Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

Égypte (suite)

L’architecture funéraire, peu étudiée jusqu’ici, semble plus hybride encore. Certes, la belle tombe de Petosiris à Tounah el-Gebel, datant de la fin du ive s. av. J.-C., est de conception purement égyptienne, mais il n’en va plus de même pour le reste de cette nécropole de la ville d’Hermopolis. En ce qui concerne les hypogées des nécropoles d’Alexandrie comme ceux du quartier de Kūm al-Chaqāfa, remontant aux Antonins ou aux Sévères, leur plan ne doit plus rien à l’Égypte pharaonique.

La statuaire combine également les éléments classiques et égyptiens en un amalgame souvent malheureux. Les représentations des divinités isiaques sont particulièrement typiques de ce style hybride ; malgré leurs emprunts à l’Égypte, elles relèvent plutôt de l’art classique.

Le relief suit la même évolution, mais de façon plus accusée. Au début de l’époque ptolémaïque, la décoration de l’Iseum de Béhbet el-Hagar se poursuit dans la meilleure tradition égyptienne. Mais l’élégance tend vers une certaine afféterie, et le travail en méplat des époques antérieures est abandonné pour des modelés trop accusés. Les reliefs accompagnés d’inscriptions envahissent les murs des temples. Les thèmes sont exclusivement religieux ou mythologiques : c’est un précieux conservatoire de tout ce qu’a élaboré la pensée théologique égyptienne depuis ses origines.

Dans les nécropoles d’Alexandrie, la décoration se fait hybride, combinant des thèmes syncrétiques. Plus originaux sont les portraits sur bois de l’époque romaine qui ont été retrouvés dans la région du Fayoum*, fixés sur les cercueils des momies ; tous ont en commun des couleurs chaudes et un regard qui fixe l’éternité.

Lorsque l’Empire romain d’Orient se sépara de l’Empire d’Occident, la civilisation égyptienne avait déjà cessé d’exister. Si l’art pharaonique avait su composer d’une certaine façon avec le monde classique, la victoire de la religion nouvelle, le christianisme (v. copte [art]), n’avait pu qu’être fatale à cet art. si original qui, durant trois millénaires, était demeuré consubstantiel à son pharaon et à ses dieux.

J. L.

➙ Amarna / Memphis / Nubie / Pyramides / Tanis / Thèbes / Toutankhamon.

 H. Fechheimer, Die Plastik der Ägypter (Berlin, 1920). / G. Jéquier, Manuel d’archéologie égyptienne, t. I : les Éléments de l’architecture (Picard, 1924). / S. Clarke et R. Engelbach, Ancient Egyptian Masonry (Londres, 1930). / N. M. Davies, Ancient Egyptian Paintings (Chicago, 1936 ; 3 vol.). / A. Hermann et W. Schwan, Ägyptische Kleinkunst (Berlin, 1940). / J. Capart, l’Art égyptien, t. II, 2e partie, « la Statuaire » (Vromant, Bruxelles, 1942). / J.-P. Lauer, le Problème des pyramides d’Égypte (Payot, 1948). / C. Aldred, Old Kingdom Art in Ancient Egypt (Londres, 1949) ; Middle Kingdom Art in Ancient Egypt, 2300-1590 B. C. (Londres, 1950) ; New Kingdom Art in Ancient Egypt during the Eighteenth Dynasty, 1590-1315 B. C. (Londres, 1951). / J. Vandier, Manuel d’archéologie égyptienne (Picard, 1952-1969 ; 7 vol.). / W. C. Hayes, The Scepter of Egypt (New York, 1953-1959 ; 2 vol.). / A. Lhote, les Chefs-d’œuvre de la peinture égyptienne (Hachette, 1954). / A. Mekhitarian, la Peinture égyptienne de l’époque des Pyramides à l’époque des Ramsès (Skira, 1954). / K. Lange et M. Hirmer, Ägypten (Munich, 1955 ; trad. fr. l’Égypte, sculpture, architecture, peinture, A. Colin, 1956). / W. Wolf, Die Kunsr Ägyptens (Stuttgart, 1957). / J. Leclant, Dans les pas des Pharaons (Hachette, 1958 ; 2e éd., 1967). / W. S. Smith, The Art and Architecture of Ancient Egypt (Harmondsworth, 1958). / A. Adriani, Repertorio d’arte dell’Egitto greco-romano (Palerme, série A, t. I et II, 1961 ; série C, t. I et II, 1966). / C. Desroches-Noblecourt et P. du Bourguet, l’Art égyptien (P. U. F., 1962). / J.-L. de Cenival, Ägypten (Munich, 1964). / A. Badawy, A History of Egyptian Architecture (Berkeley, 1966-1969 ; 3 vol.). / A. Bernand, Alexandrie la Grande (Arthaud, 1967). / K. Michalowski, l’Art de l’ancienne Égypte (Mazenod, 1968). / J. Yoyotte, les Trésors des Pharaons (Skira, 1968). / K. Parlasca, Repertorio d’arte dell’Egitto greco-romano (Palerme, 1969). / E. Riefstahl (sous la dir. de), Egyptian Sculpture of the Late Period, 700 BC to AD 100 (New York, 1969). / G. Thausing et H. Goedicke, Nofretari, eine Dokumentation der Wandgemälde ihres Grabes (Graz, 1971). / P. Du Bourguet, l’Art égyptien (Desclée De Brouwer, 1973).


L’histoire de l’Égypte Arabe


Les événements historiques

C’est entre 639 et 642 que l’Égypte est conquise par les Arabes. Le pays se dégage alors de l’orbite grecque pour s’engager progressivement dans une nouvelle civilisation, à l’épanouissement de laquelle il devait largement contribuer. La facilité déconcertante avec laquelle les Arabes assurent leur domination sur les rives du Nil s’explique essentiellement par la décadence des Byzantins, affaiblis par les longues guerres antérieures, et le mécontentement de la population égyptienne, écrasée par le fisc et brimée pour ses convictions religieuses monophysites.

Avec l’occupation arabe, le centre du pays est déplacé de la Méditerranée (Alexandrie) au Nil, sur les rives duquel on établit une nouvelle capitale connue sous le nom d’al-Fustāṭ. Très vite, la « province égyptienne » occupe les devants de la scène politique. C’est de ce pays que les meurtriers du calife ‘Uthmān ibn ‘Affān marchent sur Médine en 656. Après un bref intermède sous le calife ‘Alī, l’Égypte passe en 661 sous la domination des Omeyyades*. À leur chute, en 750, le pays est contrôlé par les ‘Abbāssides*. Pour assurer son administration, ces derniers délèguent des gouverneurs, d’abord arabes jusqu’en 856, puis turcs à partir de cette date.