Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
H

Havane (La) (suite)

Au xviiie s., la ville participa à la prospérité sucrière, s’agrandit et s’embellit. En 1762, elle fut assiégée pendant 67 jours par une flotte anglaise de 250 bâtiments transportant 14 000 soldats et, faute de secours, elle capitula. Cet événement eut de grandes conséquences puisque, à partir de là, les Bourbons d’Espagne lancèrent leur grand programme de réformes militaires, administratives, commerciales, pour fortifier l’empire. La Havane était une clef stratégique et commerciale, l’Anvers des Caraïbes.

Cuba resta espagnole jusqu’en 1898, lorsque la guerre hispano-américaine éclata : le croiseur américain le Maine, envoyé par Washington, explosa accidentellement en rade de La Havane. Ce fut le prétexte de l’intervention.

À la fin de la domination de Machado, vers 1933. La Havane vit renaître les sociétés secrètes qui, tout au long du xixe s., avaient œuvré contre la domination espagnole, et il y eut des manifestations d’étudiants contre le tyran.

Entre 1952 et 1958, sous la domination de Batista, La Havane devint la capitale de la prostitution en Amérique latine, avec une population de 20 000 prostituées. Batista et ses amis mirent en place des gangs italo-américains qui firent du jeu une véritable industrie nationale : loterie, machines à sous, casinos, etc. Le tourisme américain et international fournissait le reste des revenus de cette ville qui croissait de façon explosive.

C’est à La Havane, le 21 novembre 1947, que se réunit la première conférence internationale sur le commerce et l’emploi ; la charte qui fut alors signée servit de base à l’Organisation internationale du commerce.

La Havane fut considérée par les révolutionnaires avec une grande méfiance. Est-ce parce qu’elle n’avait pas participé au combat contre Batista ? Cependant, bien des opposants y étaient morts dans les tourments, et la capitale avait fait un accueil fantastique aux barbudos en janvier 1959. Est-ce parce que la grève insurrectionnelle d’avril 1958 y avait échoué ? Mais elle avait échoué partout, et les réseaux urbains avaient bien travaillé. Les raisons sont plutôt socio-professionnelles : à la méfiance des castristes descendus de la « sierra » vis-à-vis de toutes les villes s’ajoute le grand problème légué par Batista. Usine à plaisirs, vivant du tourisme, La Havane participe avec enthousiasme au combat pour la moralisation, contre le vice, le jeu et la mendicité, mais elle est frappée économiquement dans ses classes moyennes, plus développées ici que partout ailleurs. Elle fournit donc proportionnellement le plus de candidats à l’émigration vers Miami. En 1968, les derniers commerces privés ont été nationalisés à La Havane, qui ressent moins que les campagnes le bénéfice matériel de la révolution.

J. M.

➙ Cuba.

 J. H. Valdés, Historia de la isla de Cuba y en especial de La Habana (La Havane, 1964).

Havre (Le)

Ch.-l. d’arrond. du départ. de la Seine-Maritime ; 200 940 hab. (Havrais). L’agglomération, de Gonfreville-l’Orcher à Sainte-Adresse, en passant par Harfleur, Montivilliers et Rouelles, compte environ 250 000 habitants.



L’histoire

Jusqu’à la fin du Moyen Âge, le site du Havre n’était qu’un vaste marais où l’on pratiquait l’industrie du sel. Une petite chapelle pour les marins, Notre-Dame-de-Grâce, donna son nom au port que François Ier décida de construire et qui s’appela d’abord Villefrançoise-de-Grâce, puis Le Havre-de-Grâce. Il s’agissait de remédier à l’insuffisance des autres ports de l’estuaire de la Seine, comme Caudebec ou Harfleur.

Dès 1517, le roi avait résolu de faire du Havre le grand port de la côte océane, car « le lieu de Grâce, disait le rapport, était le plus propre et le plus aisé de ladite côte et pays de Caux à faire havre ». François Ier vint souvent à Villefrançoise presser les travaux, souvent retardés par les dégâts causés par les marées.

Le maître maçon Michel Féré construisit le port, et un ingénieur militaire génois, Bellarmato, se chargea des fortifications, car Le Havre était destiné à devenir le grand port militaire du royaume. Au cours de la guerre menée par le roi contre l’Angleterre, il rassembla au Havre en 1545 toute sa flotte, celle de l’Océan comme celle de la Méditerranée, en vue d’un débarquement en Angleterre. Les troupes ravagèrent l’île de Wight et les côtes anglaises du côté de Douvres. Cette descente fut la dernière de ce genre réussie dans la grande île.

Dans la seconde partie du xvie s., Le Havre fut ravagé par la peste d’abord, par les guerres de Religion ensuite. En 1562-63, le port fut occupé quelque temps par les Anglais, appelés par les protestants, avant d’être repris par les troupes royales, commandées par le connétable de Montmorency. Durant le règne d’Henri III, la ville devint un fief de la Ligue, tenu par le duc de Villars.

Richelieu continua l’œuvre de François Ier. Sous son impulsion, le port fut agrandi et empierré. Plus tard, Colbert demanda à Vauban de le creuser pour permettre l’entrée des navires de fort tonnage. En 1694, les Anglais, durant la guerre de la ligue d’Augsbourg, ne purent s’en emparer.

Louis XVI, puis Napoléon III poursuivirent l’aménagement du port. Durant la Seconde Guerre mondiale, Le Havre, libéré seulement en septembre 1944, fut dévasté par les bombardements, et son installation portuaire anéantie. Sa reconstruction fut menée à bien par l’architecte Auguste Perret*.

P. P. et P. R.


Le port

La ville du Havre ne peut se comprendre sans référence à son port, le deuxième de France après Marseille. N’a-t-elle pas été fondée pour être un port, en tête de l’estuaire de la Seine et en ouverture sur la Manche ? Tout en se transformant, cette fonction portuaire n’a pas cessé d’animer la ville et l’agglomération. L’évolution de celles-ci correspond aux grandes mutations du port. Au commerce colonial, prédominant jusqu’au milieu du xixe s., correspond une petite ville de marins resserrée derrière ses remparts autour des vieux bassins du Roi et de la Barre. Avec les grandes réussites du négoce international, et notamment le succès des Bourses au café et au coton entre le second Empire et 1914, la ville éclate et s’étend presque à ses dimensions actuelles, tandis que le port se dote de ses bassins à flot et de son grand bassin de marée. Aux ambitions pétrolières et industrielles de la période contemporaine correspondent l’élargissement de l’agglomération et le développement du port vers l’amont dans les terrains de marais situés entre Harfleur et Tancarville.