Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Cézanne (Paul) (suite)

Jalons biographiques

19 janv. 1839

Naissance de Paul Cézanne, fils naturel reconnu de Louis Auguste Cézanne, modeste chapelier à Aix-en-Provence, et d’Elisabeth Aubert.

1841

Naissance de Marie, la première des deux sœurs de Paul et celle qui tiendra la plus grande place dans sa vie.

1844

Mariage des parents de Cézanne.

1848

Louis Auguste, homme habile et autoritaire qui a réussi dans son négoce, fonde une banque. Son succès ne lui ouvrira pourtant pas les portes de la bourgeoisie aixoise.

1852-1858

Paul Cézanne fait de bonnes études au collège Bourbon et devient un virtuose du vers latin. Amitié, notamment, avec Émile Zola ; escapades dans la campagne aixoise et exaltations poétiques. Cours du soir à l’école de dessin d’Aix.

1859

Commence des études de droit, obéissant à son père. Celui-ci achète, à un kilomètre et demi d’Aix, la villa aristocratique du Jas de Bouffan, où le jeune homme commence à peindre.

1861

Finit par obtenir l’autorisation, en avril, d’aller étudier la peinture à Paris, où l’attend Zola. Crise de découragement et retour à Aix en décembre.

nov. 1862 - juill. 1864

Second séjour à Paris. Travaille à l’académie Suisse (du nom de son propriétaire), où il fait la connaissance, notamment, d’Armand Guillaumin et de Camille Pissarro. Échoue au concours d’entrée de l’École des beaux-arts (motif : « il peint avec excès »). Au Louvre, où toute sa vie il reviendra, admire et copie les œuvres des Vénitiens, de Rubens, des Espagnols, de Michel-Ange, de Delacroix aussi.

1864-1870

Travaille alternativement à Paris et à Aix. Ses envois au Salon officiel (surtout des portraits) sont refusés.

été 1870 - été 1871

Vit à l’Estaque avec sa belle compagne, Hortense Fiquet, ouvrière brocheuse et modèle âgée de dix-neuf ans, en cachant cette liaison à son père.

1872

Le 4 janvier, Hortense met au monde leur fils Paul. Plus tard, ils s’installent à Saint-Ouen-l’Aumône, rejoignant Pissarro, établi à Pontoise.

1873

À Auvers-sur-Oise, auprès du docteur Paul Ferdinand Gachet. Cézanne travaille en compagnie de Pissarro, qui lui fait connaître le marchand de couleurs Julien Tanguy. Celui-ci lui fournira matériel et couleurs en échange de quelques toiles.

1874-1877

Se partage entre Aix et Paris, où il laisse toujours Hortense et son fils. Participe à la première (1874) et à la troisième (1877) exposition des « Impressionnistes ». Refusera de participer aux expositions suivantes (de 1879 à 1886), préférant tenter sa chance au Salon. Auguste Renoir lui présente un modeste amateur, Victor Chocquet ; leur commune admiration pour Delacroix lie les deux hommes, et Chocquet deviendra le plus sûr soutien de Cézanne.

1878

Fait la navette entre Marseille, où il a installé Hortense, l’Estaque et Aix. Son père, qui a deviné sa liaison, diminue la pension mensuelle qu’il lui servait ; mais après réconciliation, en fin d’année, il la porte à un montant supérieur.

mars 1879 - oct. 1882

Principalement à Paris et en Île-de-France : Melun en 1879 ; Pontoise en 1881, auprès de Pissarro, que Gauguin vient également voir ; plusieurs séjours chez Zola à Médan. Hiver 1881-82 à l’Estaque, visite de Renoir. Au printemps de 1882, une de ses toiles est « repêchée » pour le Salon, mais nul ne l’y remarque.

fin 1882-1885

Se retire au Jas de Bouffan, puis à l’Estaque. Rédige un testament. Amitié avec le peintre Adolphe Monticelli.

1885

Amour malheureux pour une servante du Jas de Bouffan : la correspondance de Cézanne, comme ses déplacements, trahit une grande agitation. En juin-juillet, séjour chez les Renoir, à La Roche-Guyon. Automne et hiver à Gardanne.

