Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

catholicisme social (suite)

Député du Morbihan (1876-1878, 1881-1893), puis du Finistère (1894-1914), Albert de Mun est, au Parlement, l’éloquent porte-parole du catholicisme social ; il intervient efficacement dans la préparation de la législation sociale relative notamment au syndicalisme (1884, 1889), à la limitation de la journée de travail pour les femmes et les enfants (1888, 1890), à la défense du patrimoine familial (1887)... En 1885, Albert de Mun essaie de constituer un parti catholique : Léon XIII lui demande de renoncer à son projet. C’est encore dans un esprit d’obéissance au pape que ce monarchiste accepte de se rallier à la république. Il se coupe ainsi de nombre de ses amis (La Tour du Pin notamment) sans, pour cela, atténuer la méfiance que lui portent les socialistes. Cependant, Albert de Mun, s’il évolue, sur le plan social, du corporatisme au syndicalisme, refuse de suivre le mouvement de la Démocratie chrétienne, qui lui semble trop étrangère aux notions de hiérarchie. (Académie française, 1897.)

 G. Hoog, Histoire du catholicisme social en France. De l’encyclique « Rerum novarum » à l’encyclique « Quadragesimo anno » (Domat-Montchrestien, 1942). / R. Kothen, la Pensée et l’action sociales des catholiques, 1789-1944 (Éd. universitaires, 1947). / H. Rollet, l’Action sociale des catholiques en France (t. I, 1871-1901, Boivin, 1948 ; t. II, 1901-1916, Desclée De Brouwer, 1958) ; Sur le chantier social (Chronique sociale, 1955). / J. B. Duroselle, les Débuts du catholicisme social en France, 1822-1870 (P. U. F., 1951). / F. A. Isambert, Christianisme et classe ouvrière (Casterman, 1961) ; De la Charbonnerie au saint-simonisme. Étude sur la jeunesse de Buchez (Éd. de Minuit, 1966) ; Buchez ou l’âge théologique de la sociologie (Éd. Cujas, 1967). / R. Talmy, Aux sources du catholicisme social (Desclée De Brouwer, 1963) ; René de La Tour du Pin (Bloud et Gay, 1965) ; Albert de Mun (Bloud et Gay, 1965) ; le Syndicalisme chrétien en France 1871-1930 (Bloud et Gay, 1966). / C. Molette, Albert de Mun, 1872-1892 (Beauchesne, 1970).

Caton

Surnom de la gens Porcia, dont deux membres sont célèbres, qui portent tous les deux le nom de Marcus Porcius Cato.



Caton l’Ancien

(Tusculum [Frascati] 234 - † 149 av. J.-C.). Issu d’une famille campagnarde et plébéienne, il partage les premières années de sa vie active entre la gestion de son domaine de Tusculum et son activité militaire. En 214, il est, probablement en qualité de tribun, sous les ordres de Q. Fabius Cunctator, qui fait de lui son ami et avec qui on le retrouve, quelques années plus tard, au siège de Tarente. En 207 il prend part à la victoire du Métaure.

L. Valerius Flaccus, un patricien, impressionné par ses qualités personnelles et son éloquence, l’engage à tenter une carrière politique à Rome et l’assure de son appui. Caton est élu questeur en 205 et accompagne Scipion l’Africain en Sicile. Il s’offusque des manières de Scipion et critique publiquement son luxe. Il en résultera une hostilité sourde et durable de Caton envers la famille entière des Scipions, qui patronne la culture grecque à Rome.

Préteur en Sardaigne en 198, Caton pourchasse les usuriers et donne maintes preuves de sa sévérité et de son intégrité. Bien que n’appartenant pas à une vieille famille romaine, il est élu consul en 195. Après avoir échoué dans ses efforts pour empêcher l’abrogation d’une loi somptuaire, la loi Oppia (220), il part guerroyer dans l’Espagne révoltée, où il prend le parti de faire vivre l’armée sur le pays en renvoyant tous les fournisseurs de vivres. Dans son ouvrage historique les Origines, il se vante d’avoir pris en un temps record des centaines de villes. Il organise l’exploitation des mines espagnoles de fer et d’argent et reçoit à son retour les honneurs du triomphe. Quatre ans plus tard, tribun militaire, il prend part à la bataille des Thermopyles contre le roi séleucide Antiochos III (191).

Il se consacre ensuite aux luttes politiques. Défenseur des traditions romaines contre l’hellénisme envahissant, de l’austérité des mœurs contre le luxe, de la gestion honnête contre les concussions des hommes de gouvernement, il attaque sans cesse, accusant les uns et les autres. En 184, il est élu censeur ; il élimine des rangs des sénateurs et des chevaliers ceux qui ne témoignent pas d’une moralité et de scrupules à sa convenance. Il s’en prend à toutes les manifestations de luxe (bijoux, voitures, jeunes esclaves) et les taxe. Il met aussi de l’ordre dans la ville de Rome, en faisant respecter l’alignement des rues, en interdisant l’usage abusif des aqueducs, en construisant des égouts et en édifiant une nouvelle basilique.

Dans les années qui suivent sa censure, Caton poursuit son action politique, accusant ses compatriotes et prenant la défense des peuples vaincus. Mais, lors de sa mission à Carthage (157) où il semble être allé pour régler un différend entre cette ville et le roi Masinissa, il est frappé par la renaissance de l’ancien adversaire de Rome. Il prend dès lors le parti de réclamer avec obstination la destruction de la ville, ce qui aura lieu peu après sa mort.

Écrivain, Caton avait rédigé de nombreux discours, dont Cicéron faisait grand cas. mais qui sont perdus, comme ses Origines, qui furent la première histoire romaine en latin. Son traité De re rustica concerne la gestion du domaine rural. Il y révèle sa personnalité tout entière, son instinct de vieux paysan, avec ses recommandations d’une économie sordide : ne rien prêter à personne, sinon à gros intérêt, toujours vendre, ne jamais acheter, vendre les esclaves vieux ou malades...

D’une vitalité étonnante, ce personnage aux cheveux roux et à la mine farouche a occupé une place importante sur la scène politique pendant un demi-siècle. Derrière sa façade de vertu se cachaient bien des défauts, l’avarice, la prétention, la hargne (« il mordait tout le monde »), mais aussi ses intérêts de classe : derrière ses attaques, on sent le conflit endémique entre des coteries politiques rivales. De son action, en tout cas, il n’est rien resté : Rome s’est hellénisée, corrompue à un rythme accéléré.