Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Corée (suite)

Période de Luolang (108 av. J.-C. - 313 apr. J.-C.)

En 108 av. J.-C., l’empereur Wudi (Wou-ti), de la dynastie chinoise des Han, occupe la Corée du Nord et fonde quatre commanderies. L’une d’entre elles, Luolang (Lo-lang, en cor. Nak-nang), subsistera jusqu’en 313 apr. J.-C. La culture de Luolang, telle que l’ont révélée au début du siècle les fouilles des sépultures de la région de P’yŏng-yang, était purement chinoise. Laques datés et objets d’orfèvrerie au décor de filigranes et de granulations sont parmi les plus belles pièces de l’art des Han*. Le rayonnement de la culture de Luolang contribua au développement des communautés indigènes qui s’organisèrent successivement en trois royaumes.


Les Trois Royaumes (313-668)

Ko-gu-ryŏ est installé sur la rive nord du Ya-lu (ou Ya-lou), dès les environs de notre ère et conquiert Luolang en 313, tandis que Päk-če (ou Paikche) au sud-ouest et Sil-la au sud-est ne se constituent pas avant le ive s.

Peu de vestiges subsistent des deux premiers royaumes. Ko-gu-ryŏ est surtout célèbre pour ses grandes tombes en dalles de pierre de la région de T’ong-gu, sur la rive nord du Ya-lu, et de la région de P’yŏng-yang. Sous l’influence de la Chine, les plafonds en lanterne et les murs sont ornés de peintures. Les représentations cosmiques et les scènes rituelles auxquelles se mêlent des détails de la vie quotidienne reflètent avec fraîcheur et spontanéité les préoccupations de ce peuple de guerriers.

Le sens décoratif de Päk-če apparaît dans les tuiles et surtout les briques de pavement à décor estampé, où se retrouvent les premières composantes du paysage chinois : montagnes, eau et nuages.

Sil-la, isolé du reste du pays par des montagnes, a conservé de nombreux témoignages de sa splendeur. Les sépultures princières disséminées autour de sa capitale, Kyŏng-cu, ont livré des parures en or, bracelets, pendants d’oreilles, ceintures de cérémonie et couronnes, qui évoquent les diadèmes chamaniques de Sibérie méridionale. Des parures semblables, soit représentées sur des peintures à Ko-gu-ryŏ, soit trouvées à Päk-če ou même en Chine, montrent que Sil-la a emprunté ses thèmes décoratifs à ses voisins ou, par leur intermédiaire, à la Chine.

Exhumées en grand nombre des tumulus de Kyŏng-ču, les céramiques sont des grès de couleur grise, revêtus d’une couverture naturelle. Aux types les plus fréquents de coupes sur pied et de jarres à corps globuleux s’associent de curieux récipients en forme de corne, de chariot, de barque, de maison ou de cavalier.

Le bouddhisme pénétra en Corée dès la fin du ive s. par l’intermédiaire de Ko-gu-ryŏ. Dans ce royaume, les premières sculptures portent encore la marque des modèles chinois de l’époque des Wei du Nord (v. six dynasties). À Päk-če, d’autres influences se font jour. Les sculpteurs, en contact avec la Chine du Sud, créent des bodhisattvas au visage plein et souriant, drapés de vêtements souples qui soulignent le naturel de l’attitude. Sil-la n’adopta le bouddhisme que vers le vie s. et manifesta un régionalisme accentué où transparaît le goût de la ligne et de l’abstraction. Cependant, sous l’influence de Päk-če, il produisit de remarquables statues en bronze de Miroku (Maitreya, le bouddha de l’avenir) assis en méditation sur un trône revêtu de draperies.


Le Grand Sil-la (668-935)

Les luttes qui opposent les trois royaumes se terminent par le triomphe de Sil-la qui, avec l’aide des Tang, parvient à réunifier la péninsule. L’empreinte de la culture chinoise, diffusée par les moines et les artistes qui voyagent entre les deux pays, apparaît notamment dans le plan de Kyŏng-ču, qui copie celui de la capitale des Tang.

Le goût, propre aux Coréens, pour une architecture de pierre, favorisé par l’abondance du granit local, se manifeste dans les plates-formes en appareil cyclopéen du Pul-kuk-sa et dans la grotte artificielle du Sŏk-kul-am (ou Syökkulam), sanctuaires fondés tous deux en 751.

Les sculptures des mausolées des empereurs, tout comme les hauts-reliefs bouddhiques, révèlent la maîtrise des tailleurs de pierre. Sur le grand Bouddha du Sŏk-kul-am, le naturalisme Tang se tempère d’une recherche de spiritualité, caractéristique des œuvres du milieu du viiie s. L’art des bronziers et des orfèvres est stimulé par le bouddhisme tout-puissant. Les reliquaires et les grandes cloches décorées de nymphes (Apsaras) ou de musiciennes permettent d’imaginer les compositions élégantes de la peinture, aujourd’hui disparue.

En rapport avec les pratiques bouddhiques, les potiers se consacrent à la fabrication d’urnes funéraires à décor de rosettes estampées sous une mince glaçure plombifère.


Époque Ko-ryŏ (918-1392)

La chute des Tang, en 907, entraîna bientôt celle de Sil-la. Les centres d’activité artistique se déplacent vers la Corée centrale, où la dynastie Ko-ryŏ fixe sa capitale, Kä-sŏng (ou Kae-song). Des variantes coréennes apparaissent dans l’application des principes architecturaux empruntés à la Chine : la symétrie est souvent abandonnée, et le décor des bâtiments se réduit au seul emploi du bois poli pour souligner la pureté des formes (sanctuaires du Pu-sŏk-sa, datant de 1350).

Cette sobriété se retrouve sur les effigies bouddhiques en fonte de fer, témoins de la ferveur religieuse des souverains. Cette technique, employée depuis la fin du ixe s., renouvelle la plastique coréenne, tandis que la statuaire en bronze, dont le déclin a commencé dès la fin de l’époque du Grand Sil-la, se fige désormais dans une production stéréotypée.

Les céladons, fabriqués dans le sud du pays, dominent la céramique raffinée de l’époque. Dès 1125, un voyageur chinois vantait la richesse de leurs tons bleutés, l’élégance de leurs formes et de leurs décors. Aux pièces directement inspirées par la Chine des Song*, s’ajoutent à partir du xiie s. des œuvres originales, à décor modelé en relief ou ajouré. Les pièces « incrustées », dont les motifs incisés sont remplis de barbotine blanche ou noire, imitent les formes et les décors des orfèvreries et des laques rehaussés de nacre. Des parentés avec l’art des étoffes et de l’ébénisterie semblent indiquer que la production des céladons était dirigée par la Cour, dont les ateliers fournissaient les modèles. À partir du xiiie s., la recherche du tour de force diminue la qualité des pièces, dont le déclin est précipité par l’invasion mongole de 1236.