Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

cycles biosphériques (suite)

Si la photosynthèse est la réaction chimique la plus importante dans la fixation du carbone organique, elle n’est cependant pas la seule. En effet, certaines Bactéries sans chlorophylle sont capables d’effectuer cette synthèse. Mais ne pouvant se servir de l’énergie lumineuse, c’est à des réactions chimiques exothermiques qu’elles vont emprunter l’énergie nécessaire (chimiosynthèse). Ainsi les Nitrobactéries oxydent de l’ammoniaque et des nitrites :

libérant 84 kcal ;

libérant 19 kcal.

Les Sulfobactéries oxydent les composés soufrés tels que l’hydrogène sulfuré ou le soufre lui-même :

libérant 63 kcal ;

libérant 147 kcal.

Les Hydrogénobactéries oxydent l’hydrogène :

libérant 68 kcal.

Les Ferrobactéries oxydent les sels ferreux :

Ces dernières Bactéries vivent entourées d’une masse de rouille qu’elles ont elles-mêmes fabriquée. Le rendement pratique de ces diverses réactions est beaucoup plus faible que le rendement théorique et il nécessite la destruction d’un grand nombre de molécules pour obtenir la fixation du carbone nécessaire à la croissance de la cellule. L’énergie ainsi prélevée provient de celle accumulée précédemment dans le sol, alors que la photosynthèse utilise de l’énergie neuve apportée par les rayons solaires. À la surface du globe, 150 milliards de tonnes de carbone sont ainsi introduites chaque année dans les molécules organiques pesant elles-mêmes environ 300 milliards de tonnes. C’est 500 milliards de tonnes de gaz carbonique qui pénétreraient ainsi annuellement dans le monde vivant. Heureusement, la réserve terrestre est grande : dans les 11 premiers kilomètres qui nous entourent (troposphère), on estime que 700 milliards de tonnes de carbone sont utilisables et continuellement renouvelées.

Les animaux et les végétaux non verts (Champignons par exemple), ainsi qu’un nombre considérable de Bactéries, s’alimentent aux dépens des végétaux verts, des Bactéries capables de chimiosynthèse, ou d’autres animaux. Ils peuvent être des prédateurs (carnivore dévorant un herbivore) ou des parasites (la Puce suçant le sang d’un Mammifère ou la Cuscute qui pompe la sève de son hôte). Certains sont saprophytes : ils n’utilisent que les déchets ou les cadavres et récupèrent ainsi les molécules organiques qui ont déjà servi (les Champignons vivant sur le fumier ou sur le bois pourri, de même qu’un grand nombre de Bactéries, en sont de bons exemples).

Tous ces êtres sont hétérotrophes pour le carbone : ils sont incapables de s’alimenter sans le secours d’êtres vivants préexistants. Généralement, ils n’utilisent pas les molécules organiques telles qu’ils les ont trouvées ; comme l’Homme, ils les transforment, par digestion, en des éléments simples (mais toujours de nature organique) que leurs cellules assimilent, puis assemblent en des composés qui peuvent leur être spécifiques.

Photosynthèse et chimiosynthèse prélèvent du carbone minéral pour le transformer en carbone organique. Si la réserve terrestre est assez importante, sans être inépuisable cependant, c’est environ le tiers du gaz carbonique atmosphérique qui est utilisé chaque année. Cependant, le taux de gaz carbonique dans l’air varie peu, si ce n’est un appauvrissement local auprès d’une forêt (0,02 p. 100) ou un enrichissement dans les agglomérations urbaines (0,04 p. 100). L’utilisation intensive du carbone par le monde vivant est compensée par des rejets de gaz carbonique par la biosphère. En effet, la vie même des végétaux et des animaux en produit régulièrement grâce à leur respiration* ; celle-ci libère du gaz carbonique en même temps qu’elle absorbe de l’oxygène également prélevé dans l’atmosphère. Le gaz carbonique est dégagé par les poumons, les branchies, les stomates ou la surface du corps, suivant l’espèce. Une part importante du carbone fixé par le monde vivant retourne ainsi à la réserve commune, qui se trouve réalimentée au fur et à mesure des prélèvements qui lui sont faits. Le phénomène est le même dans le monde animal et végétal. L’énergie nécessaire à la vie pour ses synthèses, ses mouvements, le maintien éventuel de la température est trouvée dans l’oxydation des métabolites ou des réserves, qui sont détruits dans une chaîne de réactions elles aussi complexes (cycle de Krebs) et qui peuvent se résumer ainsi dans le cas où le métabolite est du glucose :
C6H12O6 + 6O2 → 6CO2 + 6H2O + 675 kcal.
Les végétaux verts rejettent 15 p. 100 de la masse de carbone fixée, les animaux une part plus importante, l’Homme 0,3 milliard de tonnes à lui seul par an, soit 100 kg par individu.

À ce phénomène de respiration s’ajoutent ceux liés aux fermentations. En l’absence d’oxygène, les tissus végétaux (Betterave, Carotte par exemple) rejettent encore du gaz carbonique. C’est une réaction de faible rendement, qui permet de libérer l’énergie nécessaire à leur survie lorsqu’ils se trouvent à l’état d’asphyxie. La levure de bière, utilisée pour la fabrication des boissons alcoolisées et la panification, vit en détruisant les molécules de glucose du milieu ambiant :
C6H12O6 → 2C2H5OH + 2CO2 + 25 kcal.
D’autres micro-organismes (Bactéries par ex.) effectuent des transformations analogues, chacun pouvant avoir une spécificité propre, libérant du gaz carbonique qui s’ajoute à celui qui est dégagé par la respiration.

En somme, il existe un cycle entre le monde vivant et l’atmosphère, le gaz carbonique étant prélevé et aussi rejeté. Outre ces mécanismes, il existe d’autres réactions qui alimentent ou diminuent les réserves de gaz carbonique disponibles.

À l’ère primaire, d’immenses forêts se constituèrent ; une photosynthèse intense fixa à cette époque de très grandes quantités de carbone dans les végétaux pendant des milliers d’années (1014 t de gaz carbonique, estime-t-on). Ces masses organiques, enfouies dans les couches terrestres dans des conditions particulières, furent décomposées en formant les grands gisements de houille. Cette houille constitue un blocage du carbone, qui a fait retour à la forme minérale. C’est par combustion que l’homme le met de nouveau à l’état de gaz carbonique, utilisable par les végétaux. Il en est de même pour le pétrole, qui provient de la décomposition du plancton marin animal et végétal. Les couches de calcaire formées par les restes d’animaux qui ont eux-mêmes élaboré leurs coquilles, leurs tests et leurs carapaces constituent également une vaste réserve de carbone, malheureusement incombustible.