Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

commutation téléphonique (suite)

En toute logique, il serait nécessaire que chaque abonné puisse disposer de son propre sélecteur pour lui permettre d’atteindre n’importe lequel des cent correspondants possibles. Dans cette hypothèse, chaque ligne d’abonné aboutirait à un balai explorateur ; mais, puisque cette ligne d’abonné est susceptible d’être appelée par l’un quelconque des cent correspondants, elle doit figurer sur les bancs de broches de chacun des cent sélecteurs. C’est ce que l’on appelle le multiplage. En fait, les cent abonnés ne téléphonent pas tous au même instant, et un calcul de probabilité montre que, même aux heures de fort trafic, une quinzaine d’appels simultanés au maximum se manifestent. En effet, si l’on admet qu’à l’heure de fort trafic le nombre total de minutes de conversation, pour le groupe de cent abonnés, est de quatre cents, la probabilité pour qu’à un instant donné apparaisse un seizième appel n’est que de 0,25 p. 100 ; d’où une première concentration et l’introduction d’une présélection. Chaque abonné a, à sa disposition, une machine individuelle dont le but est de rechercher un sélecteur disponible parmi quinze sélecteurs assurant le trafic des cent abonnés. Le présélecteur est un organe tournant beaucoup plus simple que le sélecteur, puisque le balai central n’explore que quinze broches de sortie au lieu de cent, qui donnent accès à quinze sélecteurs recherchant la ligne demandée. Comme cet organe assure la connexion, il prend le nom de connecteur. Le volume des équipements est donc de cent présélecteurs et de quinze sélecteurs-connecteurs au lieu de cent sélecteurs-connecteurs, ce qui correspond à une économie notable du fait de la nature simple du présélecteur comparée à celle, complexe, du sélecteur.

Un autre moyen peut être recherché pour assurer la connexion dans des conditions économiques. Celles-ci s’effectuent à partir non pas d’une présélection, mais d’un organe appelé chercheur d’appel. Ce moyen consiste à rechercher laquelle, parmi les cent lignes, est la ligne appelante. Les cent lignes aboutissent aux broches d’un sélecteur à cent points, et, dès le décrochage de l’appareil téléphonique, le balai central va à la recherche de la ligne appelante. Ce balai est en connexion électrique permanente avec le balai central d’un deuxième sélecteur qui, recevant les trains d’impulsions, recherche la ligne demandée. Là aussi la probabilité est faible de voir se produire plus de quinze appels simultanés ; d’où le nombre de quinze ensembles chercheurs d’appels-connecteurs, ce qui représente trente sélecteurs. Lorsqu’il y a plus de cent abonnés, on est amené à mettre des sélecteurs supplémentaires qui effectuent les recherches correspondant au chiffre des centaines, des milliers, etc. Cette concentration des organes est indispensable lorsqu’on atteint des capacités de mille lignes et plus. Le calcul de concentration est développé suivant le principe de la recherche libre. Par déplacement ascensionnel de son balai, le sélecteur intermédiaire assure le choix de la centaine (ou du millier) recherchée et, par déplacement rotatif, non pas la recherche du chiffre suivant de la dizaine (ou de la centaine), mais celle d’un sélecteur libre de la chaîne parmi le nombre total de machines de la catégorie réservée à l’établissement des communications ; le balai s’arrête dès qu’il a trouvé une sortie libre.


Système Rotary

Ce système, qui vit le jour aux États-Unis et fut introduit en France en 1928, équipe encore à l’heure actuelle la majorité des centraux automatiques de Paris et des grandes villes (environ 1 130 000 lignes). Les niveaux sont encore empilés les uns sur les autres, mais chacun d’eux a son balai explorateur, et tous les balais sont fixés rigidement à un axe de rotation. La sélection s’effectue à l’aide de deux mouvements de rotation : le premier mouvement entraîne un arbre sélecteur de balais qui porte dix ergots ; le deuxième, qui entraîne l’arbre porte-balais, permet, à l’intérieur du niveau retenu, de choisir la position. Les rotations sont provoquées par embrayage commandé électriquement par les impulsions à partir d’un axe en rotation permanente.

D’autre part, dans ce système, ce ne sont plus les impulsions de cadran qui commandent directement les étages de sélection. Un enregistreur, constitué de relais électromécaniques, prend note des impulsions de cadran, puis les restitue aux sélecteurs sous forme d’ordres d’exécution suivant les besoins, ordres qui correspondent à des instructions d’embrayage, puis de débrayage : l’appel de l’abonné n’est pas perdu ; enregistré, il aboutit dès que l’enregistreur a trouvé une voie de sortie à travers tous les sélecteurs. La recherche avance donc étape par étape jusqu’à la sélection finale.

L’existence d’une mémoire intermédiaire présente un second avantage ; la nature du code de signalisation émis par le poste de l’abonné peut être de nature quelconque : il suffit que l’enregistreur traduise ce code en langage Rotary.

Enfin, la souplesse de la méthode permet de diriger l’appel non seulement vers les équipements du central téléphonique local, mais aussi vers des centraux téléphoniques lointains, ce qui permet d’envisager des itinéraires très variés d’acheminement.

Une version française du système à enregistreur, ou système R 6, fut d’ailleurs, en 1928, exploitée en France, où 650 000 lignes sont encore en service. Ce système R 6 développa l’idée maîtresse de grouper dans des organes communs des opérations qui durent des temps très brefs par rapport à la durée d’une conversation, de façon à éviter des immobilisations coûteuses. Aussi distingue-t-on deux types fondamentaux d’organes :
1o ceux qui restent immobilisés pendant toute la durée de la conversation — ce sont essentiellement des machines tournantes, des présélecteurs, des chercheurs d’appel, des sélecteurs-connecteurs ;
2o ceux qui, ne servant que pour l’établissement de la communication, sont libérés dès que les deux abonnés sont en présence et qui peuvent servir plusieurs machines — ce sont les distributeurs, les enregistreurs, les traducteurs, les orienteurs, généralement constitués de relais électromécaniques.