1886

La publication de l’Œuvre de Zola, portrait d’un artiste « raté », marque pratiquement la fin de l’amitié des deux hommes.
28 avril : mariage avec Hortense Fiquet, dans un esprit de régularisation. Été à Paris et visite à la boutique de Tanguy, où les toiles de Cézanne sont de plus en plus admirées par les jeunes peintres (Émile Bernard en premier lieu).
23 octobre : mort de son père, qui lui laisse une importante fortune.

1888-1890

Surtout à Paris et, en 1888, plusieurs mois à Chantilly.

1891-1893

En mauvaise santé depuis plusieurs années, apprend qu’il est diabétique. Voyage en Suisse en 1891. Déplacements divers : Jas de Bouffan, région parisienne...

automne 1894

À Giverny, Claude Monet le présente à Rodin, à Georges Clemenceau, au critique Gustave Geffroy, qui vient de lui consacrer un article élogieux.

automne 1895

Sa première exposition particulière, organisée par Ambroise Vollard, fait sensation.

1896

Amitié avec le jeune poète aixois Joachim Gasquet. Cure à Vichy en juin, puis Talloires (lac d’Annecy) et Paris.

1897

Paris (où sa femme et son fils vivent désormais en permanence), Aix fin mai. Loue une pièce au Château Noir, vieille ferme dans les collines du Tholonet, près de la carrière Bibemus. Deux toiles de Cézanne figurent dans la salle du musée du Luxembourg réservée au legs du peintre et collectionneur Gustave Caillebotte. Perte de sa mère le 25 octobre.

automne 1898 - automne 1899

Paris et région parisienne. Laisse vendre le Jas de Bouffan et prend un appartement à Aix. Expose trois toiles au Salon des Indépendants. La Galerie nationale de Berlin achète deux Cézanne (tandis que la ville natale du peintre continue de le bouder obstinément).

1900

Représenté, grâce à Roger Marx, à l’Exposition centennale de l’art français.

1901

Maurice Denis expose son Hommage à Cézanne.

1902

Construction de l’atelier du chemin des Lauves. Visites de Charles Camoin et de Léo Larguier. La Légion d’honneur, demandée par Octave Mirbeau, lui est refusée.

1904

Visite d’Émile Bernard à Aix. Dernier séjour à Paris et Fontainebleau. Hommage d’une salle entière au Salon d’Automne.

22 oct. 1906

Mort de Cézanne, âgé de soixante-sept ans.

Chabrier (Emmanuel)

Compositeur français (Ambert 1841 - Paris 1894).



Un amateur... de métier

Cet employé au ministère de l’Intérieur, qui décide à trente-huit ans de consacrer sa vie à la musique après une audition enthousiaste du Tristan de Wagner à Munich ; cet « ange du cocasse » — selon Verlaine — à la verve intarissable, fier de ses origines et de son franc-parler ; cet ami des peintres et des gens de lettres ; ce cœur sensible, qui se révèle dans les célèbres Lettres à Nanine comme dans toute sa correspondance ; cet homme généreux et spontané, dont on a voulu faire une sorte de Rabelais musical ; ce compositeur enfin, dont l’œuvre fut trop exclusivement étiquetée comme « truculente », n’est pas si autodidacte qu’on l’a laissé entendre. S’il recopie volontiers les grands maîtres pour se mieux pénétrer de leur esprit, s’il n’est pas passé par le Conservatoire ni par l’école Niedermeyer, il n’en a pas moins étudié, et dès son plus jeune âge, la composition avec Théophile Semet et Aristide Hignard, la technique violonistique avec Hammer, l’accompagnement avec Tarnovski, et surtout le piano avec Manuel Zaporta et E. Wolff (familier de Chopin et pianiste réputé). Ses contemporains — et ses biographes — s’accordent pour voir tout d’abord en lui un virtuose prodigieux, dont la technique, enrichie de procédés empiriques personnels, transformait l’instrument en orchestre, bouleversant les lois ordinaires de l’interprétation.