Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

codification (suite)

Ce mouvement de codification générale s’étend aux pays conquis ou dominés par Napoléon : on y applique les codes français. Le mouvement s’étend aussi aux pays qui ont besoin de cimenter leur unité récente : l’Allemagne travaille à partir de 1874 au « Bürgerliches Gesetzbuch », qui prend effet en 1900, tandis que, depuis 1865, l’Italie a son propre Code civil. Certains États des États-Unis ont aussi leurs propres codes, tandis que l’Angleterre en dote l’Inde, mais se montre pour elle-même aussi réfractaire à la codification qu’au xviie s. lors des tentatives de Francis Bacon. Il n’est pas jusqu’aux conférences de la paix, à Vienne, à Paris, à La Haye, où l’on ne parle de codifier le droit international.


La révision des codes civils

L’évolution des réalités économiques et sociales fait éclater peu à peu le cadre rigide des codes : la législation se développe en dehors d’eux, et la jurisprudence statue d’une nouvelle façon ou dans des matières nouvelles ; il faut d’abord retoucher les codes, puis les revoir et parfois les refondre entièrement. Ainsi, le divorce est supprimé du Code civil français en 1816 et réintroduit en 1884, tandis qu’échoue en 1826 une tentative de rétablissement du droit d’aînesse... Une double évolution se dessine peu à peu, qui tend vers un plus grand individualisme au sein de la famille (droits de la femme et de l’enfant) et vers une plus grande socialisation dans les affaires (barrières à la liberté contractuelle), où l’État intervient de plus en plus en régulateur du libéralisme économique. Plus tard, on semble soutenir de nouveau la cohésion familiale (Code de la famille, 1939 ; nouveaux régimes matrimoniaux, 1965 ; autorité parentale, 4 juin 1970).

Dès le centenaire du Code civil, une première commission de révision est installée, qui, trop « à la mode », s’ensable vite. Par contre, la commission de réforme du Code civil, nommée le 7 juin 1945, travaille une dizaine d’années durant à une révision du Code. C’est à l’heure actuelle une commission informelle, nommée par la chancellerie, qui remplit cet office lors du vote de lois à insérer dans le Code.

Au Japon, le problème de la révision des vieux codes (Code Taihō, 702 ; Code Jōei [ou Goseibai], 1232) s’est posé d’une façon particulière : la Restauration de 1868 et l’abolition du système féodal en sont le cadre en même temps que le théâtre des dernières influences chinoises et des premières influences européennes. Le Code de 1898 est en fait le fruit d’une jurisprudence comparée.

Tous les pays qui, au xixe s., étaient pourvus d’un Code civil ont eu à le réviser depuis, pour suivre l’évolution politique et morale générale ainsi que les changements qui lui sont propres. En U. R. S. S., en 1961, sont posés les « Fondements de la législation civile » et les « Fondements de la procédure », applicables dans le cadre de chaque république.


La révision des autres codes

On imagine aisément que la législation des faillites*, des sociétés* anonymes, des contrats*, des mandats*, des assurances maritimes ne peut plus être celle du xixe s. Une révision du Code de commerce s’imposait, qui fut faite en France dans les années 50. D’autres Codes, comme celui de la justice militaire (1965), des postes et télécommunications (1962) ou du domaine* de l’État (1962), ont été revus ou refondus. Un nouveau Code de procédure civile a vu le jour en 1975.

Si l’on prend pour exemple le droit pénal, on peut citer entre autres : le Code pénal espagnol de 1932, refondu en 1944 et révisé en 1963 ; le Code danois de 1930, revu en 1952 ; la grande commission de réforme du droit pénal allemand, qui publie une première partie générale en 1957 ; le nouveau Code pénal soviétique de 1960 ; le nouveau Code suédois « Brottsbalken », qui remplace au 1er janvier 1965 l’ancien Code de 1864.


La nouvelle vague de codification du xxe siècle

Le nouveau besoin de codification du xxe s. a de multiples origines : les États modernes doivent faire face à une « inflation » administrative ; les lois, les règlements interviennent dans de nouveaux domaines comme le travail*, la sécurité* sociale, la circulation* routière, etc. ; enfin, au niveau international, le rapprochement des pays par le développement des relations internationales culturelles ou commerciales, la politique d’influence des pays nantis sur ceux du tiers monde, la politique de regroupements plus étroits encore (Europe, zone dollar, U. R. S. S. et républiques socialistes) font qu’il est nécessaire d’avoir un minimum de droit commun à certains pays (conférence de codification de la S. D. N., 1927-1930 ; commission du droit international de l’O. N. U., fondée en 1947) ; pour cela, chaque pays doit faire le point de sa situation législative et réglementaire.

Même en Angleterre, la tendance à codifier est de plus en plus grande : la statute law gagne peu à peu sur la common law, et une procédure de codification a été mise sur pied : « Consolidation of Enactments [Procedure] Act » (1949). Aux États-Unis, de 1930 à 1950, vingt-sept États ont promulgué une compilation officielle de leur législation ; en 1970, tous les États, sauf la Louisiane, ont adopté un « Uniform Commercial Code ».

Quant aux nouveaux régimes, ils mettent sur pied des systèmes entiers de codes. C’est le cas de la Bulgarie (Codes du travail et pénal en 1951 ; Codes de procédure civile et de procédure pénale en 1952), de la Tchécoslovaquie (Code civil en 1951, revu en 1964 ; Codes pénal et de procédure pénale en 1961 ; Codes de la famille et de procédure civile en 1963 ; Code économique en 1963 ; Code du travail en 1966), de la Grèce (Code de procédure civile en 1967) et du Maroc (Code du droit musulman du 22 Muḥarram 1377, ou 19 août 1957). Les pays récemment indépendants établissent un code de nationalité*.

La France doit faire face, comme tous les pays, aux problèmes nouveaux. Sous le second Empire s’était ébauchée une législation du travail que l’on entreprit de codifier en 1907 (elle fait l’objet, aujourd’hui, du Code du travail de nov. 1973), tandis que, depuis, de nouveaux codes ont vu le jour, relatifs à la Sécurité sociale (20 mai 1955), à la mutualité (5 août 1955) à la famille et à l’aide* sociale (24 janvier 1956). En outre, un nouveau Code du travail a été promulgué en 1973.