Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
G

génétique (suite)

On conçoit que la consanguinité augmente, pour deux individus donnés, la probabilité de posséder en commun un gène pathologique hérité de l’ancêtre commun. Soit un individu hétérozygote Aa pour le gène de l’albinisme : la probabilité pour lui d’épouser un autre hétérozygote, s’il épouse un individu non apparenté, est de 1 pour 50, c’est-à-dire la fréquence des hétérozygotes dans la population ; s’il épouse une cousine germaine, la probabilité d’épouser un hétérozygote est de 1/4. Dans le premier cas, le risque de voir naître un albinos est de 1/50 × 1/4 = 1/200. Dans le second cas, ce risque est de 1/4 × 1/4 = 1/16. Le risque est donc augmenté par un facteur de 12. L’élévation du taux de consanguinité est d’autant plus forte que la maladie est plus rare ; ce taux est de 1,2 p. 100 pour une maladie dont la fréquence est de 1 pour 400 et de 1,8 p. 100 pour une maladie dont la fréquence est de 1 pour 40 000. Dans la population générale, dans nos civilisations, il est inférieur à 1 p. 100.

Si l’on recense tous les malades d’une population, la fréquence dans l’ensemble de leur fratrie est supérieure à 0,25, car on ne recense, par nécessité, que les fratries qui n’ont pas de malades, mais où il aurait pu en survenir du fait de la constitution génique des parents. Par des artifices de calculs, il est possible, comme dans le cas des maladies dominantes, de corriger cet excès et de ramener la fréquence vraie à 0,25.

On connaît à l’heure actuelle près de 650 maladies récessives autosomiques (fig. 4). Elles comprennent la grande majorité des maladies métaboliques (v. plus loin) ainsi que des malformations telles que la pycnodysostose, ou maladie de Toulouse-Lautrec, caractérisée par une absence de fermeture des fontanelles, une atrophie de l’angle de la mâchoire, un nanisme et une fragilité osseuse. Une forme de nanisme grave entraînant la mort au cours des premières semaines de la vie est le nanisme dyastrophique. Certaines formes de malformations congénitales sont caractérisées par une dysmorphie faciale : tel le gargoylisme, rappelant l’aspect de gargouille.


Hérédité récessive liée au sexe

Le sexe de l’individu est déterminé par les chromosomes sexuels (fig. 5). Dans l’espèce humaine, comme chez la plupart des Mammifères, le sexe masculin est hétérogamétique, puisqu’il possède deux chromosomes sexuels différents X et Y. La femme est homogamétique XX. Les gamètes produits par la femme possèdent tous un X. En revanche, les gamètes mâles sont de deux types : l’un avec un X et l’autre avec un Y. Ces deux types sont produits avec une même fréquence. Après fécondation, il y a production d’un nombre égal de zygotes mâles et femelles. En réalité et pour des raisons qui sont très mal connues, la sex-ratio à la naissance est de 0,515 garçons pour 0,485 filles.

On discute encore pour savoir si l’X et l’Y ont une portion commune. Quoi qu’il en soit, les caractères dits « liés au sexe » sont déterminés par des gènes situés dans une portion non homologue de l’X. Le chromosome Y a un rôle masculinisant, mais on ne connaît pas son contenu génique. On pense qu’il comporte des gènes responsables de caractères somatiques tels que l’hypertrichose de l’oreille, mais ceux-ci ne sont pas démontrés avec certitude. Ils obéissent aux lois de l’hérédité holandrique, c’est-à-dire qu’ils ne se manifestent que chez les hommes et chez tous les descendants mâles des hommes atteints.

Les lois de l’hérédité récessive liée au sexe sont les suivantes :
— les maladies récessives liées au sexe se manifestent le plus souvent chez les garçons seulement (car ils ne possèdent qu’un seul X) ;
— en règle générale, les garçons atteints naissent de l’union d’une femme hétérozygote, ou transmettrice saine, mais porteuse du gène, et d’un homme normal ;
— en moyenne, dans la fratrie des malades, la moitié des sœurs sont également transmettrices comme leur mère et les autres sont normales, ainsi que leur descendance. Quant aux garçons, la moitié sont atteints et les autres sont sains, ainsi que leur descendance.

Ces faits sont illustrés par le schéma de la figure 6.

La descendance des hommes atteints comprend des garçons qui sont tous indemnes, eux et leur descendance, puisqu’ils reçoivent leur X de leur mère, et des filles qui sont toutes transmettrices.

La seule façon pour qu’une fille soit atteinte est qu’elle naisse d’un père atteint et d’une mère conductrice. Cette union est évidemment très rare. On a pu la réaliser expérimentalement chez les Chiens, où l’on a obtenu ainsi des chiennes hémophiles.

On connaît à l’heure actuelle près de 150 caractères et maladies liés au sexe. Parmi les caractères normaux les plus remarquables citons un groupe sanguin, le groupe Hxg ; le gène responsable de la synthèse d’une enzyme importante dans le métabolisme du sucre est la glucose-6-phosphate-déshydrogénase. Parmi les maladies, la plus célèbre est évidemment l’hémophilie, dont on connaît en fait deux formes : l’hémophilie A et l’hémophilie B. C’est cette dernière, semble-t-il, qui a frappé un grand nombre des descendants de la reine Victoria, tant parmi les tsars de Russie que parmi les rois d’Espagne (fig. 7). Dans la littérature, on trouve citées plusieurs familles de grandes dimensions dans lesquelles l’hémophilie a frappé maints descendants mâles : les familles Mempel, Botte, Kieffer et Hossli comptaient respectivement 213, 219, 298 et 400 membres atteints. Klug a étudié en 1926 la famille fameuse des Mempel, originaire de Kirchheim, près de Stuttgart. Il n’existe plus de Mempel dans cette ville, car ils ont tous émigré aux États-Unis, où leur trace a été perdue ; mais Klug a pu examiner 52 membres qui appartenaient à la famille Teutsch, descendant d’Elisabeth Mempel, née en 1821, et à la famille Wendling, descendant d’Anna Mempel, née en 1830. De ces 52 descendants, 20 garçons étaient hémophiles, et toutes les filles indemnes.