Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

cémentation

Opération métallurgique ayant pour but d’obtenir des caractéristiques particulières des pièces ou des produits traités par diffusion d’un ou de plusieurs éléments soit dans toute la masse (cémentation à cœur), soit seulement dans les couches externes (cémentation superficielle).


La cémentation à cœur n’est plus pratiquée ; elle consistait à chauffer des barres de fer en présence d’un cément carburant pendant plus d’une semaine dans des caisses. Après fusion au creuset, on obtenait de l’acier à haute teneur en carbone.

La cémentation superficielle, actuellement la seule pratiquée, s’appliquait à l’origine à l’enrichissement par le carbone de pièces finies en acier doux. Le terme de cémentation s’est généralisé à tout traitement d’enrichissement superficiel d’une pièce métallique par un élément métal ou métalloïde (aluminium, chrome, zinc, azote, bore). L’objet de ce type de cémentation est de combiner des caractéristiques différentes à cœur et en surface des pièces, telles que dureté superficielle, résistance à l’usure, tenue à la corrosion, inoxydabilité à chaud.


Cémentation de l’acier par le carbone

On applique ce traitement à l’acier doux afin que l’ensemble de la pièce conserve à cœur des propriétés de capacité de déformation, d’allongement, de résilience et de faible dureté, et en surface des propriétés caractéristiques de l’acier dur riche en carbone, telles que dureté, résistance à l’usure et au matage. Le traitement s’effectue en deux temps :
1. Cémentation proprement dite. La pièce en acier doux est chauffée, en présence d’un cément qui fournit le carbone, à une température comprise entre 900 et 950 °C. À cette température, le fer gamma, ou constituant austénite, dissout particulièrement le carbone, et, par diffusion, la surface de la pièce s’enrichit lentement jusqu’à 0,8 p. 100 en carbone, constituant ainsi un acier extra-dur. La teneur en carbone décroît de la surface vers l’intérieur, et, suivant les conditions de traitement (nature du cément, température, temps), l’épaisseur cémentée atteint couramment 0,7 ou 1 mm et même 3 mm ;
2. Durcissement par trempe de la couche cémentée. Afin d’obtenir en surface de la pièce et dans les couches superficielles des caractéristiques optimales, notamment la dureté, on pratique un traitement ultérieur de trempe. On obtient ainsi vers la surface une structure martensitique dure, alors que le cœur de la pièce à faible teneur en carbone, qui n’est pas durci lors du traitement, conserve une certaine capacité de déformation. Avec des aciers doux ordinaires, par suite du grossissement des cristaux à cœur par surchauffe, il est nécessaire de pratiquer une double trempe, la première permettant de régénérer la structure à cœur et la seconde apportant le durcissement superficiel. Par l’emploi d’aciers dits « de cémentation » à 2 p. 100 de nickel avec des additions éventuelles de 0,3 p. 100 de chrome et de molybdène, une seule trempe est suffisante, le nickel limitant le grossissement des grains lors du chauffage de cémentation.

La pratique de la cémentation et les résultats diffèrent suivant la nature du cément utilisé.

• La cémentation en caisse avec un cément solide, procédé le plus ancien, est maintenant réservée soit aux pièces volumineuses, soit aux pièces de petites séries telles que pièces d’outillage. Elle a pour avantages de pouvoir utiliser des installations courantes peu coûteuses et de permettre l’obtention de fortes épaisseurs de cémentation. En revanche, elle ne peut s’appliquer économiquement aux fabrications de grandes séries, car elle nécessite des manutentions nombreuses, salissantes, et la constance de la qualité est difficile à maintenir. Les pièces sont noyées dans un cément solide, divisé, à base de carbone contenu dans des caisses en alliages réfractaires, étanches. Ces caisses sont chauffées dans des fours classiques à gaz ou électriques pendant un temps assez long, qui peut atteindre vingt-quatre heures dans le cas de cémentation profonde sur 3 mm d’épaisseur. Le plus classique des céments solides est le cément de Caron pulvérulent, contenant 60 p. 100 de charbon de bois et 40 p. 100 de carbonate de baryum. À haute température, la réaction du charbon de bois avec l’oxygène de l’air enfermé dans la caisse et la dissociation du carbonate alcalino-terreux créent une atmosphère carburante à base d’oxyde de carbone. Après cémentation, les caisses sont défournées, et les pièces sont récupérées soit à chaud, soit-après refroidissement en caisse pour être trempées.

• La cémentation en bain de sels liquides, ou cyanuration, consiste à immerger les pièces directement dans un bain de sels constitué, par exemple, de 20 p. 100 de cyanure de sodium dilué avec 20 p. 100 de chlorure de potassium et 20 p. 100 de carbonate de sodium, et activé par 40 p. 100 de chlorure de baryum. À partir de la décomposition du cyanure à haute température, le carbone et l’azote qui se dégagent diffusent simultanément dans les couches superficielles des pièces. La cyanuration est rapide avec un chauffage homogène des pièces, mais elle ne s’applique qu’à de petites pièces, et la profondeur de cémentation est limitée à 0,5 mm pour une heure d’immersion.

• La cémentation gazeuse utilise une atmosphère carburante contenant 30 p. 100 d’oxyde de carbone, 30 p. 100 d’hydrogène et 40 p. 100 d’azote, obtenue à partir de divers mélanges gazeux ou liquides, tels que le méthane du gaz naturel, le gaz de gazogène à charbon de bois, le gaz à l’eau, le gaz de ville, etc. Ces divers gaz sont traités pour éliminer l’excès de vapeur d’eau et de gaz carbonique. La cémentation gazeuse, appliquée pour la première fois en Europe dès 1935, grâce aux travaux de Jacques Pomey (1897-1971), s’est développée tout particulièrement dans l’industrie automobile. Elle permet le traitement de grandes séries par passage continu dans des fours à atmosphère carburante et assure une régularité de qualité jusqu’à une épaisseur de cémentation de 1 mm.