Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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faillite (suite)

Après la rédaction du Code de commerce, la faillite est réformée en 1838, puis par la loi du 4 mars 1889 instituant la liquidation judiciaire, régime adouci applicable aux commerçants de bonne foi, enfin, depuis le début du siècle, par une longue série de lois et de décrets. La procédure de la faillite fonctionnait en effet difficilement, le développement des sociétés assurant une certaine impunité aux dirigeants. Divers textes instituent alors des sanctions, mais se trouveront déformés dans leur application car ils ont pour effet de confondre le sort de l’entreprise et celui des dirigeants.

Le mérite de la loi française du 13 juillet 1967 est de poser une distinction nette entre l’entreprise et ses dirigeants. Conformément aux tendances actuelles du droit, la situation de l’entreprise* est désormais jugée selon un critère purement économique, qui conduit le tribunal à prononcer le règlement judiciaire si elle est apte à survivre, la liquidation des biens sociaux dans le cas contraire. À l’inverse, la situation des dirigeants de l’entreprise est réglée, elle, d’après un critère exclusivement moral : le tribunal ne prononce des sanctions — notamment la faillite personnelle — à leur encontre que si des fautes leur sont reprochées. Ainsi, la faillite comme peine privée frappe seulement les commerçants* ou dirigeants d’entreprise malhonnêtes.


Le sort de l’entreprise : mise en liquidation des biens et règlement judiciaire


Les conditions d’ouverture de la liquidation des biens et du règlement judiciaire

• La qualité du débiteur. Le débiteur doit être commerçant personne physique, commerçant personne* morale, c’est-à-dire société* commerciale, ou associé indéfiniment et solidairement responsable du passif d’une société* en liquidation de biens ou en règlement judiciaire. Enfin, depuis la loi du 13 juillet 1967, il peut être une personne morale de droit privé non commerçante (société civile, coopérative agricole, association*...).

• La cessation de paiements du débiteur. Elle résulte du non-paiement d’une dette échue, non litigieuse, commerciale, ou même civile depuis 1967. La preuve en incombe à celui qui demande la liquidation des biens ou le règlement judiciaire.

• Le jugement du tribunal. La liquidation des biens ou le règlement judiciaire peuvent être demandés au tribunal de commerce si le débiteur est commerçant, ou au tribunal de grande instance s’il s’agit d’une personne morale civile, soit sur requête par le débiteur lui-même, soit par un créancier. Le tribunal peut également se saisir d’office.

Après avoir examiné la situation du débiteur, le tribunal prononce le règlement judiciaire si l’entreprise semble pouvoir survivre et si le débiteur est apte à présenter un concordat sérieux ; dans le cas contraire, il prononce la mise en liquidation des biens. Il fixe la date de la cessation des paiements, qui ne peut être antérieure de plus de dix-huit mois au prononcé du jugement. La « période suspecte » s’étend entre cette date et celle du jugement, la masse des créanciers pouvant demander que lui soient déclarés inopposables certains actes passés par le débiteur durant cette période (donations*, paiements de dettes non échues, dations en paiement, sûretés* constituées pour des actes antérieurs...).

Enfin, le jugement désigne les personnes chargées de représenter ou de contrôler le débiteur et de suivre la procédure.

La suspension provisoire des poursuites et l’apurement collectif du passif

Cette procédure a été instituée par l’ordonnance du 23 septembre 1967, à l’effet d’éviter la disparition d’entreprises importantes pour l’économie régionale tout en sauvegardant les intérêts des créanciers. Le tribunal est saisi par les créanciers ou le débiteur, il peut également se saisir d’office. Après rapport d’un juge sur la situation économique et financière de l’entreprise, le tribunal rend un jugement qui suspend toute poursuite individuelle des créanciers pour un délai maximal de trois mois. Durant ce délai est établi un plan d’apurement collectif du passif qui deviendra opposable à tous les créanciers s’il est accepté par le tribunal. À défaut d’exécution de ses engagements par le débiteur, le plan sera résolu et le tribunal devra prononcer l’ouverture de la procédure de règlement judiciaire ou de liquidation des biens.


Les conséquences du prononcé de la liquidation des biens ou du règlement judiciaire
La procédure préparatoire

• Formation de la masse des créanciers et suspension des poursuites individuelles. Au jour du jugement, tous les créanciers du débiteur sont unis légalement et de plein droit en une masse dotée d’une personnalité morale, représentée par un syndic et disposant d’une hypothèque légale sur les immeubles du débiteur. Le droit de poursuite individuelle des créanciers contre leur débiteur est alors suspendu, à l’exception du droit de ceux qui disposent d’une sûreté réelle.

Cependant, chaque créancier conserve un droit de regard dans l’organisation du règlement judiciaire ou de la liquidation des biens et dispose du droit de vote aux assemblées de la masse.

• Vérification et admission des créances*. Dans les quinze jours suivant le prononcé du jugement, chaque créancier, même privilégié, doit remettre au syndic une déclaration du montant des sommes réclamées. Dans les trois mois du jugement a lieu la vérification des créances, faite par le syndic, assisté éventuellement de contrôleurs et en présence du débiteur. L’état présenté par le syndic est ensuite vérifié par le juge-commissaire, qui tranche les contestations soulevées. Les réclamations et contestations concernant l’état définitif des créances déposé au greffe sont, enfin, portées devant la juridiction compétente.

• Dessaisissement du débiteur. En cas de mise en liquidation des biens, le débiteur est dessaisi de l’universalité de son patrimoine, dont la gestion est assurée par le syndic. En cas de règlement judiciaire, le débiteur est simplement assisté par le syndic pour tous les actes concernant l’administration et la disposition de ses biens.

La continuation de l’exploitation du débiteur peut être décidée par le juge-commissaire en cas de règlement judiciaire. Dans la liquidation des biens, cette décision revient au tribunal, qui ne l’autorise que pour une courte période et si l’intérêt public, ou celui des créanciers, l’exige.