Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
G

Gaule (suite)

La Gaule romaine

L’occupation romaine de l’ensemble de la Gaule, au milieu du ier s. av. J.-C., va imposer les conceptions esthétiques romaines. C’est sous le règne d’Auguste que la Gaule sera organisée, et elle se romanisera en profondeur au cours des deux premiers siècles de notre ère.

De nombreuses villes sont bâties sur le plan romain orthogonal, avec forum, temples, théâtres et amphithéâtres. Pour alimenter les cités en eau, on construit aqueducs (pont du Gard, Jouy-aux-Arches, Autun*), viaducs (Arcueil), siphons (Vaison-la-Romaine), châteaux d’eau et fontaines (Nîmes*). Les temples, Maison carrée à Nîmes, d’époque augustéenne, Vienne*, Autun (temple de Janus), sont de type romain. Des « arcs de triomphe » de caractères triomphal et funéraire (Saint-Rémy-de-Provence), triomphal (Orange, Arles*, Carpentras), commémoratif (Besançon, Cavaillon, Saintes, Reims, Mayence) couvrent la Gaule. Si l’on ne connaît qu’un seul cirque (Vienne), les théâtres, amphithéâtres et odéons subsistent en nombre : théâtres classiques (Arles, Vaison, Orange), amphithéâtres typiquement romains (Nîmes, Arles), théâtres de sanctuaires (Avenches, Champlieu, Augst, théâtre des mystères de Cybèle à Vienne), amphithéâtres à scène (Grand, Lutèce), odéons (Vienne, Lyon). Des cryptoportiques, galeries souterraines (Arles, Reims, Bavay*), sont souvent annexés aux forums ou à des palais (palais du procurateur du iie s. à Trèves) ; on ne sait s’ils servaient de magasins à huile, vin et grains pour la population ou s’ils étaient utilisés pour la promenade publique.

Près du forum sont aussi bâties des basiliques, grandes salles à plusieurs travées où se tenaient les tribunaux et les assemblées municipales. Lorsque Trèves devint capitale impériale, Constantin (ive s.) y éleva une basilique qui servit de salle du trône (aula palatina).

À de rares exceptions près (thermes de la rue des Clercs à Metz, du ier s.), les thermes datent de la fin du iie s. et des deux siècles suivants. Ces vastes monuments à voûtes et à coupoles, revêtus de marbre, sont élevés dans les villes pour l’agrément du public (Metz, Trèves) ou dans des lieux de pèlerinage ou de cure (Champlieu, Sceaux-du-Gâtinais, où les thermes sont à côté du théâtre).

Dans les campagnes, le « fundus », domaine de moyenne importance, et la riche « villa » se développent au détriment des villages agricoles indigènes. L’un des rares monuments gaulois originaux est le « fanum », petit sanctuaire campagnard constitué en général par une cella et un mur de clôture.

Alors que l’architecture reste typiquement romaine, la sculpture révèle des courants plus indépendants, parallèlement à une statuaire de conception romaine. Cette dernière apparaît dès le ier s. av. J.-C. avec les bas-reliefs du mausolée de Saint-Rémy-de-Provence et les portraits funéraires de Nîmes, contemporains de la « tarasque de Noves » et des dernières sculptures d’Entremont. L’époque archaïque gallo-romaine (règnes d’Auguste et Tibère) est marquée par trois tendances : augustéenne (style de l’Ara Pacis à Rome), dont on trouve l’influence dans les autels d’Apollon et des Cygnes d’Arles ; néo-attique, visible dans les trophées de Saint-Bertrand-de-Comminges ; italique, sensible dans les sculptures du mausolée de Saint-Rémy et de l’arc d’Orange. Sous le règne de Claude, on parvient à un classicisme dans le pilier à quatre dieux de Paris, le couple d’Esus et de la déesse mère de Néris-les-Bains, le pilier de Dijon ; cependant, dans des œuvres comme les sculptures du pilier de Mavilly ou les déesses assises de Gissey-sur-Ouche, on retrouve le style hiératique et graphique propre aux Celtes.

Après un courant baroque qui se manifeste dans la sculpture de la seconde moitié du ier s., le siècle suivant connaît un renouveau d’influence grecque (tête du temple de Montmartre près d’Avallon ou sculptures de Sens : nymphe, cycle d’Iphigénie). Par contre, dans la seconde moitié du siècle, se dessine un courant réaliste dans la sculpture funéraire (Neumagen, Arlon). Le iiie s. se partage entre le style baroque sévérien (reliefs des travaux d’Hercule de Martres-Tolosane) et le néo-classicisme des écoles rhénanes. C’est au cours de ce siècle que l’art gaulois retrouve son originalité face à la décadence de l’art romain (groupe de Jupiter cavalier à l’anguipède [musée d’Épinal], stèles et portraits funéraires...).

Au ive s., l’art cherche à exprimer la profondeur spirituelle et la majesté impériale ; cet idéalisme, qui annonce l’art byzantin, se trouve en particulier dans les figures de Trèves. Une réaction néo-classique clôt ce siècle, qui voit la décadence et la fin de l’art gallo-romain, en partie à la suite de l’iconoclasme de saint Martin et de ses disciples.

On se doit encore de signaler deux formes d’art dans lesquelles les Gallo-Romains n’ont pas manqué de talent : la verrerie se développe à partir du ier s. et atteint son apogée à la fin du siècle suivant sous l’impulsion des verriers venus de Syrie ; la céramique sigillée, imitée de la céramique italienne à décor moulé de Pouzzoles et surtout d’Arezzo, connaît un grand essor et des développements originaux à partir du iie s. grâce aux ateliers de la Gaule centrale (Allier, Lezoux, la Graufesenque) et aux officines de l’Est (Mettelbronn, Blickweiler, Trèves, Luxeuil-les-Bains, l’Argonne). Cette céramique à reliefs disparaît au ive s. pour être remplacée par une poterie décorée à l’aide d’une roulette selon une technique remontant à l’époque gauloise.

G. R.

 E. Espérandieu et R. Lantier, Recueil général des bas-reliefs, statues et bustes de la Gaule romaine (Leroux et P. U. F., 1907-1966 ; 15 vol.). / A. Grenier, Manuel d’archéologie gallo-romaine (A. Picard, 1932-1960 ; 7 vol.). / A. Varagnac, A.-D. Tolédano, G. Fabre et M. Mainjoner, Art gaulois (Zodiaque, La Pierre-qui-Vire, 1956). / G. Fabre et M. Mainjonet, Monnaies gauloises (Zodiaque, La Pierre-qui-Vire, 1957). / J.-J. Hatt, Sculptures gauloises (Éd. du Temps, 1966) ; Celtes et Gallo-Romains (Nagel, 1970). / F. Benoit, Art et dieux de la Gaule (Arthaud, Grenoble, 1969).