cyniques (les) (suite)
Le but de la vie est le bonheur, qui s’identifie au plaisir ; la vertu n’est rien d’autre que ce bonheur, comme le vice n’est autre que la douleur. L’intelligence naît de l’action et non du discours. Qu’est-ce qu’un sage ? Un « hors-la-loi », parce qu’un homme cherchant à être authentiquement soi-même. Indépendant des influences et pressions sociales, il sait mépriser le sens commun, vivre selon ses besoins et désirs naturels ; sans biens, sans famille, sans enfants, sans travail, sans patrie, en lutte contre les contraintes et en quête d’amis. Le sage refuse la guerre, comme il dédaigne l’ambition et se rit des politiques, dont il a compris le mensonge.
Antisthène a élaboré le plan d’une cité idéale où figurent : suppression du mariage, liberté sexuelle de tous, éducation en commun des enfants, fin de l’État.
• Diogène de Sinope. Ce contemporain d’Alexandre le Grand n’est connu que par une tradition orale. Si sa pensée semble moins analytique que celle d’Antisthène, il brille surtout par l’humour. Partisan d’une existence rude parce que formatrice, il élimine méthodiquement tous les objets superflus, habite un tonneau et vit de mendicité, injuriant ceux qui lui font l’aumône. Prônant l’homme « naturel », le « bon sauvage » spontanément sage, il s’emploie à ridiculiser les arts comme la magie, avec laquelle il mêle superstitions, religion, rites, cérémonies. Une foule d’anecdotes concernant sa vie nous sont parvenues. On connaît celle-ci : on le trouve un jour, dans les rues d’Athènes, en plein midi, une lanterne à la main ; à ceux qui le questionnent, il répond : « Je cherche un homme. »
Si, à la mort d’Antisthène, l’enseignement du cynisme disparaît, une quantité croissante d’individus s’y rattacheront longtemps encore de par les formes mêmes de leur pratique sociale : détruire les temples, parodier les cérémonies du culte, en finir avec le respect des morts, fraterniser avec la pègre — voilà quelques éléments d’une critique exercée peut-être par les plus lucides des ennemis de l’ordre hellène.
J. N.
