Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Concini (Concino) (suite)

À force de souplesse, Concini se fraie vite un chemin à la Cour. Il se rend indispensable au roi : il organise des fêtes ou bien apaise, grâce à sa femme, les humeurs de la reine ; il met la paix entre les maîtresses du roi ; il est même chargé de quelques missions diplomatiques à Florence. En 1608, il est écuyer de la reine, et le couple loge au Louvre ; Henri IV accepte d’être le parrain de leur fille. Dès 1610, Concini est déjà possesseur d’une grande fortune : n’a-t-il pas parlé d’acheter le grand domaine de La Ferté-Vidame ? La légende d’un Concini haï d’Henri IV et faisant assassiner le roi pour assouvir ses ambitions est absurde.

Marie de Médicis devenue régente, une véritable pluie d’honneurs tombe sur l’époux de la favorite. En juillet 1610, Concini est conseiller d’État ; en septembre, il est nommé successivement gouverneur de Bourg-en-Bresse, marquis d’Ancre, gouverneur de Péronne et Montdidier, premier gentilhomme de la Chambre. En 1611, il est créé lieutenant du roi en Picardie, puis gouverneur d’Amiens.

Toutes ces libéralités, cependant, font une énorme brèche dans les finances royales, soit 642 000 livres, de quoi tourner de meilleures têtes que celle du favori. Toutefois, Concini ne cherche pas à avoir part aux affaires politiques avant 1613, quand, à la stupeur générale, la régente le fait maréchal de France.

Le maréchal d’Ancre intervient alors dans les affaires ; contre Condé rebelle, il obtient le commandement de l’armée royale en Picardie et, en 1615, prend Clermont-en-Beauvaisis. Il est sacrifié temporairement lors du traité de Loudun (mai 1616), quand on lui retire le gouvernement d’Amiens, mais, deux mois plus tard, Marie de Médicis lui confie celui de Normandie et de la citadelle de Caen. Le prince de Condé est arrêté en septembre 1616 ; ses partisans en rendent responsable l’Italien, qui, terriblement jalousé et calomnié, n’y est pour rien : à Paris, où le peuple pille son hôtel, son impopularité est totale. Vainement, la régente et sa femme le pressent de s’éloigner. Il s’obstine ; soutenu par Richelieu, qu’il a fait entrer au Conseil, il prend part à la lutte contre Condé et fortifie la Normandie.

La haine du jeune roi va perdre Concini. Louis XIII et ses familiers, dont Charles de Luynes et Jean de Caumont, marquis de Montpouillan, ourdissent contre lui un complot. L’assassinat du maréchal est décidé au début de l’année 1617 ; le 24 avril, le capitaine des gardes, Nicolas de l’Hospital, marquis de Vitry, le fait abattre au moment où il entre au Louvre. Son corps, enterré à Saint-Germain-l’Auxerrois, est, le lendemain, exhumé par la populace, traîné par les rues, pendu, puis brûlé. Sans vergogne, Vitry et Luynes se partagent ses biens. Leonora est arrêtée quelques jours plus tard ; son procès commence en mai. Prévenue de lèse-majesté et de sorcellerie, elle est condamnée à avoir la tête tranchée et ensuite à être brûlée (juill. 1617).

Concini fut loin d’être le personnage machiavélique décrit par ses ennemis. Il semble avoir été le prétexte commode de la révolte des Grands contre le pouvoir monarchique, et Richelieu, dans ses Mémoires, lui reconnaît une véritable lucidité politique.

P. R.

➙ Louis XIII.

 F. Hayem, le Maréchal d’Ancre et Leonora Galigaï (Plon, 1910). / A. Franklin, la Cour de France et l’assassinat du maréchal d’Ancre (Émile-Paul, 1913). / G. Mongrédien, Leonora Galigaï : un procès de sorcellerie sous Louis XIII (Hachette, 1968).

concordat

Convention passée entre le Saint-Siège et les États de population catholique, en totalité ou en partie, sur la discipline, l’organisation ecclésiastique, à l’exclusion de la foi ou du dogme.



Généralités

Les plus anciens concordats de l’époque carolingienne, sous la forme de donations au Saint-Siège, auxquelles répondent des concessions faites par les papes aux souverains, touchent les élections épiscopales et abbatiales. Mais la forme juridique des conventions commence à se rapprocher de la forme actuelle au xiie s. avec la convention de Sutri (1111), signée par Pascal II et l’empereur Henri V, et surtout avec le concordat de Worms (23 sept. 1122), entre le pape Calixte II et l’empereur Henri V, qui met fin à la querelle des Investitures par la distinction de la juridiction temporelle et de la juridiction spirituelle des prélats.

De nombreux concordats se rattachent aux conciles de Constance et de Bâle, et se rapportent aux dissensions surgies entre les membres du concile au sujet de la réforme de la discipline ecclésiastique. Après de vains efforts de réforme générale, le pape Martin V consent à traiter séparément avec chacune des « nations ». Ainsi sont passés trois concordats en 1418 : l’un avec la nation allemande (Pologne, Hongrie, Scandinavie) ; le deuxième avec l’Angleterre ; le troisième avec les nations latines (France, Italie, Espagne).

Pour la France, le concordat du 2 mai 1418 est remplacé par un concordat signé le 21 août 1426 à Genazzano. En fait, cet acte devient vite caduc par suite des prétentions gallicanes du roi Charles VII, prétentions qui trouvent leur application dans la « pragmatique sanction » de Bourges (1438). En vue d’obtenir l’abolition de cette pragmatique, Sixte IV signe avec Louis XI, en 1472, un nouveau concordat : mais les avantages recueillis alors par la papauté et les intérêts privés lésés sont tellement importants que les parlements refusent d’enregistrer ce concordat, que Louis XI, d’ailleurs, violera délibérément.

Les pragmatiques restent donc le seul statut de l’Église de France, mais, comme ces actes émanent de la Couronne seule, ils n’ont pas de caractère contractuel ; d’ailleurs, les papes les considèrent comme hérétiques, la supériorité des conciles sur le pape y étant explicitement définie. De là des négociations qui aboutissent au concordat de 1516, entre Léon X et François Ier. Supprimant les élections, ce concordat donne au souverain le droit de nommer de nombreux archevêques, évêques et abbés, et de leur conférer les bénéfices attachés à leur siège. Le concordat de 1516 — qui restera en vigueur jusqu’en 1789 — fait du roi le vrai maître de l’Église gallicane.

Du xvie au xviiie s., la papauté signe de nombreux concordats, notamment avec la Pologne (1519-1525), l’Espagne (1717), le Portugal (1778), la Sardaigne (1797).