Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

cirque (suite)

Outre-Rhin, la popularisation des jeux de la piste naquit du passage de deux écuyers venus d’Espagne : Pierre Mahyev et Juan Porte, ainsi que des escales que firent plusieurs troupes françaises, telles celles de Tourniaire, de Fouraux, de Soullier, de Gautier, de Loisset, etc. Les uns firent des élèves, les autres des émules si brillants que l’Allemagne et l’Autriche devinrent les pays où l’on vit les meilleurs cirques. Dès 1843, Ernst Renz, dont le patronyme continue à être populaire sur le voyage et dont les disciples furent aussi de grands directeurs (Salamonski, Carré, Schumann), imposa le cirque allemand, et, en 1847, son établissement était considéré comme le plus parfait des cirques d’Europe centrale.

Le cirque allemand s’honore également des noms de Christopher de Bach, Blumenfield, P. Busch, Lorch, Strassburger, Corty, Gleich, Sarrasani, Althoff, Probst, Aéros, K. Krone, sans oublier Carl Hagenbeck, qui créa aussi l’un des plus grands zoos mondiaux à Stellingen et l’un des plus importants commerces de fauves.

L’Italie a donné un grand nombre d’artistes au cirque moderne ; toutefois, la majorité d’entre eux ont fait carrière hors de ses frontières. Cela commença avec les Franconi, auxquels les pistes doivent tant ; ensuite, les Guillaume, les Priami, les Pierrantoni, les Sidoli, Ciotti, Guerra, Truzzi, Ciniselli, les Frediani, les Fratellini, les Caroli, les Zavatta (pour ne citer que les plus connus) s’expatrièrent.

En Italie, pas de cirques fixes, mais, de tout temps, les petits chapiteaux foisonnèrent, et l’amateur peut toujours, peut encore, au hasard d’une place de village, découvrir des artistes de pure tradition et surtout, plus qu’ailleurs, la pérennité d’un ton banquiste savoureux, qui est d’ailleurs encore perceptible même lorsque les tours de toile s’agrandissent. Le cirque italien, même dans les proportions actuelles de ses grands chapiteaux (ceux, par exemple, d’Orfei et de Togni, les plus importantes familles transalpines de cirque contemporain), reste une affaire familiale.

En U. R. S. S., ce sont des Français qui donnèrent aux Russes le goût du cirque. Tourniaire, Cuzent, Soullier, directeurs et écuyers de classe en représentations semèrent le bon grain que devait faire germer l’Allemand Magnus Hinné en se fixant à Moscou et à Saint-Pétersbourg, grain que récolta, en fin de compte, Gaetano Ciniselli, qui devint son beau-frère.

À Ciniselli succéda Salamonski, puis, notamment, Nikitine Beketov et César Sidoli.

Actuellement, les cirques sont nationalisés, et les autorités soviétiques ont pour le cirque les mêmes attentions que pour la danse, le théâtre, le cinéma, la radio et la télévision.

Depuis 1927 existe à Moscou une École nationale des arts du cirque. Les traditions y sont enseignées, perpétuées par d’anciens artistes, et les recherches y sont encouragées ; cela permet aux vocations de s’épanouir et de retrouver le climat d’émulation qui était jadis celui de tous les gens du voyage, au temps où les cirques étaient surtout des entreprises familiales.

Les écoles du cirque présentent régulièrement leurs élèves sur la piste du cirque de Moscou.

Notons aussi le souci de sécurité des artistes, qui, lors de l’exécution d’exercices dangereux, doivent obligatoirement être attachés à un filin presque invisible.

Il y a une centaine de cirques en U. R. S. S. : de grandes constructions ouvertes soit en été, soit en hiver ; de petits « pavillons » de 200 à 300 places sis dans de plus modestes localités ; enfin, une dizaine de chapiteaux tournent de février à novembre.

Le cirque de Moscou et celui de Leningrad donnent des représentations durant dix à onze mois par an, et une sélection de leurs meilleurs numéros fait assez régulièrement des tournées internationales.

Dans tous les pays de l’Est, les spectacles de cirque sont très prisés et honorés ; certains établissements, tels le Fövárosi Nagy Cirkusz de Budapest, le cirque d’État de Sofia, le cirque de la République populaire de Bulgarie, le cirque yougoslave Adria, le cirque tchèque Humberto, le cirque polonais Warszawa, etc., ont une réputation dépassant leurs frontières.

Parmi les autres établissements européens, il convient de citer en Belgique ceux de De Jonghe, Demuynck, Decock, Johny, Carrington et Malter ; aux Pays-Bas, le cirque Carré d’Amsterdam et les chapiteaux de Mikkenie, Mullens, Van Bever, Boltini.

Dans les pays nordiques, qui prirent goût aux jeux de la piste grâce aux écuyers Jacques Fouraux, Jean Léonard Houcke, puis Schumann, de remarquables chapiteaux voyagèrent ; les principaux furent ou sont encore :
— au Danemark, Moreno, Vivi Schmitt, Benneweiss, Miehe et Schumann ;
— en Norvège, Berny, Arnado et Lowe ;
— en Finlande, Sariola ;
— en Suède, Myjarès Schreiber, Scott, Orlando, Rolando et Trolle Rhodin.

La Suisse accueillit pour la première fois un vrai cirque en 1849. Il était dirigé par l’écuyère Fanny Dumos et le dresseur Gaetano Ciniselli. Ensuite vinrent de nombreux chapiteaux, notamment de France et d’Allemagne.

Le premier cirque purement helvétique apparut en 1868 : ce fut le cirque d’Anthony et Luttgens. Puis Genève eut un cirque stable, fondé par le Français Théodore Rancy en 1880, et, en 1903, un Cirque national suisse, dirigé par le capitaine Léon Martin.

Les plus importants banquistes furent des danseurs de corde, les Stey, les Nocks, les Buhlmann, les Bugler, les Tonelli et surtout les Knie, dont l’établissement est depuis longtemps le prototype du cirque helvétique.

D’origine autrichienne, les Knie donnèrent tout d’abord leurs spectacles entre ciel et terre, d’un clocher à un autre, d’un mât à un autre. À ces exercices s’ajoutèrent ensuite des numéros acrobatiques et de petites pantomimes. La troupe voyageait, en 1864, sous l’enseigne Arène Knie, compagnie de danseurs et d’artistes. La Suisse étant leur principal champ d’action, ils en adoptèrent la nationalité, et, lorsqu’en 1919 l’établissement devint un vrai cirque, il put prétendre au titre de Cirque national suisse.