Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
D

discours (parties du) (suite)

Outre la définition des classes par leur distribution syntagmatique — qui vient d’être indiquée sommairement ici —, chaque classe peut être caractérisée par son propre système de marques (par exemple, le nombre pour le nom et le temps pour le verbe), en étudiant également la distribution des éléments tels que les suffixes (pluriel, singulier, présent...) par rapport aux éléments de base (racines).

Les linguistes — et parfois leurs détracteurs — ont fait remarquer qu’au moins en ce qui concerne les langues indo-européennes les catégories identifiées au moyen des méthodes formelles correspondaient généralement aux catégories identifiées par les grammairiens traditionnels. Cette concordance est généralement reconnue comme un indice des relations existant entre structure formelle et structure du contenu. Néanmoins, les structuralistes font également remarquer que les catégories définies sur des critères sémantiques par les anciens étaient nécessairement liées à des critères d’emploi des formes, restés non explicites (sinon, rien ne peut justifier l’intégration de termes tels que vérité, justice... à la classe de substantifs). Au cours des dernières années, le développement des grammaires transformationnelles a consacré la prédominance de la phrase comme point de départ et unité fondamentale de toute analyse grammaticale, tandis que bien peu de place est laissée à une réflexion sur les parties du discours. Ces grammaires semblent avoir retenu sans plus les catégories traditionnelles, précisées formellement par les études de type distributionnel. Néanmoins, certains aspects récents des grammaires transformationnelles permettent de penser que le problème des parties du discours risque d’être posé de nouveau dans le cadre de ces grammaires. Celles-ci insèrent dans leur composante de base un lexique dont les membres sont supposés définis à l’intérieur d’une matrice comportant des traits phonologiques, syntaxiques et sémantiques. Les traits syntaxiques de la matrice lexicale sont souvent proches des catégories traditionnelles. Mais le mode d’attribution de ces traits reste largement aprioristique. On peut penser que la nécessité de formuler plus rigoureusement les traits syntaxiques pourrait aboutir à une conception très nouvelle des parties du discours.

G. P.

➙ Linguistique.

 O. Jespersen, The Philosophy of Grammar (Londres, 1924). / V. Brøndal, les Parties du discours. Études sur les catégories linguistiques (Copenhague, 1928). / L. Hjelmslev, Principes de grammaire générale (Copenhague, 1928). / K. Togeby, Structure immanente de la langue française (Copenhague, 1951 ; 2e éd., Larousse, 1965). / J. R. Magnussen, Studies in the Theory of the Parts of Speech (Lund, 1954). / H. A. Gleason, An Introduction to Descriptive Linguistics (New York, 1955 ; nouv. éd., 1967 ; trad. fr. Introduction à la linguistique, Larousse, 1969). / P. Guiraud, la Grammaire (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1958 ; nouv. éd., 1970). / L. Kukenheim, Esquisse historique de la linguistique française (Leyde, 1962). / R. Donzé, la Grammaire générale et raisonnée de Port-Royal (Francke, Berne, 1967). / G. Mounin, Histoire de la linguistique (P. U. F., 1967 ; nouv. éd., 1970). / J. Lyons, Introduction to the Theoretical Linguistics (Cambridge, 1968 ; trad. fr. Linguistique générale, Larousse, 1970). / J. Dubois, L. Guespin, M. Giacomo, C. et J.-B. Marcellesi et J.-P. Mével, Dictionnaire de linguistique (Larousse, 1973).

Disney (Walt)

Dessinateur, cinéaste et producteur américain (Chicago 1901 - Burbank, Californie, 1966).


