Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

Écosse (suite)

• Jacques II (roi de 1437 à 1460). La minorité de Jacques II permit à la noblesse de reprendre le terrain perdu. Les grandes familles (Livingstone, Crichton, Douglas) s’arrachèrent le jeune prince, au nom duquel elles prétendaient gouverner. À partir de 1449, Jacques II gouverna en personne ; reprenant la politique de son père, il élimina les trop puissants Douglas. Mais il fut tué par l’explosion de l’un de ses canons devant Roxburgh, alors que, profitant de la guerre des Deux-Roses*, il s’apprêtait à envahir l’Angleterre.

• Jacques III (roi de 1460 à 1488). La minorité de Jacques III, malgré les efforts de James Kennedy († 1465), l’évêque de Saint Andrews et la plus haute figure de l’époque, vit se reproduire les mêmes troubles que celle de Jacques II. Jacques III se révéla incapable ; emprisonné une première fois par ses sujets en 1482, il fut tué en 1488 au cours d’une rébellion.

• Jacques IV (roi de 1488 à 1513). Ce n’est qu’avec Jacques IV que les Stuarts recueillirent sur le plan intérieur les fruits d’un siècle d’efforts ; ce roi capable et énergique réussit en effet à rétablir l’ordre et à perfectionner l’Administration écossaise. Mais l’Écosse n’en restait pas moins une puissance de second plan, quand Jacques IV se lança dans une politique aventureuse, renouant en 1512 l’alliance avec la France. L’Angleterre était sortie depuis longtemps des affres de la guerre des Deux-Roses, et les troupes de Thomas Howard, comte de Surrey (le roi Henri VIII était alors en France), écrasèrent les Écossais à la sanglante bataille de Flodden (9 sept. 1513), où Jacques IV trouva la mort avec presque toute la fleur de sa noblesse et plus de dix mille de ses sujets.


Les transformations de l’Écosse au xve siècle

Les quelques périodes de calme que ses rois avaient assurées au pays permirent une reprise de la vie économique. L’Écosse n’était, avant tout, qu’un pays exportateur de matières premières, mais cela suffit à faire naître dans les burghs une active bourgeoisie, qui, grâce aux préoccupations fiscales de la Couronne, avait accédé au Parlement dès le xive s. Par ailleurs, Jacques IV essaya de récupérer un certain nombre de terres tenues de la Couronne et qui ne lui devaient, selon la coutume féodale, que des redevances symboliques, pour les attribuer en « feu-ferme » à des agriculteurs entreprenants. Ainsi se développèrent en Écosse des classes moyennes qui vinrent équilibrer le poids exorbitant de la noblesse. Il est vrai que les bourgeois, pendant très longtemps, s’étaient cantonnés dans un rôle limité au Parlement, préférant ne s’occuper que des affaires des burghs ; il n’en fut plus de même au xvie s., où la physionomie du Parlement écossais fut profondément modifiée par l’apparition des représentants des petits barons et des tenanciers libres tenant leur terre directement du roi et ayant un revenu supérieur à 40 sous, tandis que les représentants de l’Église cessaient, du fait de la Réforme, de jouer un rôle important (cette situation ne fut officialisée qu’en 1587, elle existait en fait depuis les années 1560). En même temps, on assista à la floraison de la culture écossaise : elle fut facilitée par la création des universités Saint Andrews en 1413, Glasgow en 1451 et Aberdeen en 1494, grâce à l’évêque William Elphinstone. Poètes, tels que Robert Henryson (xve s.), William Dunbar (v. 1460 - v. 1520), et historiens, tels que John Barbour (v. 1325-1395), Andrew of Wyntown (v. 1350 - v. 1420) et Hector Boece (v. 1465 - v. 1536), témoignent de cette floraison.


La Réforme

Avec Jacques V (roi de 1513 à 1542), l’Écosse connut de nouveau une minorité difficile, au cours de laquelle s’opposèrent une faction pro-française et catholique, représentée par le régent Jean Stuart, duc d’Albany, et une faction pro-anglaise, admiratrice de la politique religieuse d’Henri VIII (représentée par le comte d’Angus). L’appartenance du jeune roi à la première inquiéta son puissant voisin, qui, en 1542, attaqua l’Écosse. Mais l’armée de Jacques V et les nobles ne voulaient combattre ni pour ce qu’ils appelaient une « guerre française » ni pour une Église dont les vices étaient éclatants. Les Écossais furent dispersés à Solway Moss : Jacques V mourut peu après (14 déc. 1542), une semaine après que la reine Marie de Lorraine eut donné le jour à Marie Stuart*.

L’Écosse se trouvait alors placée dans une situation inextricable, due surtout à la crise religieuse. Depuis que le théologien Patrick Hamilton avait été brûlé pour hérésie en 1528, la Réforme avait progressé au sein même d’une Église consciente de ses errements, comme dans la population. Or les protestants ne pouvaient compter que sur l’appui extérieur de l’Angleterre, intéressée et ombrageuse. En 1543, le comte d’Arran, régent d’Écosse, était le chef du parti protestant et anglophile : mais, à la première velléité d’indépendance, Henri VIII envoya Edward Seymour ravager le sud de l’Écosse (1544-1545), obligeant ainsi ses propres partisans à se rejeter vers les catholiques dans un effort illusoire d’union nationale ! La politique française qui appuyait les catholiques n’était guère habile : la morgue des troupes françaises venues aider à défendre l’Écosse leur aliéna les Écossais. L’envoi aux galères de John Knox*, le plus célèbre prédicateur protestant, n’arrangea rien. D’ailleurs, au traité de Haddington (1548), Marie Stuart fut fiancée au dauphin François ; dès lors, les Français, profitant de la faiblesse de l’Angleterre d’Édouard VI, devinrent les vrais maîtres de l’Écosse ; c’est seulement en 1560 que les nobles protestants réussirent à mettre en difficulté la régente Marie de Lorraine avec l’aide des troupes anglaises (Elisabeth Ire régnait depuis 1558).

Le traité d’Édimbourg (juill. 1560) reconnut la légitimité d’Elisabeth (alors que Marie Stuart, aux yeux des catholiques, pouvait prétendre au trône anglais) et régla un certain nombre de problèmes intérieurs à l’Écosse : mais Marie, qui rentra en Écosse en 1561, après la mort de son mari, François II, n’accepta pas ce traité. Si son charme soumit ses sujets pendant un temps, ses romanesques aventures allaient tout ruiner : elle épousa en 1565 Darnley, le rejeton de la plus puissante famille catholique, s’attirant ainsi la réprobation de ses sujets protestants. Le meurtre du conseiller italien de la reine, David Rizzio, à l’instigation de Darnley (1566), puis, en l’espace de quelques mois, le meurtre de Darnley, l’enlèvement de la reine (consentante) par Bothwell — l’assassin présumé de Darnley —, puis le mariage de Bothwell et de Marie firent déborder la coupe ; la reine dut se rendre aux nobles protestants en armes et abdiquer en faveur de son fils Jacques VI, tandis que le comte de Moray devenait régent (juin 1567). Marie s’enfuit en 1568 de sa prison : elle dut chercher refuge en Angleterre, où Elisabeth Ire la fit exécuter en 1587.