Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

cicatrisation (suite)

Différents types de cicatrisation


La cicatrice normale

• Per primum. C’est la cicatrice idéale dans laquelle il n’existe aucun écart entre les tranches tissulaires. Le meilleur exemple en est la plaie chirurgicale recousue, dans laquelle on veille à un bon affrontement des berges.

• Par seconde intention. Elle se rencontre lorsqu’il existe une perte de substance cutanée d’une certaine importance, c’est-à-dire lorsque le mécanisme de contraction ne permet pas d’affronter complètement les berges. L’espace intermédiaire est alors recouvert par la prolifération épithéliale.


Les cicatrices pathologiques

• La plaie granuleuse. La perte de substance est trop importante, et tous les stades de la cicatrisation ne peuvent souvent avoir lieu. La périphérie, après un net effort, ne se contracte plus, le revêtement épithélial progresse très lentement ou pas du tout. Les deux principales causes en sont les dimensions excessives de la perte de substance et l’infection, qu’il importe de combattre par tous les moyens.

• Retard et absence de cicatrisation. La cicatrisation dépend de la multiplication cellulaire, donc de la capacité de l’organisme à réaliser la synthèse de néo-protéines. Celle-ci est d’autant plus rapide que l’état général est meilleur.

L’hypoprotidémie (baisse du taux des protéines du sang), l’anémie, la cachexie sont des facteurs de retard de cicatrisation. Parfois, chez certains dénutris graves (comme chez les grands brûlés), celle-ci ne se fait pas. Le traitement de l’état général est donc un facteur adjuvant capital.

• Cicatrices vicieuses. Ce sont des cicatrices irrégulières, dures, douloureuses. Elles relèvent de différentes étiologies : l’infection, la persistance de corps étranger, les retards de cicatrisation liés à une perte de substance importante, les incisions mal orientées (facteur de cicatrice rétractile).

• Chéloïdes et cicatrices hypertrophiques. Dans les deux cas, il s’agit de cicatrices gonflées et rouges sur toute leur longueur. La frontière entre les deux affections est assez mal limitée, même au point de vue anatomo-pathologique ; seul le facteur temps permet de différencier la chéloïde, qui est définitive, de la cicatrice hypertrophique, qui régresse dans un délai variable.

La cause principale de ce vice de cicatrisation réside dans une hypertrophie anormale du tissu conjonctif.


Chirurgie des cicatrices

Devenue assez courante, cette chirurgie ne saurait en aucun cas « effacer » les cicatrices, mais peut simplement les rendre moins visibles en utilisant au minimum le ponçage à l’aide d’une meule rotative et au maximum les excisions avec plastie cutanée et greffe éventuelle. C’est une chirurgie qui donne des résultats très satisfaisants, à la condition que les indications en soient judicieusement posées.

Il convient d’insister sur les difficultés du traitement chirurgical des chéloïdes, qui ont une très grande tendance à la récidive et pour lesquelles il y a lieu de compléter l’exérèse par un traitement radiothérapique.

A. J.

 D. Slone (sous la dir. de), Wound Healing (Oxford, 1961). / La Cicatrisation (C. N. R. S., 1965).

Cicéron

En lat. Marcus Tullius Cicero, orateur, homme politique et philosophe (Arpinum 106 - Formies 43 av. J.-C.).


Un des plus grands noms de la Rome antique, il doit cette notoriété à l’étendue et à la variété de son œuvre : des discours d’une brûlante actualité ; une volumineuse correspondance où il commente au jour le jour son action publique, se livre lui-même tout entier, avec ses scrupules, ses incertitudes ; des écrits théoriques où il s’efforce de définir les fondements moraux et métaphysiques de son activité quotidienne. Il est le témoin, l’un des principaux acteurs, il fut enfin l’une des victimes de cette grande mutation qui chez les Romains aboutit alors — pour la première fois, semble-t-il, dans l’histoire humaine — à la constitution d’un État de type moderne, gouverné, administré par des hommes susceptibles de se sentir responsables, voué en principe au bien commun. Enfin, Cicéron est un des hommes de l’Antiquité sur lesquels nous pouvons de façon directe, immédiate, savoir le plus de choses ; en sa personne nous arrivons à voir vivre pendant une trentaine d’années un de nos congénères d’il y a deux mille ans : nous lisons ses lettres, nous entendons sa parole ; c’est une rencontre qu’il n’est pas donné de faire bien souvent.


Premières expériences (106-82)

Il est originaire d’Arpinum, petite ville des Volsques, aux confins du pays marse, dans les contreforts de l’Apennin. Depuis 188, les citoyens d’Arpinum sont Romains de plein droit et participent aux élections de Rome ; mais, si loin malgré tout de la capitale — une centaine de kilomètres —, ils consacrent à leur vie locale une bonne part de leurs activités. Même quand il sera devenu le premier citoyen de Rome, Cicéron se sentira toujours un « provincial », lié de cœur aux intérêts et traditions de la petite bourgeoisie des municipes, un étranger vis-à-vis des grandes familles de la noblesse romaine, mais plein de réserve aussi et parfois désarmé devant l’impulsivité, la versatilité des foules urbaines.

Nous arrivons à entrevoir à travers les propos de son petit-fils la personnalité du grand-père de l’orateur. Un homme à l’ancienne mode, batailleur et processif, lié d’amitié ou en rapports d’estime avec M. Aemilius Scaurus, alors prince du sénat. La famille est de rang équestre, ce qui implique la possession d’une certaine fortune et une respectabilité qui, lors des recensements, rend possible l’inscription parmi les chevaliers romains. À la fin du iie s. av. J.-C., le grand homme d’Arpinum est Marius, homme de guerre remarquable qui vient presque simultanément de débarrasser les Romains des menaces qui pesaient sur leurs villes en Afrique (guerre de Jugurtha) et dans la plaine du Pô (invasion des Cimbres et des Teutons) ; avant de se laisser griser par ses succès et ses ressentiments, se faisant le protagoniste d’une abominable guerre civile, Marius lui aussi a commencé sa carrière dans le sillage de ces Romains éclairés, les Metelli, Scaurus, qui dans une cité divisée par l’assassinat de Caius Gracchus (121) essaient de refaire une unité nationale avec les chevaliers, la bourgeoisie des municipes et la partie la plus progressiste du sénat. Il apparaît aujourd’hui, beaucoup mieux qu’on ne le comprenait naguère, que Cicéron dans sa carrière a prolongé des traditions politiques d’origine locale et même familiale ; la connaissance de ces traditions restitue à son action une unité, une continuité qu’on a parfois méconnues.