Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Hanse (suite)

Une Hanse interurbaine : la Hanse des dix-sept villes

Longtemps confondue avec la Hanse de Londres, dont nous pouvons estimer qu’elle réunissait un nombre égal d’agglomérations marchandes, la Hanse des dix-sept villes réunit en un puissant cartel interurbain les marchands des Pays-Bas et du nord de la France, exportateurs des célèbres étoffes « francigènes ». Ces marchands commercialisent ces étoffes en Île-de-France et surtout aux foires de Champagne auprès de leurs homologues italiens, par l’intermédiaire desquels ils les diffusent dans l’ensemble du Bassin méditerranéen. Cette Hanse interurbaine compta à son maximum d’extension au xiiie s. plus de vingt villes ; elle disparut au xive s., victime de la montée de Bruges et de l’interdiction faite par Louis X le Hutin à ses membres, en 1315, de se rendre à Bapaume.


La Hanse teutonique


La Hanse des marchands

« Groupement de marchands de l’Allemagne du Nord » destiné à assurer la protection et l’expansion commerciale de ses membres à l’étranger, la Hanse allemande naît à la fois de la fondation, vers 1158, de Lübeck à la jonction de la mer du Nord et de la mer Baltique, et de la création de la « Communauté des marchands allemands saisonniers de Gotland » au lendemain de la paix de 1161, réconciliant Allemands et Gotlandais. Les Allemands, qui disposent dès lors d’un comptoir à Visby, juxtaposé à celui des Scandinaves, développent leur commerce en Scandinavie et surtout le long des rives sud-orientales de la Baltique, où ils multiplient leurs fondations portuaires au xiiie s. : Rostock vers 1200-1218 ; Wismar vers 1200-1228 ; Stralsund, érigé en ville en 1234 ; Greifswald en 1241 ; Dantzig, érigé en ville en 1238, etc. En même temps, ces mêmes marchands remontent les fleuves pour drainer les produits locaux (fourrures, cire) et ceux de l’Orient lointain, qui leur parviennent par les relais de Smolensk et surtout de Novgorod. Ayant signé un traité de commerce en 1189 avec le prince Iaroslav, ils fondent dans cette ville un établissement commun : le Peterhof, privilégié en 1205-1207 par le prince Constantin Vsevolodovitch.

Les Hanséates pénètrent par ailleurs sous le nom d’Esterlins (Osterlins, marchands venus de l’est) en mer du Nord, où ils trafiquent à la fois en Norvège, en Angleterre, puis aux Pays-Bas ; ils monopolisent dès le milieu du xiiie s. le commerce le long d’un axe Novgorod-Reval-Lübeck-Hambourg-Bruges-Londres. Transitant d’abord par l’isthme du Holstein, ils affrontent après 1250 les risques inhérents à la circumnavigation du Jylland et gagnent directement Londres, où les membres de la Hanse de Cologne sont privilégiés depuis 1157 et où ceux de Hambourg et de Lübeck se voient reconnaître par le roi d’Angleterre Henri III le droit de constituer une Hanse particulière, respectivement en 1266 et en 1267, dans deux documents où le mot hansa est appliqué pour la première fois à des groupements marchands d’Allemagne du Nord (sans doute par analogie avec la « Hanse » flamande de Londres). Réconciliées par l’intermédiaire des Westphaliens, qui participent à la fois au trafic rhénan et au trafic baltique, les trois Hanses fusionnent en 1281 en une « Hanse allemande » : Hansa Theutonicorum ou Dudesche Hense, dont les membres ont accès au Stalhof de Londres (en anglais steelyard), c’est-à-dire à un comptoir clos de murs.

Les marchands allemands pénètrent alors en Flandre, où ils se sont fait accorder par la comtesse Marguerite, en 1252 et en 1253, d’importantes garanties judiciaires et commerciales, et ils fondent à Bruges un comptoir. Mais, n’étant pas étroitement limité à un enclos privilégié comme à Novgorod (fourrures), à Londres (laines), et à Bergen (poissons), ce nouvel établissement assure facilement les liaisons commerciales entre le monde baltique, d’une part, et les mondes atlantique et méditerranéen, d’autre part. Par son intermédiaire est assurée l’exportation en Occident des produits essentiellement naturels du Nord et de l’Est européens (blés de Prusse ; fourrures de Scandinavie et de Russie ; bois, goudrons, cire et miel de Livonie et de Russie ; poissons secs d’Islande et de Norvège ; harengs salés des Pays-Bas ; métaux de Suède et de Hongrie [fer, cuivre, etc.) ; bière de Hambourg et de Brême ; toiles de lin hanséates ; etc.). En contrepartie, le comptoir de Bruges facilite la diffusion dans le monde baltique des produits de l’Occident et du monde méditerranéen et oriental (épices venues d’Italie, draperies des Pays-Bas), que les flottes hanséates vont parfois quérir directement dans leurs pays d’origine à partir de 1250 (laines d’Angleterre) ou de 1350 (sel de la baie de Bourgneuf, le Baiensolt, puis de Brouage, sinon de Setúbal ; vins de La Rochelle ou de Gascogne, etc.).

À côté des dizaines d’établissements marchands et autres factoreries dispersés le long des côtes européennes depuis le Portugal jusqu’au golfe de Finlande, les quatre comptoirs de Novgorod, de Bergen, de Londres et de Bruges, appelés officiellement la « Communauté des marchands de la Hanse... », constituent le fondement essentiel de la prospérité et de la puissance de la Hanse allemande, qui est restée une institution très lâche.


La Hanse des villes

Formée sans doute de villes qui se sont groupées régionalement à partir de 1250 en ligues de défense (westphalienne, saxonne, wende), la Hanse allemande n’a jamais constitué elle-même une ligue de ce type, mais simplement une communauté économique qui, après avoir uni à l’origine uniquement des marchands, a progressivement associé entre 1250 et 1350 les villes dont ceux-ci étaient originaires. Ainsi, la Hanse des marchands a-t-elle achevé de se transformer vers 1350 en une Hanse des villes, dont l’usage des privilèges est, dès lors, réservé à ceux qui possèdent le droit de bourgeoisie d’une des villes membres.

Bien qu’il soit impossible d’établir une liste exhaustive des villes hanséatiques à une date déterminée, on peut estimer à au moins cent vingt-neuf le nombre de celles dont les grands commerçants ont participé à ses privilèges à l’étranger à un moment quelconque du xive et du xve s.