Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

cyclone (suite)

La cyclogenèse pose donc, aux latitudes tropicales, des problèmes ardus. La théorie convective étant définitivement éliminée, il est vraisemblable que la formation du tourbillon cyclonique ne s’enferme pas dans un schéma unique. La faveur semble cependant aller à la conception cinématique (approfondissement d’une perturbation préalable, bien que cet approfondissement implique finalement lui-même une activation par advection froide dont, quelles qu’en soient les modalités exactes, on ne semble plus guère douter aujourd’hui). De toute manière, les cyclones tropicaux sont localisés géographiquement, à l’échelle planétaire, grâce aux impératifs représentés par les trois premiers facteurs signalés.


L’évolution

Elle est contenue dans les quatre phases qui sont dites « initiale », de « maturation », de « maturité » et de « déclin ».

• La phase initiale. Elle commence à la dépression tropicale, se poursuit avec la tempête tropicale et s’arrête au moment où l’intensité d’ouragan est atteinte par les vents. On peut l’identifier à la période d’approfondissement de l’onde de l’est. C’est après une panne d’alizé qu’apparaît la dépression tropicale. Celle-ci se manifeste par la présence d’une ou de plusieurs isobares fermées au niveau de la mer. Le vent n’y dépasse pas une quarantaine de kilomètres à l’heure. Avec la tempête tropicale, les isobares fermées augmentent en nombre et se resserrent. Le vent y prend une vitesse appréciable ; il peut atteindre 120 km/h. Au-delà, c’est le cyclone.

• La maturation. Au cours de cette phase, le cyclone tropical atteint son maximum d’intensité. Il couvre une surface relativement modeste ; sa zone pluvieuse et sa configuration isobarique sont plus symétriques que durant les autres phases.

• La maturité. Les isobares qui délimitent un cyclone mûr s’agrandissent progressivement. La dépression ne se creuse plus et peut même commencer à diminuer d’intensité. Mais, pendant cette période, la région couverte par les vents de tempête est plus étendue que pendant toutes les autres étapes de l’évolution. Les vents atteignent de grandes vitesses, couramment 200 km/h.

• Le déclin. Le cyclone prend petit à petit des caractères extra-tropicaux quand il remonte en direction des latitudes moyennes. S’il demeure entre les tropiques, il se dissipe par comblement, au contact des masses continentales et montagneuses.


La structure

Deux remarques préliminaires s’imposent. Tout d’abord, la question de l’homogénéité de la masse d’air au sein de laquelle vit le cyclone tropical est controversée (l’hypothèse frontale implique l’hétérogénéité). Il n’empêche que, de toutes les façons, l’uniformisation est réalisée au bout d’un certain temps, dans le cadre d’une masse d’air chaude. Il est évident, en second lieu, que la structure du météore n’est pas tout à fait la même selon qu’il est jeune ou adulte. On décrira ici le cyclone adulte.

Lorsqu’il est bien réalisé, le cyclone comporte en son centre une chute brutale et massive de la pression. La remontée est également très rapide (fig. 9). La baisse affecte une aire à peu près circulaire de 50 à 200 km de rayon. Les plus bas enregistrements reconnus dans les grands cyclones sont, en général, sévères. Le baromètre peut descendre entre 915 et 930 mb. La rotation cyclonique pour sa part est puissante dans les basses couches. La vitesse des vents peut y atteindre 300 km/h. Cette rotation tend à perdre en ampleur et en intensité avec l’altitude. C’est alors que la circulation anticyclonique prend l’avantage. Dans les couches inférieures, le tourbillon cyclonique est plus dangereux à droite (à droite par rapport à l’axe de progression du météore) qu’à gauche. Les vents les plus violents se situent plus précisément dans le quadrant arrière-droit. Au centre, par contraste, le calme peut être complet. Le cyclone se signale par un énorme système nuageux (ce qui explique la massivité des pluies). Le système nuageux prend, sur les écrans radars, l’allure d’une nébuleuse spirale. Au milieu se trouve un nimbo-stratus, généralement percé de l’œil de la tempête (la zone de calme). Dans les tempêtes mûres, le diamètre de l’œil est de 40 km, du moins pour les grands cyclones. Le plus souvent circulaire, il peut se trouver déformé lorsque le météore aborde un relief (étirement dans le sens de ce relief) ou passe un détroit (étranglement à hauteur de celui-ci). L’œil de la tempête, s’il correspond à une éclaircie, n’en comporte pas moins des nuages qui rendent difficile son interprétation. On peut penser qu’il y a mouvement descendant sur le rebord de l’œil et ascendance dans son centre. Cela dit, la convection généralisée semble se situer à la périphérie du cyclone lui-même. C’est ainsi que les bandes spirales qui se greffent sur le nimbo-stratus ont des nuages convectifs (cumulus, cumulo-nimbus). On en relève également entre elles.


Le cheminement et le groupement des cyclones tropicaux

Dans son déplacement général vers l’ouest en accord avec le flux d’est alizéen dont il affecte le domaine, le cyclone est contrôlé par un centre directeur. Celui-ci peut être considéré comme étant l’anticyclone subtropical sur la lisière équatoriale duquel il évolue. La vitesse de déplacement du météore (qu’il ne faut pas confondre avec celle de ses vents tourbillonnaires) dépend de la latitude, de la puissance du centre directeur et des perturbations extra-tropicales qui viennent interférer en altitude avec les courants d’est intertropicaux. En moyenne, cette vitesse est de 8 à 12 nœuds sous 15° de latitude, de 12 à 18 nœuds entre 15 et 25°.

Les trajectoires d’ensemble sont simples (fig. 6) : évolution d’est en ouest, puis crochet éventuel en direction des latitudes moyennes. Les tronçons sud-nord (hémisphère Nord) et nord-sud (hémisphère Sud) sont dus au passage des cyclones sur les façades occidentales des anticyclones subtropicaux. À l’ouest des centres d’action, en effet, la tendance est à la remontée des alizés vers les régions tempérées ; les météores évoluent simplement alors dans le lit de ces flux désormais méridiens. Dans le détail, cependant, la fantaisie l’emporte. Des cheminements provisoirement insolites sont souvent relevés ; coudes brusques vers le nord suivis de changements de direction non moins brusques vers le sud par exemple. De tels « caprices » ne s’expliquent pas toujours, ou du moins s’expliquent mal. Ils semblent parfois en rapport avec le substratum (influence locale des courants marins ?). Il n’empêche qu’une modification soudaine de direction en cours de déplacement se comprend généralement par le fait que le cyclone passe du contrôle d’un centre directeur sous celui d’un centre voisin. Quand la perturbation est dominée par deux anticyclones successifs, l’un étant à l’ouest de l’autre, elle tend à remonter légèrement vers le nord, au passage du talweg qui les sépare, avant de redescendre vers le sud et de poursuivre sa marche vers l’ouest, en fonction des hautes pressions les plus occidentales.