Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

chimiothérapie (suite)

Différentes chimiothérapies

Les premiers travaux relevant véritablement de la chimiothérapie, au début du xxe s., ont trait aux parasitoses tropicales et à la syphilis, maladies qui échappent aux méthodes sérothérapiques et vaccinothérapiques introduites par Pasteur. Ces travaux conduisent à la synthèse :
1o de colorants trypanocides, trypan rouge (Ehrlich et Kiyoshi Shiga, 1904), trypan bleu (Nicolle et Mesnil, 1906), 205 Bayer, dont la préparation est bientôt réalisée par Ernest Fourneau et Jacques Tréfouël (1920), substance active contre la maladie du sommeil, dénommée suramine sodique ;
2o de colorants jaunes antibactériens (actiflavine antigonococcique) et antipaludéens, comme la mépacrine, qui s’est substituée à la quinine ;
3o de composés organo-antimoniaux actifs contre les Bilharzies, les Trichomonas, les Filaires, les Leishmanias (ce sont les émétiques) ;
4o de composés organo-arsenicaux spirillicides (les travaux d’Ehrlich le conduisirent à la tryparsamide et à l’arsphénamine [« 606 » Ehrlich], à laquelle on préféra bientôt la néoarsphénamine [« 914 »], moins toxique et qui ne fut supplantée que par la pénicilline) ;
5o de composés organo-bismuthiques antisyphilitiques : iodobismuthate de quinine, oxydes de bismuth hydratés, butylthiolaurate de bismuth, ce dernier encore utilisé en synergie avec la pénicilline.

Depuis 1935 environ, des milliers de corps ont été isolés ou synthétisés, qui ont montré les propriétés chimiothérapiques les plus diverses. Ainsi les antibactériens (antiseptiques*, sulfamides*, antibiotiques*), les anticancéreux (alcaloïdes, hormones, antifoliques, antipurines, moutardes à l’azote [v. cancer]), les anticoagulants* (héparines, coumarines, indanediones), les antidiabétiques (sulfamides, biguanides), les antihistaminiques*, les antiépileptiques, les substances neurotropes.


Modes d’action des chimiothérapies

Ehrlich pensait que l’action de ces médicaments était due à un renforcement des défenses naturelles de l’hôte. Ayant remarqué la propriété que possèdent les colorants de se fixer électivement sur certaines cellules, il eut l’idée de les utiliser pour porter leur action sur le parasite ou sur le tissu malade. En fait, l’activité des médicaments chimiques est due à leur intervention dans les divers métabolismes, au niveau de la cellule, telle que blocage de l’acide para-amino-benzoïque (sulfamides) ou blocage de certaines enzymes ou co-enzymes (diurétiques). La toxicité du médicament est d’autant moindre que ces interventions peuvent être plus facilement compensées par l’organisme malade.

Ainsi la recherche chimiothérapeutique, primitivement orientée vers les médicaments antiparasitaires, puis vers les anti-infectieux, s’applique pratiquement aujourd’hui à l’ensemble de la recherche pharmacologique. Alors que la recherche était, au début, directement dirigée vers l’agent infectieux, la production de nouvelles molécules est aujourd’hui telle qu’il est plus avantageux de les étudier systématiquement du point de vue de leurs propriétés thérapeutiques. Si un de ces nouveaux corps se révèle digne d’intérêt, on établit pour lui, selon ses caractères propres, la procédure des essais physiques et chimiques, ainsi que de l’expérimentation physiologique et toxicologique sur l’animal. Alors seulement, le nouveau médicament pourra être étudié dans les services hospitaliers spécialisés, avant d’être commercialisé.

R. D.

➙ Antibiotiques / Diurétiques / Psychotrope / Sulfamide.

 A. Goldin (sous la dir. de), Advances in Chemotherapy (New York et Londres, 1964-1968 ; 3 vol.). / L. F. Larionov, Cancer Chemotherapy (Oxford, 1965). / M. Privat de Garilhe, la Chimiothérapie (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1971).

chimiques (industries)

Une des principales branches de l’activité technique et économique contemporaine.


Parmi les grandes industries modernes, la chimie est l’une des plus récentes. Elle apparaît en Angleterre et en France à la fin du xviiie s. avec la fabrication du vitriol (acide sulfurique concentré) et celle du carbonate de soude par le procédé Leblanc. Cette industrie chimique minérale à base de soufre, de pyrites, de sel marin ou de sel gemme, de potasse, de nitrates s’adjoint une branche organique au milieu du xixe s. avec la fabrication des colorants artificiels extraits du goudron de houille (1847 à Lyon, jaune à l’acide picrique de Guinon ; 1856 à Londres, mauvéine de Perkin ; 1859 à Lyon, fuchsine de Verguin). Moins d’un siècle plus tard, le pétrole et le gaz naturel se substituent peu à peu au charbon comme matières premières d’une industrie chimique organique fabriquant toutes sortes de produits autres que les colorants.

Cette jeune industrie est en expansion : elle pénètre de nombreux domaines professionnels. Ainsi les fibres artificielles et synthétiques, qui sont de véritables produits chimiques, représentent près de 40 p. 100 du tonnage mondial des matières premières textiles. Les matières plastiques ont envahi plusieurs secteurs d’activité : matériaux de construction, industrie du verre, métallurgie, agriculture, conditionnement et emballage, etc. Pour de nombreux usages (médicaments, parfums, insecticides, engrais, lessives et produits d’entretien), le produit chimique s’impose à la consommation sous forme de mélanges préparés par l’industrie dite « parachimique ».

Aussi le recensement des industries chimiques présente-t-il quelques difficultés. En France, l’expression de grande industrie chimique comprend les fabriques d’acide sulfurique, les soudières, les centrales de gaz comprimés, les usines d’électrochimie, les industries de la synthèse organique, la fabrication des engrais, des produits pour l’agriculture, des lessives et des produits d’entretien, des abrasifs. Au sens large, l’industrie chimique rassemble aussi les peintures et vernis, la pharmacie, la parfumerie, le travail du caoutchouc, la transformation des plastiques, le raffinage du pétrole, la production de fibres artificielles et synthétiques.