Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Henri II

(Saint-Germain-en-Laye 1519 - Paris 1559), roi de France (1547-1559).


Fils cadet de François Ier et de Claude de France, il ne fut destiné à régner qu’après la mort accidentelle de son aîné, le dauphin François (1536) ; aussi ne lui avait-on fait épouser en 1533 qu’une princesse de médiocre maison, Catherine* de Médicis.

À la mort de son père, il renvoie ses ministres et entreprend de gouverner son royaume avec soin el esprit de suite. Alors dans la force de l’âge, il est aimé de la noblesse pour sa bravoure et ses largesses ; il en sera bien servi, et ses conseillers les plus puissants, comme le connétable de Montmorency ou les Guise, ne feront qu’exécuter fidèlement ses volontés. Après son sacre (juill. 1547), il part visiter les principales provinces de ses États pour remédier aux abus et se rendre compte par lui-même des forces dont il peut disposer pour continuer la lutte contre un Charles Quint plus puissant que jamais, puisqu’il vient de vaincre les protestants allemands à la bataille de Mühlberg (avr. 1547).

Henri II affirme tôt sa volonté d’être le maître. À l’intérieur, il réprime durement des révoltes populaires en Guyenne en 1548 ; l’année suivante, par une courte guerre, il oblige l’Angleterre à lui restituer Boulogne, ainsi qu’il en avait été décidé par un traité passé avec François Ier. Il va continuer en ces deux domaines la politique de son père : faire progresser l’autorité royale en France et défendre le royaume contre la puissance des Habsbourg. L’historien Georges Pages a pu justement écrire : « Jamais peut-être rois de France ne furent plus puissants que François Ier et Henri II. »

Par un décret de 1547, le roi consacre officiellement le rôle et l’importance des secrétaires d’État, dont le nombre est fixé à quatre : c’est l’embryon de l’institution ministérielle, système qui favorisera l’absolutisme en se généralisant dans la seconde moitié du siècle. Des offices nouveaux sont aussi créés : 61 présidiaux de 9 juges chacun sont institués en 1552 ; cette juridiction trouve sa place entre les parlements et les tribunaux de bailliages. Henri II complète en outre la réforme de l’administration des finances entreprise sous le règne précédent, en instituant deux contrôleurs qui ont la charge de surveiller les fonds du Trésor.

La lutte contre Charles Quint reprend en 1552. Après Mühlberg, les princes protestants demandent l’aide du roi de France ; le traité de Chambord de janvier 1552 autorise Henri II à occuper Metz, Toul et Verdun. Le roi se fait le champion d’une politique réaliste, combattant les huguenots à l’intérieur et s’alliant avec eux à l’extérieur.

Cette alliance donne les meilleurs résultats : Henri II peut occuper sans coup férir les Trois-Évêchés, qui constituent de remarquables positions stratégiques. Charles Quint tente vainement de s’emparer de Metz, bien défendue par le duc François de Guise en 1552. Il faut remarquer, d’ailleurs, qu’on ne semble pas avoir eu conscience, à l’époque, de l’importance de cette acquisition, car, ce qui semble alors compter, ce sont les affaires d’Italie. La guerre s’y rallume en même temps qu’en Allemagne : le duc de Parme Ottavio Farnèse, en butte aux attaques de l’empereur et du pape Jules III, a fait appel au roi de France, dont les armées obligent le pape à céder ; dans cette guerre, Henri II est aidé du Turc et des corsaires barbaresques, dont le célèbre Dragut.

La guerre de Parme est à peine terminée qu’éclate celle de Sienne ; la ville fait appel aux Français. Le maréchal Piero Strozzi opère en Toscane, tandis que Biaise de Monluc (1502-1577) est chargé de défendre la place. Après des succès initiaux, les Français sont vaincus, et Monluc doit rendre la ville, qui passe sous la domination de Florence, c’est-à-dire de l’Espagne (1555). L’année suivante, las de combattre, Charles Quint signe avec la France la trêve de Vaucelles (févr. 1556) ; Henri II conserve la Savoie et le Piémont.

La trêve n’est pas de longue durée : le pape Paul IV, attaqué par l’Espagne, engage Henri II dans le conflit (sept. 1556). Le royaume de Naples est envahi par le duc de Guise pendant que la guerre se rallume sur les frontières du nord de la France. Philippe II, le successeur de Charles Quint, dispose, depuis son mariage avec Marie Tudor, de l’alliance anglaise ; il peut ainsi réunir une armée aux Pays-Bas, qu’il confie au duc de Savoie, Emmanuel-Philibert (1528-1580), le plus grand capitaine de son époque ; celui-ci, le 10 août 1557, remporte la victoire de Saint-Quentin sur Montmorency.

Cette défaite est durement ressentie en France : elle met fin à l’expédition de Guise, qui est rappelé d’Italie, car on craint l’occupation de la capitale. Mais Philippe II connaît alors de graves difficultés financières : il ne peut exploiter son succès, et la situation se retourne bientôt en faveur de la France. Au nord, Guise s’empare par surprise de Calais (janv. 1558), la dernière place que les Anglais occupaient en France depuis la guerre de Cent Ans. La prise de Thionville et celle de Dunkerque complètent cette victoire.

Cependant, des deux côtés on souhaite la paix, rendue nécessaire en France par la grave crise financière de 1557-1559. Elle est signée le 3 avril 1559 au Cateau-Cambrésis : les belligérants se rendent mutuellement leurs conquêtes. Henri II met définitivement fin au rêve italien en renonçant à ses droits sur le Milanais ; au duc de Savoie, il rend ses États, mais y conserve les citadelles de Turin, de Pignerol, de Chivasso et de Chieri, manière d’établir la tutelle française sur le duché ; en outre, sa sœur, Marguerite de France épousera Emmanuel-Philibert, duc de Savoie. La France recouvre Saint-Quentin, Ham et Le Catelet ; surtout, elle garde Calais et les Trois-Évêchés.

À l’époque, la paix du Cateau-Cambrésis fut considérée comme une véritable catastrophe, l’Italie étant, en fait, abandonnée. Quoi qu’il en soit, elle reflète bien et le nouveau rapport des forces et les choix politiques nouveaux des deux protagonistes. La France demeure prépondérante au nord-est, Philippe II se désintéresse des affaires allemandes et anglaises (il n’est plus rien en Angleterre depuis la mort de Marie Tudor en 1558). L’Espagne ne fait plus sien le rêve de domination universelle de Charles Quint, et Henri II renonce aux chimères italiennes. Par contre, Philippe II affirme la prépondérance espagnole en Italie et amorce une politique tournée vers l’acquisition de l’hégémonie en Méditerranée.