À l’âge de onze ans, le futur empereur du dessin animé vendait, paraît-il, des cacahuètes dans la rue. Petit détail pittoresque, que ne manquent pas de relater les biographes afin de souligner l’origine modeste d’un des plus brillants parmi les self made men américains. Ce qui paraît plus certain, c’est que Walter Elias Disney fut en 1917 ambulancier pendant la Première Guerre mondiale sur le front français. Une fois les hostilités terminées, il entre dans une agence de publicité, où l’occasion lui est donnée de développer ses dons de dessinateur. Il s’intéresse vivement aux progrès de l’animation, dont le leader est alors Pat Sullivan, l’heureux créateur de Félix le Chat. Après des débuts difficiles — son premier atelier est un vieux garage désaffecté —, il réussit à fonder à Hollywood avec son frère Roy le Disney Studio, embryon modeste des futures et puissantes Walt Disney Productions. Ses premiers essais de cartoonist sont peu concluants (Alice in Cartoonland). Avec Ub Iwerks, il collabore ensuite à une série plus chanceuse (Oswald le Lapin). Mais la renommée de Disney s’impose dès 1927. Avec l’aide de sa femme, Liliane Bounds, il vient d’inventer un « personnage » qui le rend très vite universellement célèbre, une souris malicieuse dénommée primitivement Mortimer mais que l’on débaptise promptement pour lui donner un pseudonyme plus allègre : Mickey. Héros modeste de deux cartoons muets, Mickey fait une entrée remarquée et... bavarde dans Steamboat Willie (1928), qui fera date dans l’histoire de l’animation. Le triomphal accueil que reçoit Mickey décide de la carrière de Walt Disney. Tout en agrandissant en 1930 ses studios, Disney augmente le nombre des pensionnaires de sa ménagerie. Celui qui se veut avant tout un « entertainer », une sorte d’« amuseur » qui dessine pour un public enfantin, donne successivement naissance au canard Donald (126 films, soit 5 de plus que Mickey Mouse), aux chiens Pluto (48 films) et Goofy (51 films), aux trois petits cochons, au chat Figaro, au taureau Ferdinand, au cheval Dussabot (Horace Horsecollar), à la vache Clarabelle, plus tard à l’éléphant Dumbo et au faon Bambi. Mais Walt Disney a d’autres cordes à son arc : il cherche à apprivoiser la poésie et le merveilleux avec des Silly Symphonies, qui malheureusement tombent parfois dans une discutable mièvrerie (la première Skeleton Dance date de 1929). Très attentif aux diverses inventions techniques, il utilise la couleur dès 1932 (Flowers and Trees). En 1937, grâce à la caméra multiplane, la troisième dimension fait son apparition dans le Vieux Moulin (The Old Mill). Féru de musique, Disney commercialise les œuvres marquantes de certains compositeurs. On entend Saint-Saëns dans Skeleton Dance ; Mendelssohn, Rossini, Schubert et Chopin dans Flowers and Trees ; Bach, Beethoven, Tchaïkovski, Dukas, Moussorgski et Stravinski dans Fantasia. En 1937, Disney se lance dans le long métrage. Le succès de Blanche-Neige et les sept nains (Snow White and the Seven Dwarfs) entraîne celui de Pinocchio (1939), d’un Fantasia (1940) très controversé, de Dumbo (1941) et de Bambi (1942). Insensiblement, l’« animateur » Disney s’efface devant le businessman, qui devient petit à petit un vrai capitaine d’industrie, commandant une troupe de gag-men rompus à tous les exercices de style, pourvu que l’image de marque (ce fameux style en O, minutieusement anthropomorphique) soit conservée. Le label « Walt Disney » s’étend à une foule de sous-produits : albums, bandes dessinées, jouets, vêtements, etc. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, le dessin animé américain évolue. Stephen Bosustow fonde l’UPA en réaction contre un certain académisme. Les critiques commencent à dénigrer le style de Walt Disney. Mais l’« empire » résiste à tous les assauts, et, fidèle aux modèles immuables qui firent sa légende, Disney étend de plus en plus ses activités. Il lance deux séries de documentaires : C’est la vie (True Life Adventures) à partir de 1948 (cette série comprenant notamment Désert vivant [The Living Desert]) et le Monde et ses habitants (People and Places), à partir de 1953. Il alterne les longs métrages d’animation (Cendrillon [Cinderella, 1950], Alice au pays des merveilles [Alice in Wonderland, 1951], Peter Pan [1953], la Belle au bois dormant [Sleeping Beauty, 1958]) et les films de fiction à prises de vues réelles, qui seront généralement des films d’aventures (l’Île au trésor [Treasure Island, 1950], Vingt Mille Lieues sous les mers [20 000 Leagues under the Sea, 1954], Davy Crockett [1955]), Mary Poppins (1964) et le Livre de la jungle (The Jungle Book, 1967-68), ce dernier réalisé par W. Reitherman et programmé sur les écrans après la mort de Disney, seront les dernières œuvres d’importance auquel le « Roi de Burbank » (banlieue de Los Angeles où sont installés ses studios) collabora. En créant à Anaheim un vaste parc d’attractions, Disneyland, ouvert au public en 1955, et en achetant en Floride un terrain immense de 11 000 hectares ouvert au public en 1971 (EPCOT : Experimental Prototype Community of To-Morrow), un super-Disneyland, un véritable royaume féerique pour les enfants, Disney est sans doute parvenu à cette réussite spectaculaire presque unique dans le monde turbulent du spectacle cinématographique.