Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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France (suite)

Les institutions

Il n’y a pas d’État dans sa forme antique ; le roi considère le royaume comme son patrimoine et dirige ses sujets comme un propriétaire ses paysans. Ses serviteurs constituent un embryon d’administration (maréchal, sénéchal, maire du palais) ; en province, le comte a les pouvoirs du roi (sauf la justice, rendue par les prud’hommes). Mais les évêques sont d’autres agents du pouvoir royal.


Structures sociales

• La tradition germanique fait de tout homme libre un guerrier, protégé par un wergeld supérieur ; mais les plus riches propriétaires gallo-romains sont aussi astreints au service militaire.

• Le personnel dirigeant, laïque ou ecclésiastique, sort généralement de l’aristocratie gallo-romaine ou franque ; les deux aristocraties fusionnent par des mariages.


Civilisation

• La vie rurale reste dominante, la forêt recouvrant encore d’immenses espaces. Les grands domaines à la romaine constituent toujours la principale forme d’exploitation. Cependant, une classe de petits propriétaires, possesseurs de « manses », se développe sous l’influence germanique. Le monachisme, revigoré à la fin du vie s. par les Irlandais (Colomban, fondateur de Luxeuil, v. 590), puis par les Bénédictins, s’inscrit naturellement dans l’existence paysanne.

• Les villes se maintiennent, mais elles perdent leur rôle administratif et commercial pour ne garder que le double caractère militaire et religieux.

• La vie reste précaire par suite du manque d’hygiène, des épidémies et de l’insécurité chronique. Aussi les populations cherchent-elles des protecteurs : évêques, abbés, guerriers, saints et même encore divinités païennes.

• Si les monastères s’érigent en puissances économiques et foncières, ils deviennent aussi les foyers d’un art et d’une culture largement tournés vers l’extérieur.


Les Carolingiens*


Les grands Carolingiens

• 741-768 : Pépin* le Bref.

Fondateur de la dynastie carolingienne, il est couronné roi des Francs par saint Boniface (751). Il écrase les Lombards et donne au pape la région de Ravenne. Il conquiert la Septimanie sur les Arabes et annexe l’Aquitaine à son royaume.

• 768-814 : Charlemagne*.

C’est l’apogée de l’État carolingien. Charlemagne, protecteur de la papauté, est couronné empereur d’Occident par le pape Léon III à Rome (800) ; il devient ainsi le chef temporel de la chrétienté. Création d’un empire de l’Èbre à l’Elbe. Annexion de la Lombardie (Didier, vaincu à Pavie, 774) et de la Bavière (788). Soumission des Saxons (772-804) et des Avars en Pannonie (791-805). Échec en Espagne : massacre de Roland à Roncevaux et conquête limitée à la Catalogne.


Démembrement de l’Empire sous les successeurs de Charlemagne

• 814-840 : Louis* Ier le Pieux.

Il ne peut maintenir la cohésion de son empire face à la révolte de ses fils : Lothaire Ier (empereur, 840-855), Louis le Germanique (roi des Francs orientaux [817-843], puis de Germanie [843-876]), Charles le Chauve (roi de France, 840-877) ; succession de partages et de luttes fratricides ; alliance de Louis et Charles par le serment de Strasbourg, et partage de l’Empire par le traité de Verdun (843).

• 840-877 : Charles* le Chauve, premier roi de France (Francia occidentalis). Décadence de l’Empire carolingien, nouvelles vagues d’invasions : raids sarrasins en Provence, razzias des Normands. Le règne est marqué par la naissance de principautés territoriales, désormais aux mains des grandes familles.

• 877-884 : Louis II le Bègue (877-879), Louis III et Carloman (879-882), Carloman seul (882-884).

• 884-887 : régence du royaume à Charles* III le Gros, roi de Germanie, incapable de conjurer le péril normand.

• 888 : couronnement du comte Eudes, défenseur de Paris, roi de 888 à 898. Après lui, la couronne de France alterne entre ses descendants (Robertiens) et les Carolingiens : Charles III le Simple (898-922/23), Robert Ier (922-23), Raoul de Bourgogne (923-936), Louis IV d’Outremer (936-954), Lothaire (954-986), Louis V (986-87).

• 911 : installation des Normands en Normandie (traité de Saint-Clair-sur-Epte).

• 987 : mort du dernier souverain carolingien et élection de Hugues Capet. Début de la dynastie capétienne.


Les institutions carolingiennes

• L’Empire est divisé en comtés, mais le territoire franc constitue un conglomérat d’entités beaucoup plus vastes dont les particularismes sont battus en brèche par l’œuvre carolingienne d’assimilation, d’uniformisation et d’unification. Des marches sont créées sur les frontières ; une assemblée générale annuelle réunit l’aristocratie.

• Tentative de gouvernement direct d’un roi itinérant : envoi en province d’enquêteurs (missi dominici), réunions régulières des grands propriétaires, qui ratifient les décisions impériales et rendent la justice.

• Faiblesse du système : l’administration reste embryonnaire ; pas d’impôt (les ressources sont fournies par les propriétés personnelles des souverains) ; les comtes sont pratiquement indépendants ; l’anarchie prépare les voies à la féodalité*.

• Importance de l’Église comme instrument de gouvernement et guide de la civilisation ; évêques et surtout moines sont les éléments essentiels de la Renaissance carolingienne (lettres et arts).


Tournant dans la vie économique

• L’introduction de la vassalité et du « bénéfice » dans l’organisation de l’État constitue l’une des réalisations majeures des Carolingiens : elle donne naissance à la féodalité.

• La véritable base matérielle du pouvoir carolingien réside dans les domaines royaux qui, par leur mode d’exploitation, leur structure et leur rôle économique, forment le type des zones de grande propriété, caractéristiques de l’époque carolingienne ; de nombreux esclaves (serfs) y sont employés. À ces domaines royaux, il faut joindre les grands domaines ecclésiastiques du nord de la Loire (Saint-Germain-des-Prés) issus de donations royales ou aristocratiques.

• À coté de « manses » serviles se développent des « manses » libres.

• Le sud de la Loire et l’ouest de la France sont peu peuplés ; le Bassin parisien, au contraire, est fortement peuplé.

• Si l’économie du domaine s’ouvre sur le commerce, celui-ci reste limité, les maigres capitaux du travail paysan n’étant guère investis d’une manière productive par l’aristocratie.