dot d’Adélaïde de France, jeune fiancée de Richard, dont le roi d’Angleterre avait fait sa maîtresse, Philippe II Auguste arrache au souverain Plantagenêt la cession d’une partie du Berry et de l’Auvergne ainsi que la promesse du mariage entre Adélaïde et Richard, auquel les barons devraient prêter hommage. Mais deux jours après la signature du traité d’Azay-le-Rideau (4 juill. 1189), Henri II meurt prématurément, frappé au cœur par l’annonce de la trahison de son dernier fils, Jean sans Terre.

En fait, si l’empire qu’il a fondé ne lui survit pas longtemps, Henri II, par contre, et de manière paradoxale, a joué un rôle essentiel dans le processus d’unification du royaume de France.

P. T.

➙ Angleterre / Anjou / Aquitaine / Bretagne / Écosse / Galles (pays de) / Gascogne / Guyenne / Irlande / Louis VII / Maine / Normandie / Philippe II Auguste / Plantagenêt / Thomas Becket / Touraine.

 SOURCES. L. Delisle, Recueil des actes de Henri II roi d’Angleterre et duc de Normandie concernant les affaires françaises et les affaires de France (Klincksieck, 1910-1920 ; 2 vol.).
J. H. Ramsay, The Angevin Empire or the Three Reigns of Henry II, Richard II and John, 1154-1216 (Oxford, 1903 ; 8 vol.). / J. Boussard, le Comté d’Anjou sous Henri Plantagenêt et ses fils, 1151-1204 (Champion, 1938) ; le Gouvernement d’Henri II Plantagenêt (d’Argences, 1956). / R. Foreville, l’Église et la royauté en Angleterre sous Henri II Plantagenêt, 1154-1189 (Bloud et Gay, 1944).

Henri VIII

(Greenwich 1491 - Westminster 1547), roi d’Angleterre et d’Irlande (1509-1547).



L’homme

Lorsque, peu après son mariage avec Catherine d’Aragon, meurt le prince Arthur (1502), fils aîné du roi Henri VII et de la reine Élisabeth d’York, son frère le prince Henri devient l’héritier de la couronne d’Angleterre.

Son éducation a été assez soignée. Il a été entouré par tous les hommes qui avaient le plus contribué à l’introduction de la Renaissance en Angleterre, tels Thomas Linacre (qui lui a enseigné la grammaire latine) et Érasme lui-même, avec lequel il a correspondu. C’est ainsi qu’il se montrera par la suite capable de discuter avec des théologiens et qu’il prendra lui-même la plume pour défendre, en un traité assez réussi, les Sept Sacrements contre Martin Luther (1521). Mais cet homme cultivé n’est pas un homme d’étude ; il s’adonne aussi aux arts d’agréments (c’est un excellent flûtiste) et surtout aux exercices physiques ; grand chasseur devant l’Eternel, infatigable cavalier, bon lutteur, il fera à cet égard au moins jeu égal avec son brillant rival, François Ier. Dans sa jeunesse, Henri a grande allure : plus grand que la moyenne, assez fort, le teint clair et les cheveux d’un blond vif, il est toujours magnifiquement vêtu. Plus tard, lorsqu’une ulcération de la jambe le forcera à s’aider d’une longue canne, il gardera au moins une grande majesté dans son aspect.

Prince imposant, il est cependant d’abord agréable. Pourtant, son charme un peu facile cache un fond de violence, d’égoïsme et de froide volonté : très vite, ceux qui l’approcheront sauront que « l’inimitié du roi signifie la mort ». Et ce dernier trait de caractère devient de plus en plus évident à partir de la brouille avec Anne Boleyn. Malgré cette « ambiguïté », Henri VIII sera, dans l’ensemble, non seulement un souverain redouté, mais aussi un souverain populaire. Il est vrai qu’après quelques maladresses initiales il saura habilement manier l’opinion publique.


Henri VIII et Wolsey

Les débuts du règne d’Henri VIII apparaissent tout d’abord comme la continuation du règne précédent. L’alliance traditionnelle avec l’Espagne est conservée, puisque, dès après son avènement (1509), le jeune roi a épousé la veuve de son frère, Catherine d’Aragon, de six ans son aînée.