Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

échanges internationaux (suite)

Le GATT a ainsi constitué un système d’abaissement mondial des tarifs ; il a contribué à démanteler des tarifs très élevés institués avant la guerre. Au cours des cinq conférences tarifaires (Genève, 1947 ; Annecy, 1948 ; Torquay, 1950-51 ; Genève, 1956 ; le Dillon Round, 1960-1962), environ 65 000 concessions tarifaires ont été négociées. Entre les premières négociations douanières et le Kennedy Round (1964-1967), les tarifs des pays industrialisés ont été diminués de 70 p. 100 environ, compte non tenu des réductions opérées au sein des unions douanières ou des zones de libre-échange. Ce désarmement tarifaire a naturellement donné une impulsion aux échanges internationaux. Le GATT s’est montré moins apte à libérer les échanges agricoles et à remédier aux problèmes commerciaux du tiers monde.


Obstacles à l’expansion des exportations des pays en voie de développement

L’ensemble des réductions tarifaires relatives aux produits industriels consécutives notamment à la négociation Kennedy est apparu comme ayant donné une impulsion considérable au commerce des pays développés. Par contre, dans plusieurs domaines importants, les mesures prises par les quatre principaux participants n’ont nullement écarté les obstacles tarifaires et autres obstacles commerciaux (contingents par exemple) qui empêchent l’accès à leurs marchés des produits des pays en voie de développement.

Des restrictions quantitatives ou autres obstacles non tarifaires continuent à s’appliquer à un certain nombre de produits ; l’accès aux marchés n’a pas été amélioré par une modification des politiques nationales de soutien ou par des mesures fiscales ; la protection des industries de transformation, bien que réduite dans de nombreux cas, ne permet pas aux industries des pays sous-développés de vendre aux pays développés des articles manufacturés ou semi-finis ; malgré un certain nombre de concessions importantes sur certains produits présentant une importance particulière pour les pays en voie de développement, les produits au sujet desquels ces pays avaient manifesté un intérêt particulier et qui font l’objet d’un certain mouvement d’échanges ont obtenu des réductions tarifaires notablement inférieures en moyenne à celles qui concernent les autres produits. Cela tient à ce que les groupes de produits fournis surtout par les pays industrialisés ont bénéficié de réductions plus importantes et plus générales. En fait, les groupes de produits sur lesquels les réductions tarifaires ont été les plus importantes sont ceux dont la production exige une technologie poussée ou des capitaux importants. On considère généralement que la demande de ces produits a une plus grande élasticité par rapport aux prix que celle des produits primaires ; par ailleurs, il entre dans leur fabrication une proportion relativement faible de produits importés des pays en voie de développement.

La conséquence est que se trouve accentuée la tendance suivant laquelle les échanges mondiaux de produits industriels très élaborés augmentent plus rapidement que ceux qui portent sur les produits primaires. En outre, l’élargissement des possibilités de commerce des produits chimiques favorisé par le Kennedy Round a accéléré et accélérera la tendance à remplacer les produits primaires par des produits synthétiques. Finalement, la négociation Kennedy a contribué à réduire encore la part des pays en voie de développement dans le commerce mondial.


Permanence de tendances protectionnistes

Malgré les avantages attendus d’une libéralisation plus ou moins effective des échanges internationaux se traduisant par une expansion du commerce international (expansion qui, rappelons-le, a surtout joué en faveur des pays les plus développés), les politiques commerciales nationales restent encore largement protectionnistes. Les raisons d’une persistance des tendances protectionnistes sont nombreuses. Il faut d’ailleurs remarquer que ces tendances ne se manifestent plus, comme par le passé, par le recours à certains procédés très voyants comme les contingents ; ces procédés ont été remplacés par des moyens plus insidieux, donc moins aisément décelables ; ce remplacement prouve que certains pays (surtout développés), en dépit de leur apparente adhésion aux mesures de libération, redoutent la concurrence provenant de l’extérieur et s’en protègent en se retranchant derrière divers arguments (comme l’argument sanitaire) pour interdire l’importation de certains produits. Plusieurs circonstances conduisent donc les pays à rejeter en partie le libre-échange et à adopter pour certaines industries le protectionnisme (se présentant parfois concrètement sous la forme de clauses de sauvegarde).

La remise en question du mouvement de libération des échanges internationaux découle directement de ce mouvement lui-même. En effet, il arrive que certains pays s’aperçoivent avec inquiétude que les importations de certains produits (surtout dans le domaine des biens de consommation) s’accroissent si rapidement qu’elles mettent en danger l’existence même de certains secteurs jugés indispensables de l’activité économique nationale, sans compter les conséquences sur l’équilibre de la balance des paiements et sur l’équilibre de l’économie tout entière. Aussi, par une réaction immédiate, s’efforcent-ils de chercher, par d’autres moyens que ceux auxquels ils ont renoncé par traité, à rétablir une protection sans laquelle certaines de leurs activités seraient, jugent-ils, vouées à la disparition. Les producteurs nationaux (ou les gouvernements qui se font l’interprète de leurs préoccupations) déclarent, compte tenu de la situation, qu’un pourcentage défini de la consommation nationale ne peut être fourni par les importations étrangères. On invoque alors des clauses échappatoires (cas des États-Unis avec la sidérurgie et le textile). Cette remise en cause signifie qu’aucun pays n’accepte, quels que soient ses engagements internationaux, de livrer ses activités à une concurrence même loyale qui risquerait de lui porter gravement atteinte. Au demeurant, la disparition de telles activités aboutirait au résultat inverse de celui qui est recherché, car elle ne manquerait pas d’entraîner la contraction des échanges avec l’étranger. La libéralisation du commerce international comporte un risque que certains pays peuvent refuser : ces derniers peuvent être amenés à ne pas vouloir sacrifier certaines de leurs activités au nom de la spécialisation internationale des productions, surtout si ce réaménagement des activités productives provoque une diminution de l’emploi de la main-d’œuvre : à l’époque contemporaine, aucun pays n’entend s’exposer à des difficultés dans le domaine de l’emploi ni à des troubles sociaux graves pour des raisons tenant à la concurrence extérieure. Aussi, du fait qu’ils se préoccupent de respecter la priorité donnée à l’emploi de la main-d’œuvre, les gouvernements sont-ils obligés de recourir à des systèmes de protection, qui n’ont pas d’ailleurs un caractère tarifaire.