Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

courants océaniques (suite)

Sur les marges polaires, les eaux atteignent leur maximum de salinité par la force de l’évaporation ; elles ont tendance, en dépit de leur température, à s’enfoncer au contact des eaux subpolaires le long de la convergence (ou front) subtropicale, et à repousser en profondeur les limites de la couche chaude superficielle (fig. 20) [v. Antarctique, Atlantique].

Dans l’océan Indien, le système courantologique situé au nord du 10e degré S. est perturbé par les vents de mousson. En hiver boréal, la situation est similaire à celle des autres océans, mais, lorsque vient à souffler la mousson estivale venue du sud, le courant nord-équatorial est supprimé et remplacé par le courant de mousson, dirigé vers l’est ; de même, le contre-courant disparaît, tandis que le courant de Somalie se renverse et s’accélère : c’est alors le courant de vent le plus violent du monde, puisqu’il peut atteindre une vitesse horaire de 6,9 nœuds (environ 12,8 km).

• Dans l’océan Austral. La disparition des obstacles continentaux permet à un puissant courant circumpolaire dirigé vers l’est de s’individualiser pleinement au sud du front subtropical. Il se présente tout à la fois comme un courant de densité — la juxtaposition des eaux subtropicales et polaires créant une pente isobarique tournée vers le sud — et un courant d’impulsion sous l’action des grands vents d’ouest, qui sont ici plus forts et plus réguliers que dans l’hémisphère boréal. Ce mouvement giratoire, l’un des plus vastes du monde puisqu’il fait le tour de la planète, s’écoule à des vitesses de 0,20 à 0,30 m/s. Il est en réalité formé par deux masses d’eau s’écoulant parallèlement et que sépare le front polaire antarctique. Le courant austral est juxtaposé à un autre, dirigé en sens contraire et poussé par les vents d’est : il se déplace vers l’ouest entre une ligne de divergence (souvent morcelée) et la bordure de la calotte antarctique, contre laquelle les eaux s’enfoncent par convergence (v. Antarctique).


Les courants marginaux

• Les marges orientales. Deux types de circulation méridienne peuvent être définis. Sous les latitudes subtropicales, le déficit engendré par le transfert des eaux tropicales vers l’ouest est comblé par un transfert horizontal dirigé des hautes vers les basses latitudes et une remontée d’eau profonde causée par l’alizé. C’est dans l’hémisphère austral que cette circulation est la mieux définie : des eaux venues du courant circumpolaire, déviées vers la gauche et renforcées par les vents du sud, donnent naissance aux courants du Pérou, de Benguela et de l’Ouest australien (position symétrique dans l’hémisphère Nord : courants de Californie, du Portugal et des Canaries). Par leur origine polaire et profonde, ces eaux sont anormalement froides et responsables de la création de déserts côtiers ; en outre, l’affleurement des eaux riches en matières nutritives provoque un enrichissement en plancton et en poissons.

Sous les latitudes tempérées de l’hémisphère Nord, les eaux tendent à glisser vers le pôle : ce mouvement affecte les dérives nord-pacifique et nord-atlantique, dont les terminaisons pénètrent assez loin vers les régions arctiques (courant d’Alaska et des Aléoutiennes, courant de Norvège). Ce transfert d’eau tiède jusqu’à des latitudes très élevées se fait très lentement puisqu’il lui faut plusieurs années pour atteindre la mer de Barents ; mais sa présence suffit à expliquer la faveur climatique dont jouissent les façades nord-occidentales de l’Amérique et de l’Europe.

• Les marges occidentales (fig. 19). Dans l’hémisphère Nord, des courants polaires et froids progressent loin vers le sud : ce sont, dans l’Atlantique, les courants du Labrador et de l’Est-Groenland, charriant des icebergs et des morceaux de banquise ; dans le Pacifique, l’Oyashio, qui longe les côtes de la Sibérie orientale et atteint les îles septentrionales du Japon. Ces eaux froides et vertes arrivent en contact le long d’un front très marqué avec des eaux chaudes et bleues se déplaçant en sens inverse, poussées par le Gulf Stream et le Kuroshio. Ces derniers sont des branches de retour des courants zonaux tropicaux déviés contre les continents : courants de décharge, ils s’originalisent par rapport à l’ensemble de la circulation océanique par leur chaleur, leur vitesse élevée, leur débit imposant et leur tracé instable et sinueux (méandres). Le Gulf Stream est le plus puissant (55 millions de m3/s), en raison de l’action couplée de l’alizé et des vents d’ouest ainsi que de l’importance du transfert d’eau venu de l’autre hémisphère. C’est un véritable « jet » plaqué contre le précontinent nord-américain ; par effet topographique s’installe sur son flanc gauche un contre-courant de retour en forme de tourbillon cyclonique (fig. 18). Le Gulf Stream s’élargit vers l’aval, se divise en branches, puis disparaît vers 40° de long. O. Gulf Stream et Kuroshio se prolongent vers l’est par deux dérives (nord-atlantique et nord-pacifique) aux mouvements rendus complexes par des divergences saisonnières.

C’est dans l’hémisphère Nord que l’accélération des courants occidentaux est la plus remarquable. Dans l’autre hémisphère, l’élargissement des cuvettes océaniques et la faiblesse des échanges méridiens empêchent la réalisation d’un dispositif similaire. Les courants froids dirigés vers les basses latitudes sont peu importants, sauf le courant des Falkland, qui transporte des icebergs jusqu’au Río de La Plata ; les courants des Aiguilles, du Brésil et de l’Est australien sont de bien médiocres équivalents du Gulf Stream.


Les courants profonds

Les deux premiers types de circulation intéressent une couche d’eau épaisse de quelques centaines de mètres au plus. Le reste de la masse océanique connaît une circulation qui se caractérise par divers critères.

Sa lenteur : les échanges dépassent rarement quelques dizaines de centimètres à la seconde (15 à 25 cm/s sur le fond de l’Atlantique, selon des estimations) ; la seule exception remarquable est fournie par les courants de turbidité qui dévalent les cañons à des vitesses supérieures à 30 km/h.

Son origine : ce sont les eaux superficielles des régions polaires qui, en s’enfonçant sous les eaux chaudes des latitudes moyennes, alimentent cette circulation profonde.