chimiothérapie (suite)
Différentes chimiothérapies
Les premiers travaux relevant véritablement de la chimiothérapie, au début du xxe s., ont trait aux parasitoses tropicales et à la syphilis, maladies qui échappent aux méthodes sérothérapiques et vaccinothérapiques introduites par Pasteur. Ces travaux conduisent à la synthèse :
1o de colorants trypanocides, trypan rouge (Ehrlich et Kiyoshi Shiga, 1904), trypan bleu (Nicolle et Mesnil, 1906), 205 Bayer, dont la préparation est bientôt réalisée par Ernest Fourneau et Jacques Tréfouël (1920), substance active contre la maladie du sommeil, dénommée suramine sodique ;
2o de colorants jaunes antibactériens (actiflavine antigonococcique) et antipaludéens, comme la mépacrine, qui s’est substituée à la quinine ;
3o de composés organo-antimoniaux actifs contre les Bilharzies, les Trichomonas, les Filaires, les Leishmanias (ce sont les émétiques) ;
4o de composés organo-arsenicaux spirillicides (les travaux d’Ehrlich le conduisirent à la tryparsamide et à l’arsphénamine [« 606 » Ehrlich], à laquelle on préféra bientôt la néoarsphénamine [« 914 »], moins toxique et qui ne fut supplantée que par la pénicilline) ;
5o de composés organo-bismuthiques antisyphilitiques : iodobismuthate de quinine, oxydes de bismuth hydratés, butylthiolaurate de bismuth, ce dernier encore utilisé en synergie avec la pénicilline.
Depuis 1935 environ, des milliers de corps ont été isolés ou synthétisés, qui ont montré les propriétés chimiothérapiques les plus diverses. Ainsi les antibactériens (antiseptiques*, sulfamides*, antibiotiques*), les anticancéreux (alcaloïdes, hormones, antifoliques, antipurines, moutardes à l’azote [v. cancer]), les anticoagulants* (héparines, coumarines, indanediones), les antidiabétiques (sulfamides, biguanides), les antihistaminiques*, les antiépileptiques, les substances neurotropes.
Modes d’action des chimiothérapies
Ehrlich pensait que l’action de ces médicaments était due à un renforcement des défenses naturelles de l’hôte. Ayant remarqué la propriété que possèdent les colorants de se fixer électivement sur certaines cellules, il eut l’idée de les utiliser pour porter leur action sur le parasite ou sur le tissu malade. En fait, l’activité des médicaments chimiques est due à leur intervention dans les divers métabolismes, au niveau de la cellule, telle que blocage de l’acide para-amino-benzoïque (sulfamides) ou blocage de certaines enzymes ou co-enzymes (diurétiques). La toxicité du médicament est d’autant moindre que ces interventions peuvent être plus facilement compensées par l’organisme malade.
Ainsi la recherche chimiothérapeutique, primitivement orientée vers les médicaments antiparasitaires, puis vers les anti-infectieux, s’applique pratiquement aujourd’hui à l’ensemble de la recherche pharmacologique. Alors que la recherche était, au début, directement dirigée vers l’agent infectieux, la production de nouvelles molécules est aujourd’hui telle qu’il est plus avantageux de les étudier systématiquement du point de vue de leurs propriétés thérapeutiques. Si un de ces nouveaux corps se révèle digne d’intérêt, on établit pour lui, selon ses caractères propres, la procédure des essais physiques et chimiques, ainsi que de l’expérimentation physiologique et toxicologique sur l’animal. Alors seulement, le nouveau médicament pourra être étudié dans les services hospitaliers spécialisés, avant d’être commercialisé.
R. D.
➙ Antibiotiques / Diurétiques / Psychotrope / Sulfamide.
A. Goldin (sous la dir. de), Advances in Chemotherapy (New York et Londres, 1964-1968 ; 3 vol.). / L. F. Larionov, Cancer Chemotherapy (Oxford, 1965). / M. Privat de Garilhe, la Chimiothérapie (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1971).