Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
G

Grande-Bretagne (suite)

Le premier souci de Harold Wilson est de remettre en marche l’économie britannique ; la situation qu’il trouve à son arrivée au pouvoir était grave, car le déficit de la balance des paiements est beaucoup plus considérable que ne l’ont laissé entendre les conservateurs. En accord avec les syndicats, une politique d’austérité permet de freiner la hausse des prix. Ensuite un effort très sérieux est entrepris dans le domaine industriel, avec la création de l’Industrial Reorganization Corporation, chargée de rationaliser la production industrielle et d’en favoriser la modernisation. C’est d’ailleurs dans cette optique plutôt que pour satisfaire aux exigences d’un socialisme tout théorique que l’industrie sidérurgique est renationalisée.

Malgré ces mesures, la crise persiste, et Harold Wilson et son chancelier de l’Échiquier, James Callaghan, n’hésitent pas devant deux décisions pénibles pour l’opinion britannique. Tout d’abord, en 1966, ils demandent l’entrée de la Grande-Bretagne dans le Marché commun : mais, de nouveau, la France s’y oppose, faisant valoir que la Grande-Bretagne n’est prête ni à rompre ses liens préférentiels avec les pays du Commonwealth ni à mettre fin à ses relations privilégiées (dans le domaine militaire en particulier). En 1967, c’est la dévaluation de la livre, la troisième effectuée par un gouvernement travailliste : cette dévaluation de 14,3 p. 100 est certes une mesure nécessaire, qui favorise la relance de l’industrie britannique, mais elle a un effet néfaste sur l’opinion.

La situation des travaillistes commence d’ailleurs à se détériorer à partir de 1968. Ayant déjà à faire face à l’hostilité des industriels, opposés à leur intervention constante dans le domaine économique, ils sont affaiblis par des dissensions internes et par une série d’événements extérieurs (guerre du Biafra, rupture des relations avec la Rhodésie d’Ian Douglas Smith, décision de retirer toutes les troupes britanniques stationnées à l’est de Suez). Menés par Edward Heath*, les conservateurs remportent les élections de 1970.


Le gouvernement Heath

Les conservateurs essaient à leur tour de régler le problème économique du Royaume-Uni. Sur le plan commercial et financier, le succès est certain : en 1971 et en 1972, la balance des paiements se retrouve excédentaire. Sur le plan industriel, le succès est beaucoup plus nuancé : désireux de réduire au minimum l’intervention de l’État, le gouvernement supprime l’Industrial Reorganization Corporation. Mais les difficultés de certaines des firmes les plus importantes de l’industrie britannique (Rolls-Royce, les chantiers de la Clyde, constructions navales) obligent les conservateurs à renoncer à une stricte application de leurs principes et à aider certaines firmes. Surtout, en 1971 et en 1972, le nombre des chômeurs dépasse de nouveau le million, comme aux jours sombres des années 20.

Sur un point au moins, le gouvernement conservateur remporte un succès décisif. Malgré l’opposition des travaillistes (d’ailleurs partagée entre une tendance proeuropéenne minoritaire, menée par Roy Harris Jenkins, et une majorité antieuropéenne), il réussit à faire entrer la Grande-Bretagne, en même temps que l’Irlande et le Danemark, dans le Marché commun (1er janvier 1973). Il est vrai que l’opposition des travaillistes ne porte pas sur le principe de l’adhésion, mais sur les conditions acceptées par le Premier ministre et qui impliquent un choix très net en faveur de l’Europe au détriment de certains pays du Commonwealth.

Mais le plus gros souci du gouvernement conservateur est sans doute la question d’Irlande*, qui a resurgi au premier plan de l’actualité en 1969. Depuis le partage de 1920, la communauté catholique de l’Ulster a vu croître le nombre de ses membres, au point que le tiers des habitants de l’Ulster étaient catholiques en 1969. Que ce soit sur le plan politique ou sur le plan social, la communauté catholique se sent de plus en plus tenue à l’écart par les protestants. À partir de 1969, des émeutes continuelles obligent bientôt à l’envoi de troupes britanniques, surtout lorsque l’I. R. A. (Irish Republican Army), basée en Irlande, se mêle à l’agitation. La situation devient si grave que, le 24 mars 1972, Londres prend directement en main l’administration de l’Irlande du Nord.

J.-P. G.

➙ Angleterre / Anglicanisme / Bretagne / Charisme / Commonwealth / Conservateur (parti) / Écosse / Empire britannique / Europe / Fabiens / Galles (pays de) / Guerre mondiale (Première) / Guerre mondiale (Seconde) / Hanovre (dynastie de) / Industrielle (révolution) / Irlande / Libéral (parti) / Révolution anglaise / Sept Ans (guerre de) / Stuarts / Travailliste (parti) / Windsor.
V. également au nom des principaux souverains et hommes d’État britanniques.

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