Cuvier (Georges) (suite)
Cuvier a été avant tout un grand classificateur : il a fourni les bases des classifications actuelles à l’intérieur des grands groupes, en particulier des Mammifères et des Mollusques. On lui doit aussi (et cela va de pair) le principe de corrélation des caractères, en vertu duquel l’adaptation, par exemple, laisse sa marque sur diverses parties du corps : tout Mammifère à cornes possède des sabots et des molaires usés en croissant, mange de l’herbe et rumine (Cuvier a dit en plaisantant que le diable en personne ne lui faisait pas peur : puisqu’il avait des cornes, il était herbivore et n’attaquait pas l’homme !).
L’application la plus célèbre de ce principe concerne un Mammifère marsupial. En 1805, un morceau de gypse extrait à Montmartre présente l’empreinte d’une mâchoire de Sarigue. Cuvier détermine dans la masse rocheuse non exploitée l’emplacement probable des os marsupiaux, convoque quelques témoins, annonce que l’on va trouver les os marsupiaux, creuse et les trouve. À ce propos, il écrit : « Le vrai cachet d’une théorie est sans contredit la faculté qu’elle donne de prévoir les phénomènes. » De fait, pour la première fois, une découverte paléontologique avait répondu à la prévision.
Malheureusement, Cuvier n’a pas eu sur tous les points la même clairvoyance : il était résolument fixiste, professait le plus grand mépris pour Lamarck et eut même avec son ami Geoffroy Saint-Hilaire, devant l’Académie des sciences, en mars 1830, une célèbre « dispute », dans le style des disputationes du Moyen Âge, au sujet de l’évolution. Cette intransigeance fixiste conduisit Cuvier à sa notion erronée des « révolutions du globe », bouleversements imaginés pour expliquer la succession de plusieurs faunes fossiles sur les mêmes lieux. Cuvier n’en est pas moins le père de la zoologie systématique et de la paléontologie animale.
H. F.
L. Roule, la Vie et la mort de Georges Cuvier, 1769-1832 (Masson, 1927). / E. G. Dehaut, les Doctrines de Georges Cuvier dans leurs rapports avec le transformisme (Lechevalier, 1945). / W. Coleman, Georges Cuvier, Zoologist, a Study in the History of Evolution Theory (Cambridge, Mass., 1964). / R. Dujarric de La Rivière, Cuvier, sa vie, son œuvre (Peyronnet, 1969). / Georges Cuvier, de son temps au nôtre (l’Expansion, 1970).