Religieuse italienne (Sienne 1347 - Rome 1380).
Sa vie
Caterina Benincasa répond au premier appel de Dieu en faisant le vœu de virginité. À douze ans, elle cède à l’amour de la parure, mais la mort de sa sœur l’amène à se « convertir » : elle tond ses cheveux et se réfugie dans sa « cellule intérieure ».
Après bien des persécutions, sa famille accepte la vocation de Catherine, qui est reçue dans le tiers ordre de Saint-Dominique. C’est l’époque de visions où le Christ lui-même la forme à son gré ; puis vient une crise violente mais brève qui débouche sur une seconde « conversion », plus intime. Catherine est dès lors décidée à porter toute sa vie la croix d’un apparent abandon de Dieu. Mais le Christ revient l’épouser « dans la foi » : c’est le fameux « mariage mystique » (1367). L’union transformante se parfera dans l’échange des cœurs et l’impression des stigmates du crucifié sur le corps de Catherine, bien qu’invisiblement.
Second versant de la vie de Catherine : après une « mort » plus que symbolique, Catherine revient à la vie chargée de missions pour ses frères et pour l’Église. Peu à peu, autour d’elle se groupe un petit cénacle, tandis que le cercle de sa bienfaisance s’élargit sans cesse. On lui attribue des miracles et elle témoigne d’une claire vision des âmes. Il nous reste près de 380 de ses Lettres, adressées aux plus grands personnages, aux papes même. C’est ainsi qu’elle se rend à Avignon pour tenter d’en ramener Grégoire XI à Rome, et, de fait, ce dernier y reviendra en 1377. Il faut, avec R. Fawtier, insister sur le sens d’une démarche qui, tout en comportant bien des incidences politiques, tranche non sans brutalité parmi toutes les autres influences diplomatiques par sa visée proprement spirituelle : « La mission de Catherine est une mission divine. C’est Dieu qui veut le retour du pape à Rome, la croisade et la paix. » Car ce retour semble bien, aux yeux de Catherine, valoir surtout comme condition pour la réunion de toute la chrétienté contre les conquêtes incessantes des Turcs.
En 1378, Catherine dicte son Dialogue (Dialogo della Divina Providenza), nourri de ses extases. Son agonie passe par deux jours et deux nuits de délaissement intérieur et d’angoisses, qu’elle endure pour les besoins immenses de l’Église, à la veille du Grand Schisme.
La pensée directrice
Un allégorisme flamboyant, familier à cette époque, nous rend aujourd’hui assez difficile la lecture du Dialogue et des Lettres. Mais la doctrine de Catherine de Sienne est remarquablement simple et homogène. Au départ, l’enseignement du Christ : « Tu es celle qui n’est pas, et moi je suis Celui qui suis. » C’est là cette double « connaissance de Dieu et de soi-même » dont il faut faire comme une « cellule » intérieure d’où l’homme doit juger et jauger toute chose et toute action. Attitude fondamentale qui se résume en un mot : humilité.
Comme tous les mystiques, Catherine est d’une exigence terrible sur les purifications nécessaires et la « haine » qu’il faut avoir contre l’amour-propre. Mais toute pénitence que l’on tenterait pour ses péchés ne vaut que par l’amour.
Cette doctrine est très conforme à l’intellectualisme de la pensée dominicaine et thomiste. Mais, ici, cet intellectualisme est tout enflammé par un amour cordial de Dieu et du Christ. Catherine est la preuve vivante de l’inanité d’une opposition entre action et contemplation, entre amour du prochain et de Dieu. Canonisée en 1461, elle a été proclamée docteur de l’Église en 1970.
C. J.-N.
R. Fawtier et L. Canet, la Double Expérience de Catherine Benincasa (Gallimard, 1948). / S. Undset, Catherine de Sienne (Oslo, 1951 ; trad. fr., Stock, 1952). / R. Zeller, Sainte Catherine de Sienne (Fayard, 1962). / S. Bézine, Docteur de la miséricorde, sainte Catherine de Sienne (Libr. Saint-Paul, 1970).