Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Algérie (suite)

L’art islamique en Algérie

Ce n’est qu’exceptionnellement que l’Algérie a su créer un art original. Aux premiers siècles de l’islām, elle demeure tributaire de l’antique tradition berbère (mosquée non datée de Sīdī ‘Uqba [Sidi-Okba], proche de Biskra), et, chez les khāridjites encore, les œuvres sculptées sur plâtre ont des analogies avec celles des monastères coptes, à Tāhert (près de l’actuel Tiaret) et surtout à Sédrata, grande ville saharienne des xe et xie s. Le plus souvent, l’Algérie subit l’influence des grandes écoles musulmanes. L’art tunisien inspire au xe s. le château d’Achīr (ancienne ville fortifiée, dans les monts du Titteri) et au xie la mosquée Sīdī Abū Marwān de Bône, voire le vieux Ténès, à l’ouest d’Alger ; il se reflète dans les œuvres des Ḥammādides, à la Qal‘a, opulente cité devenue champ de ruines (près de l’actuel M’Sila), et dans les palais disparus de Bougie, imités à leur tour par les architectes normands de Sicile. L’école andalouse permet aux Almoravides (xie s.) d’effectuer de remarquables enrichissements à la coupole et au miḥrāb de la Grande Mosquée de Tlemcen, célèbre édifice apparenté aux Grandes Mosquées d’Alger et de Nédroma, qui se signalent par la robustesse de leurs piliers, l’élégance de leurs arcs en fer à cheval brisé et leur harmonieuse sévérité.

Les Almohades laissent peu de souvenirs, mais Tlemcen, sous les ‘Abdalwādides qui recueillent en partie leur héritage, a un art plus national : la mosquée Sīdī Bel Ḥasan (1296) égale les plus belles réalisations de l’art musulman occidental. Du camp de Mansoura, en faubourg, il ne reste que les murailles de pisé rose et des ruines. Au xive s., sous la domination marīnide, Tlemcen édifie deux beaux monuments : les mosquées Sīdī abū Madyan d’al-‘Ubbād (1339) et Sīdī al-Halwī (1353). En 1361, la mosquée Sīdī Brāhīm annonce la décadence. Après la conquête turque, le Levant donne ses modèles. La mosquée de la Pêcherie d’Alger (1660) s’inspire de celles des Balkans. Certes, dans l’urbanisme (palais d’Alger, que domine la forteresse de la casbah [Qaṣba] de 1556), les éléments orientaux (maisons à encorbellements) se juxtaposent aux éléments traditionnels, et, à Constantine, le palais d’Aḥmad bey offre le rare exemple d’un jardin intérieur semblable à ceux du Maroc*. Quant au décor, il est parfois d’origine européenne : verres de Venise, faïences hollandaises. Ce peu d’originalité met mieux en valeur les traditions locales ou importées des dinandiers, des tisserands, des dessinateurs de tapis, des brodeurs sur cuir et sur velours, des brodeuses sur étoffes légères, dont les œuvres tiennent une place honorable dans les arts mobiliers de l’islām.

J.-P. R.

 W. Marçais, les Monuments arabes de Tlemcen (Fontemoing, 1903). / G. Marçais, Algérie médiévale (Arts et métiers graphiques, 1958).


Des origines à l’arrivée des Français


L’Algérie antique


Préhistoire

• Comme le reste de la Berbérie, le futur territoire algérien est peuplé très tôt. Les civilisations préhistoriques qui s’y succèdent depuis l’aube du Quaternaire ont des affinités africaines.

• Au Néolithique : premiers contacts avec l’Europe ; mais les influences essentielles sont africaines.


Phéniciens et Carthaginois

• Dès la fin du IIe millénaire : les Phéniciens établissent des escales et des bases portuaires dans le Maghreb central.

• viiie s. av. J.-C. : Carthage prend le relais des cités mères de Phénicie. Elle se contente de multiplier les comptoirs côtiers ; l’intérieur du pays reste dans les mains des chefs berbères ou numides, qui, la plupart du temps, se comportent en clients ou en alliés de Carthage.


Les Romains

• Rome, ayant détruit Carthage (146 av. J.-C.), reprend la politique punique : entretenir les rivalités des chefs numides et soutenir ceux qui reconnaissent sa suzeraineté. Au début, les Romains se contentent du littoral.

• Après sa victoire sur le parti de Pompée, à Thapsus (46 av. J.-C.), César détruit les royaumes numides.

• 25 av. J.-C. : Auguste rattache la Numidie — enlevée à Juba II — à la province proconsulaire d’Afrique.

• 42 apr. J.-C. : Claude annexe la Mauritanie (Maroc espagnol et Oranais) et la divise en deux provinces impériales : la Mauritanie Césarienne, à l’est, et la Mauritanie Tingitane, à l’ouest, séparées par la Moulouya.

• L’Algérie se romanise, s’urbanise et connaît une agriculture et un commerce prospères. Cependant, de temps à autre, éclatent des révoltes sociales ou raciales. De nombreux Berbères se romanisent ; mais les tribus montagnardes du Maghreb échappent à la civilisation romaine. (V. Afrique romaine.)

• Le pays se christianise rapidement ; dès le iie s., l’Afrique du Nord est le foyer le plus vivant du christianisme occidental ; saint Augustin* en est la figure la plus haute. Cependant, les évêques se heurtent à un mouvement religieux hétérodoxe, d’origine populaire et antiromaine : le donatisme.


Les Vandales, les Byzantins

• 429 : les Vandales, d’origine germanique, envahissent l’Afrique du Nord, dont ils deviennent rapidement les maîtres. Ariens, ils persécutent l’Église romaine et l’aristocratie romanisée au profit des Berbères, qui reconstituent des principautés indépendantes.

• 533 : les Byzantins refoulent les Vandales ; Justinien rattache la Mauritanie Tingitane, devenue indépendante en fait, à la Mauritanie Césarienne. Mais l’autorité du lointain empereur d’Orient est très fragile. Elle ne résistera pas à la pression arabe.


L’Algérie arabe


L’installation des Arabes

• La conquête par les Arabes de l’actuel territoire algérien fait bloc avec celle de la Tunisie et du Maroc.

• 647 : les premiers Arabes, venus d’Égypte, pénètrent dans le Maghreb.

• 682 : le grand raid arabe mené par ‘Uqba ibn Nāfi‘ de Kairouan au Maroc se heurte à la résistance des Byzantins et des Berbères : la Kāhina, qui défend l’Aurès, est l’un des chefs héroïques de cette résistance.

• 710-720 : l’islamisation du pays est pratiquement terminée, mais l’arabisation ne suit pas le même rythme. Les Arabes constituent une aristocratie qui domine le pays, mais qui doit compter avec la résistance berbère.