Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

échecs (suite)

La prise en passant

Lorsqu’un pion avance au départ de deux pas, il peut être pris par un pion ennemi se trouvant sur la case voisine de son arrivée, comme s’il n’avait avancé que d’un pas. Cette prise exceptionnelle s’appelle en passant et ne peut avoir lieu qu’entre pions et seulement au moment de leur départ.


La promotion

Arrivé à la dernière rangée au bout de sa marche, un pion a le privilège de se transformer obligatoirement en une figure de son choix et de sa couleur, sauf en roi. On peut donc, bien que rarement, avoir 2 ou plusieurs dames sur l’échiquier, 3 tours, 3 cavaliers, etc.


Le roque

Le roque est un mouvement mixte effectué simultanément et d’une façon exceptionnelle par deux pièces : le roi et l’une des tours. Le roque, que l’on exécute une seule fois au cours d’une partie, se décompose comme suit : on déplace le roi de deux cases sur la rangée et dans la direction de la tour, laquelle saute par-dessus le roi sur la case que celui-ci vient de franchir.

On ne peut roquer qu’en respectant plusieurs règles : 1o toutes les cases situées entre le roi et la tour sont vides ; 2o roi et tour du roque n’ont pas encore bougé ; 3o les cases de départ, de passage et d’arrivée du roi ne doivent pas être battues par une pièce ennemie.

Le petit roque s’effectue avec la tour du roi, le grand roque, avec la tour de la dame.


La partie

Elle se dispute entre 2 personnes ou 2 camps, que l’on désigne d’une façon générale par les mots : Blancs et Noirs.

Les Blancs commencent toujours et exécutent le premier coup en déplaçant une pièce (et une seule) ; les Noirs en font de même et cela se répète alternativement jusqu’à l’arrêt du combat.

Une partie peut également se terminer par un résultat nul ou par abandon avant d’arriver à l’échec et mat.


Le problème et les études

Ce sont des compositions artistiques qui développent certaines idées appelées thèmes. Les adeptes de cette branche des échecs sont moins nombreux, mais s’organisent en sociétés et fédérations qui éditent des revues et ouvrages consacrés uniquement à cette forme de création.


Notation

En posant l’échiquier correctement, de telle sorte que les 2 camps (blanc au sud, noir au nord) aient à leur droite une case angulaire blanche, on peut facilement déterminer les 64 cases de la façon suivante.

On désigne les 8 colonnes, en partant de gauche, par les lettres a, b, c, d, e, f, g et h, et les 8 rangées, en partant du sud, par les chiffres 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7 et 8. L’intersection d’une colonne et d’une rangée fixe le nom de la case.

Les initiales majuscules R, D, T, F, C et P (qu’il faut lire roi, dame, tour, fou, cavalier et pion) désignent les pièces. Les autres signes principaux sont — (se déplace), × (prend) et + (donne échec).

On exprime le déplacement d’une pièce par son initiale, sa case de départ, le signe — ou × et sa case d’arrivée (les mouvements de pions sont exemptés de l’initiale P), en ajoutant le signe + quand on donne échec, et l’on fait précéder cette expression par le numéro d’ordre correspondant aux coups blanc et noir.

Ainsi, en tenant compte du fait que les Blancs commencent toujours et que chaque camp joue à tour de rôle une seule pièce et un seul coup à la fois, on peut déjà écrire la partie la plus courte :
1. f2 — f4 é7 — é6 ;
2. g2 — g4 Dd8 — h4 + et mat.

Enfin, pour exprimer ce coup exceptionnel qu’est le roque, on emploie les formules o — o (petit roque, avec la Th1 ou la Th8) ou o — o — o (grand roque avec la Ta1 ou la Ta8).


Historique

L’origine des échecs (terme dérivé du persan chāh, roi) est encore mal connue, car elle ne s’appuie que sur des légendes.

Un point est cependant acquis : l’ancêtre du jeu actuel a été cultivé sous des formes diverses en Asie, dans les hauts plateaux d’où partirent, vers l’ouest, depuis des millénaires, tant de croyances et systèmes de pensée.

Duncan Forbes (History of Chess, 1860), A. Van der Linde (Geschichte und Literatur des Schachspiels, 1874), H. E. Bird (Chess History, 1890) et surtout H. J. R. Murray (A History of Chess, 1913) nous renseignent sur les éléments du chaturanga, de l’elephant et du chatrang, trois appellations du jeu d’échecs encore à l’honneur au ve s. de notre ère en Inde, en Chine et en Perse.

Au milieu du viie s., la conquête de l’Iran fait découvrir aux Arabes ce jeu, qu’ils adoptent et perfectionnent. Un siècle plus tard, ils l’introduisent en Europe. Les échecs jouissent d’une particulière faveur en Espagne, au Portugal et en Sicile, pays où les grands seigneurs et les rois les pratiquent avec ferveur. Bientôt, ce jeu se répand et gagne le nord et le centre de notre continent.

Au cours du transfert vers l’Occident, les échecs ont subi des mutations diverses. Le chariot s’est transformé en roq, ou tour, qui fut la pièce la plus forte au Moyen Âge. L’éléphant est devenu l’alphil. Mais les formes et les règles modernes sont fixées à l’époque de la Renaissance, où les dernières métamorphoses font apparaître la reine, ou dame, qui remplace le fers du jeu asiatique, et le fou, qui se substitue à l’alphil. Un immense essor est désormais assuré aux échecs, qui, de jeu des rois, deviennent peu à peu le roi des jeux, universellement aimé et respecté.


Les champions du monde

Dès la réforme des échecs opérée en Europe au xve s., les Arabes, invincibles jusqu’alors, furent éclipsés par les Occidentaux.

La pratique du noble jeu, répandue d’abord sur les rives de la Méditerranée, a permis aux représentants des pays limitrophes de commencer la longue lignée des champions reconnus comme tels par leurs contemporains.

Le premier grand joueur, le moine espagnol Ruy López de Segura, domine son époque et atteint l’apogée de sa force en battant à Rome, en 1559, tous ses adversaires de qualité. Mais il doit, quelques années plus tard, s’incliner à Madrid devant la supériorité incontestée des Italiens Giovanni Leonardo da Cutri (il Puttino) [1512-1585], Giulio Cesare Polerio et Paolo Boi (il Syracusano) [1528-1598].

La tradition italienne connaît au début du xviie s. de nouveaux triomphes. Gioacchino Greco (il Calabrese) [v. 1600 - v. 1635] impose sa suprématie dans son propre pays, puis en France, en Angleterre, en Espagne et même en Amérique du Sud, où il meurt.