Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
G

Guarini (Guarino) (suite)

De 1647 à 1655, Guarini est lecteur de philosophie à Modène ; mais ses démêlés avec la cour ducale l’obligeront à partir, vraisemblablement pour Lisbonne, où va être construite sur ses plans l’église de la Divine-Providence, remarquable déjà par le mur ondulant et l’interpénétration des structures, qui sera détruite par le séisme de 1755. Ensuite fixé à Messine, il y enseignera et projettera l’église des Somasques. En 1662, il est appelé à Paris pour élever, selon le désir de Mazarin, l’église Sainte-Anne-la-Royale, sur le quai des Théatins, aujourd’hui quai Voltaire. Les travaux, ralentis par le manque de crédits, seront repris en 1714 ; l’édifice, vendu à la Révolution, sera démoli au début du xixe s. Le père Guarini est encore à Paris en 1665, où il publie sa Placita philosophica ; mais, l’année suivante, il se fixe définitivement à Turin*, et son œuvre dans la capitale du Piémont en fera un des hauts lieux de l’art baroque*.

Les deux palais réalisés à Turin comptent parmi les plus beaux de la fin du siècle en Italie : le collège des Nobles (1678, devenu Académie des sciences et galerie d’art) et surtout le palais Carignano (1679), exceptionnel par sa façade arquée, ses escaliers courbes et son salon au plafond diffusant.

La contribution la plus originale de Guarini demeure cependant ses églises à plan central. La chapelle du Saint-Suaire (Santa Sindone) au Dôme de Turin, surtout, dont il réalise la coupole à partir de 1667, et l’église San Lorenzo (1668-1679), où l’architecte célébrera la première messe.

On ne peut malheureusement leur comparer ses églises longues, en croix latine, qui ont tant influencé le baroque germanique ; celle de Lisbonne a disparu, celle de Turin (San Filippo Neri) a été, comme le sanctuaire de la Consolata, formant un type intermédiaire, transformée par Juvara* dans un tout autre esprit. Il appartenait à un élève de ce dernier, Bernardo Vittone (1705-1770), de publier l’Architecture civile de Guarini en 1737 et de faire la synthèse des deux maîtres dans ses propres réalisations.

Différente dans ses moyens de celle de Borromini, la recherche des effets lumineux et d’une perspective savamment graduée aboutit chez Guarini à « piéger » la lumière par un système de voûtes emboîtées. Son projet pour San Gaetano de Vicence montre la solution la plus simple, celle qui tentera les Mansart* et d’autres après eux : des coques recouvertes de fresques. Mais l’emploi de génératrices entrecroisées, notamment à Sainte-Anne-la-Royale, amène Guarini à ne conserver qu’un réseau diaphane d’arcs dessinant une étoile. La référence aux cimborios et au miḥrāb de Cordoue — la référence à l’Arménie serait aussi plausible — semble insuffisante à motiver la volonté permanente de l’architecte pour faire s’interpénétrer les espaces de tous ses édifices. Imprégné d’esprit gothique, Guarini applique la géométrie dans ses voûtes tout en restant fidèle, pour l’équilibre des supports, au procédé romain ; et, à cet égard, le plan de San Lorenzo de Turin est étonnamment proche de celui de la rotonde de Tibur.

H. P.

 P. Portoghesi, Guarino Guarini (Milan, 1956) ; Bernardo Vittone (Rome, 1966). / Congrès international de l’Académie des sciences de Turin, Guarino Guarini e l’internazionalità del Barocco (Turin, 1969 ; 2 vol.).

Guatemala

État d’Amérique centrale ; 108 889 km2 ; 5 350 000 hab. (Guatémaltèques). Capit. Guatemala.



Le milieu

• La zone montagneuse est formée par deux chaînes parallèles qui s’étendent d’est en ouest, séparées par la grande dépression du río Motagua ; près de la frontière mexicaine, les hauts plateaux des Altos Cuchumatanes et de l’Alta Verapaz font suite à la Sierra Madre de Chiapas ; la dépression du Motagua est dominée au sud par une série de volcans (Tacaná, 4 064 m ; Tajumulco, 4 210 m) alternant avec des plateaux couverts de laves (Altos), des bassins remplis de cendres et des dépôts lacustres (Atitlán, Amatitlán), qui s’étendent parallèlement au Pacifique.

• La plaine côtière, ou Boca Costa, s’étire le long de l’océan Pacifique jusqu’à l’axe volcanique.

• La grande plaine de Petén, au nord, est un prolongement de la plate-forme yucatèque.

Le climat et la végétation sont déterminés à la fois par la latitude et par l’altitude ; le climat, tropical, est caractérisé par une saison de pluies plus ou moins intenses de mai à octobre et une saison sèche d’octobre à mai (coupée parfois par une petite saison de pluies de décembre à février sur les versants soumis aux vents venus de l’Atlantique). Trois étages de végétation marquent le paysage (végétation tropicale sur les côtes, en terre chaude ; semi-tropicale jusqu’à 1 800 m ; d’altitude avec des conifères au-dessus de 1 800 m, en terre froide).

Les températures varient considérablement avec l’altitude. À Guatemala, à 1 500 m, les moyennes mensuelles oscillent entre 17 et 20 °C.

H. R. A.


L’histoire

Le plus septentrional des pays d’Amérique centrale, héritier de la prestigieuse civilisation maya (v. Mayas), n’est véritablement revenu à l’histoire qu’au xixe s. pour y connaître une existence agitée. Marqué du double sceau de la dépendance externe et du colonialisme interne, il assume avec difficulté l’héritage économique et social du xixe et du xxe s.


La capitainerie générale

La conquête espagnole commence en 1523-24, sous le commandement des lieutenants de Hernán Cortés, et s’achève avant la fin du siècle ; elle entraîne, comme dans toutes les régions densément peuplées, un effondrement démographique qui se poursuit au xviie s. ; le xviiie s. est marqué par la reprise économique et démographique. Jusqu’à l’indépendance, le Guatemala est une capitainerie générale dans la mouvance nominale du vice-roi de Mexico.


Les Provinces-Unies de l’Amérique centrale

Épargné par les guerres civiles qui ravagent le Mexique entre 1810 et 1821, le Guatemala imite son puissant voisin et reconnaît l’autorité d’Agustín de Iturbide (1783-1824), proclamé en 1822 empereur du Mexique. Lorsque, en 1823, Iturbide est déposé, les chefs de garnison de l’ancienne armée royale qui lui gardaient leur loyauté détachent le Guatemala du Mexique. L’indépendance est l’œuvre d’un petit groupe d’aristocrates créoles et s’est faite sans un coup de fusil. Naissent alors les Provinces-Unies de l’Amérique centrale (nov. 1824), condamnées à l’éclatement par les rivalités entre libéraux et conservateurs, identifiées à l’opposition du Guatemala, vivant en économie semi-autocratique, la minorité espagnole dominant la majorité indienne, et du Salvador métis, commerçant, exportateur.

Alors que les libéraux sont au pouvoir, une rébellion indienne de la montagne guatémaltèque permet à Rafael Carrera (1814-1865), chef de guerre métis, de parvenir au pouvoir. Il conquiert tout le pays et le fait sortir de la fédération, qui se disloque (1839), puis gouverne jusqu’à sa mort, allié aux conservateurs, qui ont commencé par redouter le chef de la plèbe indienne.