Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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communication (suite)

 G. K. Zipf, Selected Studies in the Principle of Relative Frequency in Language (Cambridge, Mass., 1932) ; Human Behavior and the Principle of Least Effort (Cambridge, Mass., 1949). / N. Wiener, Cybernetics or Control and Communication in the Animal and the Machine (Cambridge, Mass., 1948) ; The Human Use of Human Beings, Cybernetics and Society (Boston, 1950 ; trad. fr. Cybernétique et société, Deux Rives, 1952 ; nouv. éd.. Union générale d’éd., 1962). / C. E. Shannon, The Mathematical Theory of Communication (Urbana, Illinois, 1949). / G. Gougenheim, R. Michéa, P. Rivenc et A. Sauvageot, l’Élaboration du français élémentaire (Didier, 1956). / L. Apostel, B. Mandelbrot et A. Morf, Logique, langage et théorie de l’information (P. U. F., 1957). / N. Chomsky, Syntactic Structures (Mouton, La Haye, 1957 ; trad. fr. Structures syntaxiques. Éd. du Seuil, 1968). / P. Guiraud, Problèmes et méthodes de la statistique linguistique (P. U. F., 1960). / J. C. Lafon, Message et phonétique (P. U. F., 1961). / E. Buyssens, la Communication et l’articulation linguistique (P. U. F., 1967). / La Communication (Denoël, 1971).


Réseaux de communication dans les groupes restreints

Bien que l’étude méthodique des processus de communication dans les groupes restreints ne remonte qu’aux environs de 1940 — plus précisément aux travaux consacrés par Lewin à la dynamique de « leadership » —, la référence à la tradition demeure précieuse pour en délimiter les problèmes, et d’abord en vue de marquer la part qu’a prise à son développement l’évolution générale des techniques.

Ces processus, en effet, ce sont ceux-là mêmes que nous a, depuis Montaigne, appris à connaître la psychologie classique. Il existe entre les hommes, pense Malebranche, certains « liens naturels », qui leur sont d’ailleurs communs avec les bêtes, et qui consistent en « une certaine disposition de leur cerveau pour imiter quelques-uns de ceux avec qui ils conversent, pour former les mêmes jugements qu’ils font, et pour entrer dans les mêmes passions dont ils sont agités ». Proprement organique, donc, cette tendance doit être distinguée de « l’inclination également universelle dans le genre humain pour la grandeur et pour l’élévation » et pour « obtenir dans l’esprit des autres une place honorable ».

Il appartiendra à Adam Smith (1759) de coordonner ces deux domaines d’expérience en donnant pour explication de l’ambition le désir que nous avons de gagner à nos plaisirs la sympathie des autres, de manière à exalter le sentiment de notre propre personne. Ainsi, sous une forme spéculative, sont déjà posées quelques-unes des notions et lignes de recherche qui sont celles de la psychologie moderne : problème de correspondance entre sujets communicants, définition du statut et problème de son rapport aux processus de communication.

Pour atteindre à leur pleine détermination, il conviendra que soit précisée l’extension du domaine de la « communication ». Malebranche y comprend à la fois des processus affectifs et des processus cognitifs. La psychologie moderne tend à le restreindre aux processus cognitifs, ou plus précisément à se donner au niveau de la communication cognitive le modèle d’une interprétation de la communication affective. La psychologie expérimentale contemporaine, en raison même de sa vocation méthodologique, s’emploiera à varier et à systématiser l’organisation de ces interactions, dont elle mettra en évidence l’importance déterminante en la reliant au statut des sujets communicants.

Renouvellements au reste solidaires, puisque c’est dans la mesure même où se trouvera soulignée à différents niveaux d’analyse la structure cognitive de la communication que se constituera une notion des processus de communication susceptible d’une élaboration expérimentale.


Macro- et microcommunication

Au départ de cette conceptualisation se trouve l’analogie posée par Herbert Spencer (1820-1903) entre l’organisme vivant et la société. À peine le modèle biologique est-il en effet posé que surgit l’objection : la société, à la différence du vivant, est discontinue. En réponse interviennent les notions qui domineront jusqu’à nos jours la théorie des communications : « Pour accomplir des actions dépendant les unes des autres, il faut nécessairement que les impulsions qui concordent par l’espèce, l’intensité et le temps se transmettent d’une partie à l’autre. Cette condition se trouve remplie dans les corps vivants par les ondes moléculaires, qui dans les types inférieurs se diffusent sans forme définie, et qui dans les types supérieurs suivent des canaux définis dont la fonction a reçu la qualification significative d’internonciale. » De même, dans les sociétés, cette fonction « est remplie par les signes des sentiments et des idées, transmis d’une personne à l’autre, d’abord par des moyens vagues et à courte distance, mais plus tard sous des formes plus définies et à des distances plus grandes ».

Les notions de message et de canaux ainsi introduites préfigurent le concours que devait apporter à l’étude des communications dans les petits groupes la théorie de l’information. Mais la question se pose alors de savoir si ce changement d’échelle n’appellerait pas des précautions critiques dans l’emploi de concepts introduits d’abord au niveau macroscopique. L’intérêt de la contribution psychanalytique, fondée sur l’expérience la plus élémentaire de la communication, sera d’apporter à cette critique une base positive.

« La psychanalyse, écrit Freud dans les dernières pages de Totem et tabou (1912), nous a montré que chaque homme possède, dans son activité mentale inconsciente, un appareil qui lui permet d’interpréter les réactions d’autres hommes, c’est-à-dire d’annuler en les renversant les déplacements par lesquels l’autre avait préludé à l’expression de ses incitations affectives. » Ce type de communication, nous ne saurions le méconnaître, est celui qui s’établit dans la relation analytique entre l’inconscient de l’analyste et celui du patient. Et cette indication de Freud est d’autant plus utile qu’elle peut être très précisément située par rapport au courant « macroscopique », issu de Spencer. De celui-ci, en effet, relève la notion, présente à la science des rêves, des processus de détour, caractéristiques des processus secondaires. La conceptualisation proprement psychanalytique s’y opposera donc, en tant qu’elle engage les processus de l’inconscient, c’est-à-dire les processus primaires, et qu’à ces derniers devra correspondre un pôle original dans l’étude de la communication.