Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Crabe (suite)

Potamon edule supporte l’eau saumâtre et même l’eau douce ; il remonte les cours d’eau méditerranéens et creuse des terriers dans les berges. Mais le Crabe d’eau douce fouisseur le plus inquiétant est incontestablement le Crabe chinois (Eriocheir sinensis), originaire d’Extrême-Orient, introduit accidentellement en Allemagne au début du siècle et qui envahit depuis les rivières européennes sans qu’on puisse s’y opposer ; il commet des dégâts importants en minant les rives et les digues ; on le reconnaît aux manchons de poils qui ornent ses pinces.

Quelques Crabes tropicaux ont des mœurs franchement terrestres. Gecarcinus, des Antilles et d’Afrique, ne regagne la mer que pour se reproduire ; ses cavités branchiales fonctionnent comme des poumons ; il creuse des terriers, d’où il ne sort que la nuit.

Parmi les Anomoures à faciès de Crabes, on peut citer les Porcellanes, qui ne dépassent pas 2 cm de long et qui abondent sous les pierres à marée basse ; on peut les distinguer des vrais Crabes par la présence de pattes-nageoires (uropodes) à l’extrémité de l’abdomen et par le doigt mobile de leur pince, qui est placé vers l’intérieur. Dans les régions chaudes, le Crabe des Cocotiers (Birgus latro) reste près de l’eau lorsqu’il est jeune et abrite son abdomen dans une coquille, comme un Pagure ; puis il devient terrestre ; son abdomen se replie sous le céphalothorax, et ses chambres respiratoires servent de poumons ; il vit dans des terriers, mais grimpe également aux Cocotiers, dont il fait tomber les fruits pour les manger à terre.

M. D.

➙ Crustacés / Décapodes.

 A. Bauchau, la Vie des crabes (Lechevalier, 1966).

cracking ou craquage

Procédé industriel consistant à modifier la composition d’un produit pétrolier sous les effets conjugués de la température, de la pression et, le plus souvent, d’un catalyseur.


La réaction de base est la dissociation, ou « craquage », de molécules longues d’hydrocarbures (essence lourde, gasoil, distillats lourds, résidus) pour donner des molécules courtes (gaz, essence légère, carburants).


Types de cracking


Cracking thermique (sans catalyseur)

On a prétendu que le cracking avait été découvert accidentellement par la négligence d’un ouvrier oubliant d’arrêter à temps une distillation de pétrole brut. Quoi qu’il en soit, des installations rudimentaires faisaient déjà appel, aux États-Unis, avant 1914, à des températures de 400 °C et à des pressions de 5 bars pour augmenter les rendements en essence. Après la réalisation du premier four tubulaire en 1926, le procédé connut un grand essor, toutes les raffineries étant dotées d’une installation pour traiter les gas-oils et les distillats paraffineux ou pour « réformer » les essences lourdes à 550 °C et 60 bars. À l’heure actuelle, le cracking thermique est encore utilisé couramment sous deux formes :
— le visbreaking (réduction de viscosité), qui craque modérément les fuel-oils, ou résidus de la distillation atmosphérique du brut, à 450 °C et 20 bars ;
— le coking (cokage), qui est un craquage poussé jusqu’au résidu solide ultime du pétrole, le coke.


Cracking catalytique (avec catalyseur)

Découvert vers 1935 par un Français, Eugène Houdry (1892-1962), le cracking catalytique, dont le principal avantage est une pression de marche de 1 bar et une température de 450 °C seulement, se développa très rapidement aux États-Unis pendant la Seconde Guerre mondiale pour la fabrication de carburants militaires et de toluène. Il s’est actuellement substitué au cracking thermique dans la plupart des raffineries pour la conversion du gas-oil en essence, avec des rendements atteignant par recyclage 80 p. 100. Le catalyseur est composé d’oxydes métalliques, généralement silicate et alumine, amorphes ou zéolitiques et se présente sous forme granuleuse ou pulvérulente. Pour maintenir son activité, il est nécessaire de le « régénérer », c’est-à-dire de brûler la couche de coke qui s’y dépose au cours de la réaction.


Crackings spéciaux

Certains procédés de raffinage spéciaux dérivés du cracking, tels le reforming catalytique, le steam-cracking et l’hydrocracking, ont pris une grande importance pour la fabrication de bases pétrolières et pétrochimiques.


Théorie du cracking

Le cracking modifie la nature des hydrocarbures qui le subissent et réalise des synthèses de nouveaux corps en regroupant différemment les atomes de carbone et d’hydrogène. Les longues chaînes saturées sont ouvertes pour donner des oléfines (hydrocarbures non saturés à double liaison C = C) et des aromatiques (hydrocarbures à noyau benzénique) : les produits légers ainsi obtenus sont riches en hydrogène, et il y a même une formation non négligeable d’hydrogène, tandis que les produits lourds en sont pauvres, allant jusqu’au coke de pétrole, carbone pur évidemment dépourvu d’hydrogène. Les oléfines gazeuses (éthylène, propylène, butylène), qui sont rares dans le pétrole brut, constituent à leur tour d’excellentes matières premières des synthèses pétrochimiques. Au cours du cracking, des réactions de polymérisation et d’alkylation — cette dernière combinant l’isobutane et le butylène en isooctane — produisent une coupe d’essence qui, séparée par fractionnement, donne un carburant antidétonant à haut indice d’octane.


Rentabilité

Tout cracking est un procédé de conversion de produits excédentaires de moindre valeur en produits plus chers demandés par le marché. Aux États-Unis, les besoins en carburant automobile atteignent 60 p. 100 du pétrole brut, contre 25 p. 100 seulement en Europe, car les véhicules lourds y sont équipés de moteurs à essence et non de diesels, et le chauffage domestique s’y fait essentiellement au gaz naturel et non au mazout. Il n’est donc pas étonnant que la capacité de cracking y représente 60 p. 100 de celle de distillation du pétrole brut, dont les deux tiers sous forme de cracking catalytique, au lieu de 10 p. 100 en Europe occidentale. Ces chiffres ne comprennent pas les reformings et les autres procédés spéciaux. Le coût des unités de cracking varie suivant leur taille et le procédé mis en œuvre. Pour un même tonnage traité, l’investissement pour un cracking catalytique est cinq fois plus élevé que pour une unité de distillation du brut et peut dépasser 20 dollars par tonne de capacité annuelle. Les installations de raffinage aux États-Unis coûtent donc trois fois plus cher qu’en Europe. Les frais d’exploitation (main-d’œuvre, énergie, combustible, catalyseur, produits chimiques, entretien) d’un cracking catalytique sont de l’ordre de 5 dollars par tonne traitée.

A. H. S.

➙ Hydrogénation / Reforming / Steam-cracking.

 K. Vinnacker et L. Kuchler, Traité de chimie appliquée, t. V : Chimie organique (Eyrolles, 1966).